BLOGUE. Peut-on réaliser un documentaire sur l’économie aussi puissant - influent, médiatisé, controversé, etc. - que le film « An inconvenient truth » (« Une vérité qui dérange ») d’Al Gore sur l’environnement ?
C’est le défi de « Inequality for all », lancé il y a quelques jours au festival de cinéma de Sundance. « Inequality for all » est l’œuvre conjointe du jeune réalisateur Jacob Kornbluth et du vétéran Robert Reich, ex-secrétaire du travail, professeur à Berkeley, grand défenseur du Mouvement Occupons et économiste vedette. Le budget de ce documentaire, 80 000$, a été entièrement amassé par sociofinancement via la plateforme Kickstarter. J'ai eu le bonheur de m'entretenir avec Robert Reich il y a quelques mois, vous pouvez lire l'entrevue ici.
La crise économique de 2008 a inspiré de nombreux films, dont le célèbre « Too big to fail », un tour d ‘horizon cynique et déprimant des évènements qui ont mené à la débâcle du système financier américain.
« Inequality for all » ne se veut pas déprimant. Au contraire, les artisans misent sur l’humour. Et, surtout, ils veulent en finir avec le cynisme ainsi que le sentiment d’impuissance qui anime plusieurs citoyens. Ils aspirent à changer le rapport entre les citoyens et l’économie. Vous pouvez en lire davantage dans cet article du site "The Guardian".« L’économie n’est en fait qu’un amalgame de règles. Et ces règles, ce sont nous qui les créons. Que nous soyons démocrates ou républicains, nous avons le pouvoir de les changer si elles ne nous plaisent pas. », insiste Robert Reich.
« Nous ne sommes pas au service de l’économie, c’est elle qui est à notre service. Il est temps de le rappeler », ajoute-t-il.
« J’ai fait ce film pour apaiser mes angoisses, explique le réalisateur Jacob Kornbluth. Depuis la crise, j’entends des tas d’informations contradictoire à propos de l’économie et je n’y comprends rien. Moins je comprends, plus je suis inquiet. Et lorsqu’on discute d’économie entre amis, je sens qu’on passe à côté des vrais enjeux. « Inequality for all » est pour moi et tous ceux que la situation économique inquiète. »
Ce film traite de la détérioration de la situation de la classe moyenne américaine. Si vous pensez que l’herbe est plus verte au Canada, vous vous trompez. Le plus récent rapport du Conference Board met clairement en évidence la croissance des inégalités sociales et économiques au pays.
J’espère que « Inequality for all » sera présenté au Québec. Et s’il inspirait des artisans québécois à réaliser un tel exercice en français traitant de notre réalité ce serait encore mieux.
Comme le dit si justement Jacob Kornbluth, « Il n’est pas question de savoir si le gens doivent ou ne doivent pas s’enrichir mais bien si, et comment, tout le monde peut avoir accès à sa part du gâteau. Ce film n’est pas, et ne doit pas être vu, comme un plaidoyer « nous contre eux ». Cela ne donne rien. »
On a demandé à Robert Reich qui était à blâmer pour la crise de 2008. Voici sa réponse :
« Il n’y a personne à blâmer. Ni le gouvernement ni les entreprise. Nous avons le gouvernement que nous méritons. Il faut sortir du cul-de-sac dans lequel on s’enlise. Et se départir de notre attitude cynique qui ne nous amène que malheur. Il faut plutôt démystifier notre système économique, tenter de le comprendre, pour en reprendre le contrôle. » Voilà qui me plaît.
ME SUIVRE SUR TWITTER : diane_berard