DROIT AU BUT. Ce n’était pas un poisson d’avril. Comme prévu, la taxe carbone du gouvernement canadien est passée de 65 $ à 80 $ la tonne le 1er avril, ce qui ajoutera 3,3 cents au prix du litre d’essence et ce qui porte à 17,6 cents la hausse de ce prélèvement depuis son introduction en 2019. Selon le plan annoncé, cette taxe devrait atteindre 170 $ la tonne, soit 40 cents le litre, en 2030. Relativisons : la taxe carbone est déjà à 180 $ la tonne en Suède.
On comprend que celle-ci soit impopulaire, car le gouvernement n’arrive pas à en expliquer les bénéfices ni sa neutralité fiscale pour les ménages. Selon un sondage récent Angus Reid, 40 % demandent son abolition, 11 % réclament une baisse, 27 % veulent en geler le coût et 22 % sont en faveur d’une hausse. Un quart d’entre eux ignoraient que leur ménage avait reçu l’an dernier une remise provenant de cette taxe. En outre, plus de 50 % pensent que la taxe payée est supérieure à la remise reçue.
L’État redistribue 100 % du produit de cette taxe. Les remises sont déposées dans un compte bancaire des bénéficiaires. Or, 50 % d’entre eux ignoreraient que la somme déposée provient de la taxe carbone. Ottawa redistribuera cette année 90 % des 11,8 milliards de dollars (G $) que rapportera cette taxe à 80 % des ménages à faible et à moyen revenu des huit provinces où elle est perçue (cette taxe n’existe pas au Québec ni en Colombie-Britannique. Voir plus loin). Le 10 % restant de la taxe carbone sert à subventionner des écoles, des communautés et des entreprises.
Les montants versés en vertu de cette taxe varient selon le nombre de personnes dans un ménage et la composition des hydrocarbures consommés dans chaque province.
L’impopularité de la taxe carbone a amené les premiers ministres de sept provinces à demander en vain un report de la hausse du 1er avril. Celui de la Saskatchewan, Scott Moe, a dit refuser de la percevoir sur le gaz naturel distribué par une société appartenant à sa province. Il a ainsi placé son gouvernement dans l’illégalité, ce qui pourrait entraîner des conséquences juridiques.
À la suite de pressions politiques, le gouvernement de Justin Trudeau a suspendu, en octobre, la taxe carbone sur le mazout pour trois ans dans les provinces de l’Atlantique, où les ménages utilisent massivement cet hydrocarbure pour se chauffer. Cette décision inopportune a créé des espoirs ailleurs au pays, rendant encore plus impopulaire cette ponction fiscale.
Signal de prix
La taxe carbone est un moyen peu coûteux et efficace de réduction des gaz à effet de serre (GES) et de transition vers une économie plus verte, plus propre, plus prospère et plus responsable à l’égard des futures générations. Elle envoie un signal de prix aux consommateurs et aux entreprises pour les inciter à réduire leur consommation d’hydrocarbures et, ainsi, à diminuer les émissions de GES. À terme, on devrait acheter moins de voitures énergivores, privilégier le transport collectif, mieux isoler nos maisons, économiser l’électricité. Pour leur part, les entreprises devraient mieux gérer leur consommation d’énergie et investir dans des équipements plus efficaces et moins polluants.
C’est ce que refuse de reconnaître le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, qui promet d’abolir cette taxe qu’il juge inutile et inflationniste. Malheureusement, celui-ci n’a rien à proposer, à part de dire qu’il favoriserait plutôt des technologies industrielles, dont l’utilisation requerrait d’importantes subventions. Son discours est opportuniste, mensonger et irresponsable face à l’urgence de s’occuper des changements climatiques.
Marché du carbone
Cette taxe n’existe pas au Québec ni en Colombie-Britannique, qui ont créé un « marché du carbone » avec la Californie. Ce système repose sur la vente à l’encan par les gouvernements de droits d’émissions de GES aux entreprises, qui doivent compenser les GES qu’elles produisent. Les revenus tirés de ces droits servent à soutenir la transition énergétique.
Du 25 novembre 2014 au 14 février 2024, le Québec a perçu, à ce titre, 8,8 G $, qui ont été versés au Fonds d’électrification et de changements climatiques, qui finance des programmes et des initiatives de lutte contre les GES. À son dernier encan, le 14 février, le prix de la tonne de GES a atteint 56,61 $, ce qui est bien en deçà des 80 $ du fédéral.
Le « marché du carbone » prévoit un prix minimum de 97 $ la tonne (22,5 cents le litre d’essence) en 2030. C’est très peu en comparaison du prix de 170 $ visé par Ottawa. À défaut d’autres mesures plus contraignantes, telles une taxation des voitures énergivores ou une taxe kilométrique, le prix prévu par ce système est trop faible pour en espérer une incidence notable. Espérons que les encans à venir enverront un signal de prix plus ambitieux.
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