Elon Musk est sans contredit l’entrepreneur de la Silicon Valley qui se rapproche le plus de Tony Stark, alias Iron Man. Comme Stark, il est milliardaire et, comme Stark, son empire compétitionne avec les géants américains de la défense et de l’aérospatiale avec SpaceX. S’il ne voyage pas en zones de conflits, il ne chôme pas à l’extérieur de ses heures de bureau à SpaceX. En effet, l’entrepreneur est également pdg du fabricant de voitures électriques Tesla et président du conseil de SolarCity, un installateur de panneaux solaires.
Bref, si Musk n’enfile pas d’exosquelette robotisé pour aller combattre les méchants en zones de conflit, il s’est donné pour mission de sauver l’humanité. Rien de moins. L’entrepreneur, qui doit ses premiers millions aux start-ups PayPal et Zip2, tente de stopper le réchauffement planétaire avec Tesla et SolarCity. Il a aussi mis sur pied SpaceX en guise de plan B pour l’humanité. En effet, si SpaceX se contente pour l’instant de construire des fusées et de desservir la station Station spatiale internationale, Elon Musk vise à fonder une colonie sur Mars, de manière à offrir une porte de sortie à la race humaine.
Bref, il y a quelque chose qui relève du héros de bande dessinée chez Musk. Une biographie de l’homme d’affaires publiée le 19 mai dernier révèle d’ailleurs que Robert Downey, Jr, l’acteur qui a incarné Tony Stark au grand écran, aurait rencontré Musk pour se préparer à son rôle.
Signé par le journaliste de Bloomberg Businessweek Ashlee Vance, le livre Elon Musk: Tesla, SpaceX, and the Quest for a Fantastic Future est riche en anecdotes. Entre autres choses, on y apprend que le jeune Musk a quitté l’Afrique du Sud pour venir à Montréal, avant de se rendre compte que l’oncle chez qui il voulait s’installer dans la métropole québécoise avait déménagé au Minnesota.
Du reste, ce qui m’intéressait le plus, à la lecture de cette brique de 400 pages, n’était pas le séjour de Musk au Canada. C’était de comprendre comment Elon Musk était parvenu à transformer en succès commerciaux des projets titanesques à première vue voués à l’échec. Voici donc sept stratégies d’Elon Musk qui, jusqu’à aujourd’hui, lui ont permis de réaliser l’impossible.
1. Il établit des échéanciers impossibles à respecter
Lorsqu’il a mis sur pied SpaceX, Elon Musk a annoncé publiquement que la nouvelle société bâtirait une fusée, puis l’enverrait dans l’espace 15 mois après sa fondation. Dans les faits, ce n’est que 6 ans après sa fondation, soit en 2008 plutôt qu’en 2003, que le premier vol couronné de succès de sa fusée a eu lieu. Malgré que l’échéancier n’ait pas été respecté, Musk et ses ingénieurs ont réalisé tout un exploit en matière de coûts et de délais. Pour y parvenir, Musk impose à ses employés des dates de livraisons presque impossibles à respecter, puis leur demande de lui remettre un échéancier détaillé en fonction de cette date. Ceux-ci doivent prévoir l’accomplissement de tâches sur une base horaire, voire minute par minute. Ces échéanciers sont si serrés qu’un employé a confié à l’auteur Ashlee Vance qu’ils ne donnaient pas le temps aux employés d’aller aux toilettes pour faire un numéro 2.
2. Il choisit des candidats prêts à travailler plus de 90 heures
Elon Musk cherche bien entendu des employés ultra-qualifiés, mais il a aussi besoin de trouver des individus capables de travailler plus de 90 heures semaine après semaine. Aussi, lorsqu’il appelle des professeurs pour demander des suggestions d’étudiants talentueux, il précise qu’il cherche des candidats célibataires. La deuxième stratégie qu’il emploie pour mettre la main sur des candidats prêts à consacrer leur vie éveillée à son entreprise est de miser sur la mission. En effet, Musk tend à embaucher des candidats dont la motivation principale provient de la mission, soit sauver l’humanité, ou de l’occasion de travailler sur de nouvelles technologies.
3. Il ne tolère pas qu’on lui présente un problème sans solution
Elon Musk dirait à qui veut l’entendre: «Plus on attend avant de renvoyer quelqu’un, plus ça fait longtemps qu’on aurait dû le renvoyer.» Aussi, ce n’est pas étonnant que les employés ayant de mauvaises nouvelles à annoncer à Musk craignent pour leur emploi. Ils ont toutefois appris à travailler avec Musk, qui ne supporte pas de se voir soumettre un problème sans une solution qui va avec ou, à tous le moins, sans un plan d’action pour en trouver une. Aussi, une équipe d’ingénieurs qui devaient lui annoncer qu’ils ne respecteraient pas leur date de livraison ont eu la bonne idée de proposer un plan à Musk pour livrer à temps. Ils lui ont dit qu’ils avaient besoin de tant d’argent et d’employés supplémentaires et lui ont soumis des CV de candidats qualifiés. Musk, connu pour son tempérament, aurait acquiescé à leurs demandes sans discuter.
