BLOGUE. La possibilité que Bell puisse mettre la main sur Astral soulève une polémique soigneusement alimentée par des stratégies de communication agressives. Habituellement, les grandes transactions entre entreprises passionnent les firmes d'avocat et les courtiers en valeurs mobilières pour qui elles représentent une source de revenu importante, mais elles font rarement la manchette. Dans un domaine réglementé comme celui de la radio-télévision, comme toute transaction doit être approuvée par le CRTC, la tentation est grande pour les parties impliquées de tenter d'influencer l'organisme par des campagnes de communication intensives.
Le débat descend alors dans les médias (pour ne pas dire encore dans la rue) d'abord alimenté par les intérêts en présence qui cherchent à mobiliser des citoyens habituellement assez indifférents à ces débats. Une campagne intensive de communication qui inclut de la publicité, des relations de presse et la construction d'alliance entre des acteurs du secteur fait rage depuis plusieurs semaines et a réussi à obtenir près de 60000 signatures sur une pétition demandant de bloquer la transaction.
Du côté du regroupement "Dites non à Bell" où les principaux acteurs semblent être Québecor et Cogeco, on a réussi à mobiliser quelques associations de consommateurs qui permettent à cette campagne de dépasser la protection des intérêts des entreprises en jeu pour sembler ainsi viser un objectif noble, celui de nous protéger contre une prise en otage par Bell et des hausses fulgurantes de tarif !
Pourtant on en sait pas vraiment qui est derrière cette campagne et quels montants sont investis dans cette tentative d'influencer un décideur public. Je suis toujours assez sceptique quand je vois un groupe se lancer dans de grands moyens pour nous mobiliser temporairement et à des fins très claires. Comme disait l'autre, méfions-nous de ceux qui veulent notre bien et qui risquent de l'avoir. Et la pétition me semble un outil qui a perdu un peu de son efficacité lorsqu'il suffit d'un clic de souris pour mettre son nom. Quand on devait se déplacer pour recueillir physiquement des signatures, l'effort était plus évident et la valeur des signatures obtenues sans doute plus forte.
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Quant à Bell, devant cette campagne agressive, elle semble avoir choisi de faire le dos rond mais surtout de répondre devant le CRTC plutôt que de se bagarrer sur la scène publique. Les propositions faites hier par Bell en témoignent. Si le CRTC bloque la transaction, il devra le justifier et ne pourra s'appuyer sur les pressions exercées dans les médias, mais sur une analyse factuelle du dossier et des parts de marchés avec lesquelles chacun des joueurs se retouverait une fois la transaction conclue.
En guise de conclusion, il est intéressant de constater que cette guerre de titans se fait entre joueurs aux origines bien plus modestes : un opérateur de téléphone d'un côté, un imprimeur et une entreprise de cablo-distribution de l'autre. L'univers des médias a bien changé !