ANALYSE DU RISQUE - Les exportations du Québec en Chine progressent vite, plus rapidement même que celles du Canada. Par contre, plusieurs États américains surpassent - et de loin - notre performance sur le marché chinois.
Depuis 10 ans, les entreprises québécoises ont augmenté de 247% leurs expéditions de marchandises en Chine pour les porter à 2,8 milliards de dollars canadiens, selon Statistique Canada. Pendant ce temps, les exportations de l'ensemble des sociétés canadiennes n'ont progressé que de 169%, à 19,3 G$.
Nos exportateurs ont de quoi célébrer. Mais pas trop longtemps, car des États américains font beaucoup mieux que le Québec en Chine, qui est devenue notre deuxième marché d'exportation.
Le bât blesse surtout au niveau des États qui ont une population similaire à celle du Québec, comme la Caroline du Sud, l'Alabama et le Michigan.
Voici d'ailleurs une liste d'États qui éclipsent le Québec en Chine, avec la croissance de leurs exportations (de 2005 à 2014) et la valeur de leurs expéditions (en milliards de dollars américains).
-Caroline du Sud 622% (4,3 G$US)
-Alabama 579% (3 G$US)
-Michigan 425% (3,9 G$US)
-Oregon 424% (4 G$US)
-Iowa 391% (2,9 G$US)
-Washington 365% (15,3 G$US)
-Indiana 329% (2,6 G$US)
-Illinois 281% (6 G$US)
-Ohio 252% (3,9 G$US)
(source: US-China Business Council)
Pourquoi faudrait-il se préoccuper du rythme de croissance très rapide des exportations de ces États américains en Chine?
- Parce que cela signifie que les entreprises de ces États augmentent plus rapidement que les nôtres leurs parts de marché dans la deuxième économie mondiale.
- Parce que ces sociétés américaines améliorent davantage leur santé financière, voire boursière.
- Parce qu'elles créent enfin plus de richesses dans leur État respectif, en créant des emplois et en payant plus d'impôts.
Bonne nouvelle: le nouveau représentant officiel du Québec en Chine, Jean-François Lépine, est conscient de ces enjeux.
Dans un discours qu'il a prononcé le 13 octobre devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM), l'ancien journaliste et animateur de Radio-Canada a déclaré qu'il «restait encore du travail à faire», malgré les réussites du Québec en Chine.
Voici sa stratégie.
Comment accroître les exportations du Québec en Chine
Mais selon lui, le Québec doit avoir une stratégie bien précise pour accroître ses exportations dans ce pays. Laquelle? Il faut miser sur les forces de l'économie québécoise, et ce, de l'aérospatiale à l'ingénierie en passant par l'agroalimentaire et les technologies propres.
«Il ne faut pas tirer tous azimuts. Il faut bien cibler nos interventions», confiait-il dans un entretien à Les Affaires quelques jours avant son discours au CORIM.
Pour accroître les ventes de biens et de services du Québec en Chine, Jean-François Lépine affirme que les entreprises privées et les sociétés d'État comme Investissement Québec et la Caisse de dépôt et placement du Québec doivent aussi moins travailler en silo pour attaquer ce marché.
Le nouveau représentant du Québec veut également mieux positionner les cégeps et les universités québécoises en Chine.
Comme la demande surpasse l'offre de places dans les universités chinoises, il veut convaincre les étudiants chinois à venir étudier ici, ce qui constitue une forme d'exportation québécoise de services.
Enfin, Jean-François Lépine veut tisser des liens plus étroits avec la province côtière du Shandong, qui compte près de 100 millions d'habitants.
Cette province abrite la ville de Qingdao, où Bombardier Transport exploite une coentreprise, Bombardier Sifang.
Reste à voir si la nouvelle stratégie québécoise en Chine donnera des résultats à terme. Car, si le Québec veut accroître ses exportations en Chine, il n'est pas le seul.
Des Amériques à l'Europe à l'Asie, des dizaines de milliers d'entreprises veulent vendre leurs produits ou leurs services aux Chinois. Aussi, la concurrence est très vive, surtout dans les provinces côtières développées et industrialisées de la Chine.
À ce chapitre, les sociétés allemandes sont sans doute parmi les plus agressives sur marché chinois. Leurs produits sont partout ou presque.
Dans les usines chinoises où la machinerie allemande est souvent utilisée, sur les routes où l'on voit souvent les Audi et autres BMW de ce monde, sans parler des produits agroalimentaires que l'on peut acheter dans les épiceries.
On peut même trouver en Chine des brosses à dents avec le logo Made in Germany!
Rien n'empêche donc le Québec d'accroître davantage ses exportations en Chine. Sa performance depuis 10 ans - largement supérieure à celle du Canada - témoigne de la vitalité des entreprises québécoises.
Mais nous pouvons faire mieux, comme le souligne Jean-François Lépine.
Et l'exemple à suivre pourrait bien se trouver au sud de la frontière, en Caroline du Nord, en Alabama et au Michigan.