4. Il recherche constamment les caméras
Alors que des milliardaires comme Mark Zuckerberg et Bill Gates on toujours été mal à l’aise face aux caméras, ce n’est pas le cas d’Elon Musk, qui se plait dans son rôle d’alter ego de Tony Stark dans les médias. Elon Musk a vite compris la valeur de la couverture médiatique, qui génère pour lui et ses sociétés une publicité qu’il ne pourrait tout simplement pas se payer. Après la vente de Zip2, Musk a acheté une McLaren F1, puis accueilli chez lui CNN, qui était là à 7h00 du matin pour filmer la livraison du véhicule. Musk a du reste transformé son statut d’entrepreneur vedette en véritable atout pour ses entreprises. Au fil des ans, il a en effet multiplié les annonces et les coups de publicité pour faire avancer les intérêts de ses sociétés, qu’il s’agisse de l’Hyperloop, du transport d’une de ses capsules Dragon 9 à Washington ou du dévoilement-surprise de la possibilité de changer les batteries du Modele S de Tesla en 90 secondes.
5. Il s’attaque à des industries ultra-réglementées
Ce qu’Elon Musk a retenu du stage qu’il a fait à la Banque Scotia, durant son séjour au Canada, c’est que les banquiers sont aussi riches qu’il sont stupides. Aussi, à peine avait-il empoché les millions issus de la vente de Zip2 qu’il s’est attelé à la tâche de révolutionner l’une des industries les plus réglementées du monde. Sous l’impulsion de Musk, X.Com, qui allait fusionner avec un concurrent et devenir PayPal, visait ni plus ni moins qu’à devenir une banque à part entière, en offrant aussi bien des comptes bancaires que des comptes de courtage en ligne. Il s’agissait d’un pari risqué, mais évoluer dans une industrie ultra-réglementée offrait deux avantages à l’entrepreneur. D’une part, ses concurrents traditionnels, peu habitués aux changements rapides, accusaient un retard technologique important et, d’autre part, l’obstacle réglementaire lui assurait une compétition minimale du côté des start-ups. L’autre co-fondateur de PayPal, Peter Thiel, faisait d’ailleurs l’éloge des monopoles dans son livre Zero to One. Elon Musk, qui n’a pas hésité à embaucher un lobbyiste pour Tesla, a profité de ce double avantage avec PayPal, mais aussi, avec ses autres sociétés.
6. Il fait payer les contribuables
Si Elon Musk projette l’image d’un grand capitaliste ayant peu de patience pour les gouvernements, il est toutefois passé maître dans l’art d’obtenir des subventions. En 2010, Tesla a obtenu un prêt de 465 millions du département de l’Énergie des États-Unis, sans lequel la société n’existerait probablement plus aujourd’hui. SpaceX, pour sa part, tire la part du lion de ses revenus des contrats et des bourses que lui accordent la NASA et le département de la Défense des États-Unis. Elon Musk sait aussi presser le citron des gouvernements locaux, en négociant serré les incitatifs fiscaux qu’il obtient de ceux-ci lorsqu’il ouvre une nouvelle usine. La valeur des incitatifs fiscaux obtenus par Tesla pour ouvrir sa méga-usine de batteries au Nevada s’élèverait ainsi à 1,3 milliard. Et c’est sans parler des généreux crédits d’impôts fédéraux (de 30% sur les panneaux solaires), sans lesquels le modèle d’affaires de SolarCity ne tiendrait pas la route.
7. Il sait établir des priorités et les faire respecter
Si Elon Musk n’est pas le patron le plus aimé du monde, son éthique de travail légendaire (il travaille littéralement sans arrêt) et sa compétence en font un gestionnaire respecté et même craint. Aussi, lorsqu’Elon Musk identifie une nouvelle priorité, il est capable de s’y tenir en y travaillant sans relâche, de même que de l’imposer à ses employés. Dans son livre, Ashlee Vance révèle que l’existence même de Tesla était menacée en février 2013, alors que les problèmes techniques se manifestaient à un rythme alarmant chez les propriétaires de Tesla et que ceux qui avaient pré-commandé la voiture tardaient à être convertis en acheteurs. Elon Musk aurait alors commencé à négocier la vente de Tesla à Google en guise de plan B, mais parallèlement, aurait imposé à de nombreux employés, qu’ils soient ingénieurs, comptables ou recruteurs, de prendre le téléphone et de convertir les réservations en vente pour sauver la société. Non seulement ce jeu de rôle a sauvé Tesla et fait dérailler les négociations avec Google, mais il aussi permis à Tesla de générer le premier bénéfice trimestriel de son histoire, dévoilé en mai 2013.