Cela fait une bonne trentaine d'années que l'on parle de revues de programmes à Québec. On a d'ailleurs ajouté dans plusieurs lois l'obligation de faire une évaluation des nouveaux programmes mis en place.
Cette initiative est évidemment pertinente, mais le fait-on vraiment dans une perspective d'étudier l'efficience (si les résultats attendus sont obtenus) et l'efficacité (si on s'y est pris de la bonne façon) d'un programme, et, dans le cas contraire, de le repenser, voire de l'abandonner ? Il est rarissime en effet qu'un programme soit entièrement revu et encore moins aboli. C'est plutôt le contraire qui se produit.
Par exemple, le rapport d'évaluation du programme d'aide à la procréation assistée, dont on parle beaucoup ces jours-ci et dont on connaît les dérives éthiques et budgétaires, ne propose rien de moins que d'étendre dans toutes les régions plusieurs services préparatoires à la fécondation in vitro, qui ne sont offerts que dans quatre centres. Le coût de ce programme, dont la loi est interprétée de façon de plus en plus libérale, dépassera sûrement les 100 millions de dollars dans quelques années, comparativement aux 70 M$ estimés pour 2013-2014. Le «bar ouvert» qu'avait anticipé le Dr Gaétan Barrette il y a quelques années est maintenant grand ouvert. Si ce programme unique au Canada est maintenu dans sa forme actuelle, on aura la pleine mesure de l'incapacité de nos politiciens à réparer les erreurs du passé.
Une tâche difficile
On a aussi beaucoup parlé dans les années 1970 et 1980 de la technique du budget base zéro (zero-based budgeting), selon laquelle l'État établit les budgets de ses programmes et de ses agences comme si on repartait à zéro. Autrement dit, une fois que le bien-fondé d'un programme ou d'une agence a été reconnu, on établit son budget en éliminant tout ce qui est superflu. Cette technique a des avantages certains sur le plan de l'efficience quant à l'utilisation des ressources et de l'efficacité. Elle permet de remettre en question des activités ou services non essentiels (comme les fameux «nice to have» et «tant qu'à y être»), de déceler le gaspillage, d'éviter l'augmentation automatique des budgets (comme on le fait dans l'éducation), d'évaluer les coûts des services offerts (cela existe très peu dans le système de santé), d'envisager l'impartition de tel programme ou service et de ne pas perdre de vue leur objectif initial.
C'est une tâche difficile. Il faut non seulement remettre en cause ce qu'on a toujours fait et la façon de le faire, mais aussi rationaliser et enlever à des salariés et à des bénéficiaires, qui sont tous des électeurs, des avantages financiers et autres acquis. Détail non négligeable, il faut des fonctionnaires capables de le faire.
Comme bien d'autres l'ont déjà dit, Luc Godbout et Claude Montmarquette viennent de nous rappeler que, comme collectivité, nous dépensons beaucoup trop, que le déficit du gouvernement est structurel (et non passager), que la dette publique risque d'être dévaluée, bref, que nous vivons au-dessus de nos moyens.
Le temps du déni est révolu
Nous ne nous en sortirons pas par magie. Nous ne pouvons plus accroître les impôts ni nous endetter davantage. Un État n'est pas très différent d'un ménage. Certes, un État ne peut faire faillite, mais il y a des conséquences à l'endettement excessif, comme le vivent certains pays européens. Et plus nous attendrons, plus le réveil sera brutal. Serait-on assez irresponsables pour laisser ce fiasco aux prochaines générations ?
Il y a toutefois des solutions :
> Réévaluer les programmes un par un, comme si nous avions à les recréer, avec l'objectif d'en abolir. C'est un travail de longue haleine, qui est absolument nécessaire. Cela vaut pour le gouvernement lui-même, les institutions, les agences et les organismes de l'État. Tiens, tiens, le CHUM vient d'abolir 26 postes de cadre. Il faut croire qu'ils n'étaient pas essentiels ;
> Cesser de budgéter sur la base des dépenses de l'année précédente, comme on le fait dans les universités. Pourquoi continuer de former plus de philosophes, d'anthropologues et autres ...logues qu'il n'y a d'emplois disponibles ? Nos universités sont sous-financées, mais elles ne reverront pas leurs programmes aussi longtemps qu'on ne reverra pas leur mode de financement (fondé sur le nombre d'étudiants inscrits) ;
> Utiliser davantage le principe de l'utilisateur-payeur. Cela vaut pour les droits de scolarité universitaire (de très loin les plus bas au Canada), les services de garde à 7 $ (une aberration), certaines infrastructures de transport, l'eau, etc.
Ces approches sont courantes dans les entreprises, où la productivité et l'optimisation des processus sont des conditions de survie. Mais pourquoi ne sont-elles pas pertinentes également pour le gouvernement et ses agences ?
L'état de nos finances publiques exige la collaboration de tous les élus et des décideurs de nos grandes organisations socioéconomiques. Le temps du déni est révolu.
J'aime
Transports Canada a annoncé de nouvelles normes de transport de matières dangereuses par rail et le retrait d'ici 30 jours de 5 000 wagons-citernes particulièrement vulnérables en cas d'accident. Par ailleurs, quelque 65 000 wagons DOT-111 non renforcés doivent être éliminés des chemins de fer nord-américains d'ici trois ans.
Je n'aime pas
Les syndicats représentant les employés du gouvernement québécois fourbissent leurs armes en vue du renouvellement de leurs conventions collectives. Certes, ceux-ci n'ont pas à être les seuls à payer pour les compressions exigées par la situation des finances publiques, mais il faut souhaiter qu'ils profitent de cette révision pour trouver des façons d'améliorer l'efficience des programmes et l'efficacité dans la prestation des services rendus.