Donner en connaissance de cause


Édition du 05 Mai 2018

Donner en connaissance de cause


Édition du 05 Mai 2018

Chez ­Manuvie, 746 employés du ­Québec ont fait du bénévolat dans leur collectivité, l’an dernier. Au total, ils ont ainsi consacré plus de 7042 heures.

À une période où les OBNL se tournent de plus en plus vers le privé pour les soutenir dans leur mission, la pression est forte sur les entreprises pour donner davantage. Grâce aux témoignages d'experts et à un travail de journalisme de données approfondi, Les Affaires vous plonge dans les coulisses du don des entreprises.

Les dons des entreprises canadiennes en 2011 - les chiffres les plus récents de Statistique Canada - ont atteint 9,9 milliards de dollars. C'est trois fois les ventes annuelles de la SAQ l'an dernier. Comment les firmes choisissent-elles à qui donner tout cet argent ? Sont-elles seulement mues par la vertu ou fixent-elles aussi leur attention sur d'autres considérations ?

« Dans l'ensemble, ce sont des dons intéressés choisis généralement par les entreprises pour soutenir un élément ou un autre de leur stratégie », explique Daniel Asselin. Il en sait quelque chose. Il est le président d'Épisode, une firme montréalaise d'experts-conseils en philanthropie qui accompagne les fondations, organismes et entreprises dans leurs activités d'investissement philanthropique et communautaire. En décembre dernier, il a organisé un groupe de discussion avec 20 entreprises pour comprendre précisément ce qui motive leurs choix de soutenir une cause plutôt qu'une autre.

M. Asselin explique que les entreprises, parfois bombardées par des centaines de demandes de dons, n'ont xaujourd'hui pas le choix de se doter de critères de sélection. Elles ne peuvent pas dire oui à tout le monde. Elles favorisent donc le plus souvent des causes liées à leur mission, produit ou clientèle. Une entreprise qui vend des lunettes sera ainsi tentée d'encourager une fondation liée aux personnes âgées, par exemple, alors qu'une firme qui vend des couches sera plutôt attirée vers une cause liée aux jeunes parents.

Cela est d'autant plus vrai maintenant que la mode est au don non pas d'argent, mais de produits, d'expertise et de services. Plutôt que de donner un chèque, une épicerie, par exemple, sera aujourd'hui portée à fournir une aide alimentaire avec ses propres produits. Une entreprise de comptabilité pourrait, de la même façon, aider un petit organisme de bienfaisance à mettre de l'ordre dans ses chiffres.

Une mission motivante

Dans un contexte où les dons d'expertise deviennent populaires, les entreprises choisissent aussi leurs causes, de sorte à pouvoir se servir de leurs efforts philanthropiques pour faire du renforcement d'équipe (team building). De plus en plus, la valeur de l'implication sociale d'une entreprise est importante aux yeux des employés, qui veulent travailler d'abord pour une société socialement responsable. C'est même parfois un atout pour le recrutement.

Chez Manuvie, par exemple, 746 employés du Québec ont fait du bénévolat dans leur collectivité, l'an dernier. Au total, ils ont ainsi consacré plus de 7 042 heures. « Quand nos employés veulent faire du bénévolat, on leur laisse une journée payée. Nous avons même une plateforme informatique pour gérer ces efforts. Ça augmente l'engagement des employés, et ça soutient notre raison d'être : le bien-être des Québécois », dit Richard Payette, le président et chef de la direction chez Manuvie.

Dis-moi à qui tu donnes...

Dans les plus petites entreprises, les causes sont toutefois souvent plus locales, et les décisions, moins structurées, ressources obligent. Plutôt que d'être prises en comité, les décisions retombent souvent dans les mains du président propriétaire et de son entourage. « Dans une entreprise familiale, ou même une plus grande firme dans laquelle le fondateur est toujours aux rênes, celui-ci peut souvent décider d'appuyer une cause en raison d'expériences ou de sensibilités personnelles, comme le sport, le suicide ou la persévérance scolaire », dit Marc-André Saint-Onge, le président du conseil d'administration de l'Association des professionnels en gestion philanthropique.

Dans les plus grandes entreprises, les enjeux d'image, de perception, de communication et de marketing sont d'une grande importance.

Dans un livre à paraître sur la transformation de Centraide, les auteurs Taïeb Hafsi et Saouré Kouamé, associés au HEC, écrivent que « les chercheurs démontrent aujourd'hui que les entreprises dont la réputation sociale est meilleure, bénéficient d'évaluations plus positives auprès des consommateurs ».

Les entreprises veulent donc non seulement donner, expliquent-ils, mais elles veulent aussi que leurs efforts soient apparents. Elles désirent que leurs efforts soutiennent leur fonctionnement et leurs actions. Plus de visibilité veut cependant dire que ce sont les causes les plus « sexy » qui reçoivent le plus d'attention.

Naturellement, peu de sociétés parlent ainsi de leurs efforts en public. Paraître trop organisé ou structuré enlève à leur visage humain. Laisser savoir que leur don n'est pas uniquement charitable, mais aussi aligné sur des objectifs stratégiques, nuit à l'effet « wow ». M. Asselin, d'Épisode, note que les entreprises ne veulent pas envoyer le message qu'elles vont chercher du capital de sympathie.

« Personnellement, ça ne me dérange pas que les entreprises choisissent une cause plutôt qu'une autre en fonction de leur positionnement, ou de ce qui est plus payant pour eux. Au final, tout le monde est gagnant. »

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