Le métier de journaliste est extrêmement nourrissant. Chaque semaine, chaque jour même, j'ai la chance de rencontrer des gens qui, en me racontant leur histoire, me gardent l'esprit en vie. Je m'enrichis de leurs expériences, je remets en question mes pratiques, j'ai même parfois la chance de me défaire de quelques biais.
C'est ce qui est encore arrivé cette semaine. Damien Silès, directeur général du Quartier de l'innovation, à Montréal, m'a recommandé la lecture d'un petit livre jaune, Le chasseur, le mage et le cultivateur. Sous-titre : Petit traité sur l'innovation no Z5.1 . Il est sorti en 2015 et, mea culpa, je ne l'avais pas encore lu.
Vous l'aurez deviné, il y est question du processus d'innovation, sujet cher à Damien Silès.
L'auteur de ce livre, le Français Miguel Aubouy, se définit aujourd'hui comme un entrepreneur dans le domaine de l'innovation. Il est chercheur associé dans le groupe Mosaic, à HEC Montréal, depuis l'été dernier. Physicien de formation, il a accompagné au cours de sa carrière «une cinquantaine d'entreprises françaises et internationales vers la réalisation d'un produit susceptible de bouleverser le paysage économique dans leur domaine d'activité», dit sa biographie. Déjà, on a envie d'écouter ce qu'il a à dire.
Si je devais résumer ses 148 pages en quelques mots, ça irait ainsi : le processus d'innovation consiste à observer les besoins (le chasseur), à imaginer une solution (le mage) et à persévérer jusqu'à la réaliser (le cultivateur).
Le besoin, la solution, l'exécution. Est-ce que ce ne sont pas là, aussi, les fondements de l'entrepreneuriat ?
Ainsi, logiquement, on pourrait conclure qu'entreprendre, c'est innover. Voire qu'il n'y a pas d'entrepreneuriat sans innovation.
J'entends constamment parler du fameux risque de se lancer en affaires. C'est un fait, la plupart des entreprises ne font pas long feu. Avoir une idée (imaginer) ne suffit pas. Il faut qu'elle réponde à un besoin (chasser) et il faut la mettre en oeuvre (cultiver), ce qui n'est pas à la portée de tous. Beaucoup de statistiques le prouvent, comme celle-ci, de Statistique Canada : les PME qui ont fermé leurs portes en 2013 ont été plus nombreuses (83 270) que celles qui ont été crées (78 420) (données compilées en juin 2016).
Une partie de la solution est simpliste, mais vraie : rien ne sert de se lancer si ce n'est pour innover.
Un conseil autrement mieux formulé par Miguel Aubouy : «Ce qui est vrai pour l'art en général le devient pour les entreprises, au 21e siècle. Il s'agit désormais pour elles de brutaliser tout sacré.»
Julie Cailliau
Rédactrice en chef
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