ANALYSE DU RISQUE - La Terre comptera 11,2 milliards d'habitants en 2100, et un humain sur trois vivra alors en Afrique, selon les récentes prévisions de l'Organisation des Nations unies (ONU). Ce qui représentera un défi majeur pour les écosystèmes, la gestion des ressources et la stabilité mondiale.
Actuellement, la planète compte 7,3 milliards d'habitants. La Terre en accueillera donc quatre milliards de plus, ce qui représente l'ajout de trois Chine. Ce rythme de croissance est donc très rapide.
Pour mettre les choses en perspective, la population mondiale est passée d’un à six milliards d'habitants, et ce, entre 1800 et 2000. Cinq milliards de plus en deux siècles. Là, on parle de quatre milliards de plus en 85 ans!
Les prédictions de l'ONU sont-elles du reste crédibles?
En 1948, l'organisation avait prévu que la Terre compterait six milliards d'habitants en 2000, rappelle le World Economic Forum.
On peut donc se fier à ses prévisions, même si des facteurs peuvent changer la progression de la population mondiale, admet elle-même l'ONU.
L'un d'entre eux est le taux de fécondité (le nombre moyen d'enfants par femme en âge de procréer), qui pourrait diminuer plus vite que prévu.
Cela dit, même si la population mondiale atteignait par exemple 10,2 milliards d'habitants en 2100 plutôt que 11,2 milliards, l'impact sur les écosystèmes et la gestion des ressources serait quand même énorme, selon les analystes.
La stabilité mondiale sera aussi un enjeu majeur dans la foulée de ce boom démographique, qui se produira essentiellement en Afrique.
Actuellement, l'Afrique abrite 15% de la population mondiale. En 2050, cette proportion passera à 25%, pour bondir ensuite à 38% en 2100, selon l'ONU.
À la fin du siècle, l'Asie sera encore le continent le plus populeux, avec 4,9 milliards d'habitants (42% de la population mondiale). Mais sa progression sera modeste par rapport à sa population actuelle de 4,4 milliards.
Bref, la quasi-totalité de l'explosion démographique mondiale aura lieu en Afrique, où la population sera multipliée par quatre dans les 85 prochaines années pour atteindre 4,4 milliards d'habitants en 2100.
Le plus grand défi pour l'Afrique sera d'éduquer et de mettre en place une économie diversifiée pour intégrer tous ces gens sur le marché du travail.
Et pas de n'importe quelle façon. Voici pourquoi.
L'exploitation des ressources naturelles ne sera pas suffisante
À terme, cette économie devra s'appuyer non seulement sur le développement des ressources naturelles, mais surtout sur le développement des secteurs de l'industrie et des services (qui créent de nombreux emplois).
Comme en Chine, des entreprises nord-américaines, européennes et asiatiques délocaliseront une partie de leur production en Afrique.
Aussi, peut-être verrons-nous bientôt apparaître sur les produits que nous consommons ici les labels Made in Nigeria, Made in Egypt ou Made in Kenya.
À plus long terme, l'Afrique pourrait aussi devenir de plus en plus un marché de consommateurs, comme le deviennent graduellement des pays comme la Chine, l'Inde ou l'Indonésie.
Certains investisseurs pensent que l'Afrique n'y arrivera pas, qu'elle ne parviendra jamais à suivre l'exemple de la Chine.
Il est pourtant impératif que l'Afrique réussisse son décollage économique au 21e siècle.
Car, si elle le rate, ce sera non seulement une catastrophe humanitaire et économique pour l'Afrique, mais aussi pour une bonne partie du monde, affirment plusieurs spécialistes en risques géopolitiques.
La pauvreté, la faim, l'instabilité, voire les guerres et le terrorisme, inciteront des dizaines, voire de centaines de millions de personnes à migrer vers d'autres régions du monde d'ici la fin du 21e siècle, notamment en Europe.
Ceux qui s'inquiètent déjà de la crise des migrants sur le vieux continent depuis un an n'ont encore rien vu.
Les pays européens pourront difficilement gérer un tel flux de migrants dans les prochaines décennies. Cette situation favoriserait la montée des parties d'extrême droite et provoquerait des crises politiques en Europe.
C'est pourquoi tous les pays - incluant le Canada - ont intérêt à ce que l'Afrique réussisse son décollage économique et, dans un monde idéal, réussisse aussi à limiter la croissance de sa population.
La stabilité du monde en dépend.