BLOGUE. Apple a mis la biométrie sous les feux de la rampe en dotant son iPhone 5S d’un lecteur d’empreintes digitales. Or, les pays émergents ont, en matière de biométrie, une longueur d’avance considérable par rapport aux pays dont la majorité des résidents peuvent se payer un iPhone.
De la même manière que les téléphones cellulaires ont été adoptés d’autant plus rapidement dans les pays émergents que leur infrastructure filaire était sous-développée, ceux-ci passent à la biométrie sans passer par les cartes à puce. Dans les faits, dans les pays où la biométrie est adoptée à grande échelle, de nombreux citoyens n’ont aucun papier d’identité, une situation qui les exclut pratiquement du système bancaire et des services gouvernementaux.
Déjà, pas moins de 425 millions d’Indiens sont identifiables grâce à leurs empreintes digitales et leur Iris, grâce au programme gouvernemental Aadhaar. Lancé en 2010, le programme devrait permettre d’identifier 1,2 milliard d’Indiens au courant des prochaines années, soit l’ensemble de la population.
De nombreux gouvernements africains ont lancé des initiatives similaires, principalement afin de lutter contre la fraude électorale. Éric Talbot, pdg de S.I.C. Biometrics, un fabricant de capteurs biométriques, me confiait récemment qu’il y avait 13 projets du genre en Afrique présentement. Ce dernier, qui fournit sa technologie à certains d’entre eux, soutient que la technologie, quoique déployée en vue des élections, servira à terme aux différentes agences gouvernementales.
Si la biométrie permet à de nombreux citoyens de faire valoir leurs droits plus facilement, de voter dans le cadre d’élections plus libres et de bénéficier des programmes gouvernementaux, ses bénéfices ne s’arrêtent pas là. L’accès au crédit, voire à un simple compte de banque, pourrait être démocratisé grâce à la technologie. Au Brésil, la banque Bradesco a déjà déployé des guichets automatiques fonctionnant grâce aux empreintes de la paume de la main (oui, une paume est plus difficile à couper qu’un doigt). La banque russe Sberbank, qui a notamment des activités en Inde, a quant à elle mis au point un prototype de guichet biométrique allant jusqu’à intégrer un détecteur de mensonges.
L’occident, qui accuse déjà un retard en matière de paiement mobile, est condamné à jouer les seconds violons en matière de biométrie. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, dans la mesure où l’utilisation de la biométrie pourrait porter un nouveau coup au concept de vie privée, déjà mis à mal au courant des dernières années. Toutefois, ce retard technologique pourrait affecter la capacité des pays riches d’innover pour l’ensemble de la planète.
Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à vous procurer l’édition de cette semaine du journal Les Affaires, dans laquelle je signe un article sur l’impact du iPhone 5S sur le marché de la biométrie.