Les pharmaciens propriétaires s'adaptent aux changements

Publié le 17/11/2012 à 00:00

Les pharmaciens propriétaires s'adaptent aux changements

Publié le 17/11/2012 à 00:00

Par Les Affaires

Les pharmaciens propriétaires du Québec voient d’un œil inquiet l’arrivée dans la province, l’automne prochain, de Target, la chaîne américaine de grandes surfaces qui vend de tout, y compris des médicaments.

« Il reste de la place en région, mais le marché est en passe d’être saturé dans les grandes villes », constate JoAnne Labrecque, professeure agrégée en commerce de détail à HEC Montréal.

Concurrence féroce, marges compressées, charges qui s’alourdissent : les défis sont déjà nombreux pour les 1 900 pharmaciens propriétaires du Québec, qui doivent s’adapter sans cesse à l’évolution de leur industrie pour faire croître leurs résultats.

Dans ce contexte très concurrentiel, et au moment où les pharmacies vont devoir s’adapter aux mesures prévues par la loi 41, comme un élargissement du rôle des pharmaciens, tout nouvel acteur est redouté. D’autant plus quand il est de la taille des Walmart et Target. « Il faut se préparer à cette nouvelle concurrence, car on fait face à des machines énormes », estime Albert Falardeau, président de Familiprix.

Aiguillonnée, Familiprix va se lancer dans la rénovation de plusieurs de ses succursales. La chaîne Jean Coutu a quant à elle annoncé qu’elle allait être encore plus rigoureuse sur l’approvisionnement de ses magasins pour rester dans la course.

La proximité, un avantage

L’atout des pharmacies communautaires, qui servent directement les consommateurs, reste le service individualisé. « Notre concept de proximité a toujours sa place. On ne se voit pas menacés », assure François J. Coutu.

Les personnes âgées – une population en croissance – ont tendance à préférer leur pharmacie de quartier, dont elles connaissent les employés et qui sont faciles d’accès, aux grandes surfaces plus anonymes.

La concurrence de Target ajoute néanmoins un sujet de préoccupation à une liste déjà longue. Car, si le marché des pharmacies au Québec se porte bien, les rendements augmentent moins vite qu’avant.

« Le chiffre d’affaires des pharmacies communautaires est en croissance, mais ce taux a beaucoup diminué », constate Daniel Larouche, président de Larouche Consultant et conseiller de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires.

Selon l’expert, la marge brute des officines est passée de 50 % dans les années 1970 à 25 % aujourd’hui. La chaîne Jean Coutu a quant à elle accusé une baisse de 22,9 % de ses profits au deuxième trimestre 2012.

« Le monde de la pharmacie reste prospère, mais ce n’est pas facile », reconnaît Vincent Forcier, directeur aux affaires publiques de l’AQPP. Les pharmaciens propriétaires sont sans cesse tenus de s’adapter à de nouvelles normes et de nouveaux tarifs. « Ils savent absorber la pression. Ils ont toujours dû le faire », rappelle Daniel Larouche.

Les charges augmentent

Cette capacité à s’adapter permet aux pharmaciens propriétaires de continuer à bien vivre de leur activité : leur revenu annuel s’échelonne de 80 000 à 120 000 $ par année et peut être bien supérieur pour les propriétaires de plusieurs pharmacies à grande surface.

La croissance des volumes de médicaments vendus (+ 5 % par an), les gains en efficacité dus aux investissements dans les nouvelles technologies, l’agrandissement des pharmacies et l’allongement des heures d’ouverture sont des facteurs qui contribuent à augmenter régulièrement le chiffre d’affaires des pharmacies.

Revers de la médaille : les charges sont en hausse et les marges se réduisent. Au bout du compte, il ne reste que 15 à 20 % de profits nets sur la vente d’un médicament, selon l’AQPP.

Le premier poste de dépenses demeure la rémunération des employés. Le salaire des pharmaciens salariés a bondi de 22,1 % depuis 2007, celui des pharmaciens remplaçants, de 39,2 % et celui des assistants techniques de pharmacie, de 18 %.

Les ristournes plafonnent

Parallèlement, les allocations professionnelles – aussi appelées ristournes – ont été plafonnées à 15 % en avril 2011 par le gouvernement provincial, alors qu’elles atteignaient généralement 25 % auparavant. « L’Ontario parle d’une nouvelle baisse. Le Québec va sûrement suivre », redoute Albert Falardeau.

Le gouvernement provincial a pour sa part décrété une baisse du prix du médicament générique, qui est passé de 50 % en 2010 à 25 % du prix de l’original en avril. Cette mesure a coûté 9 M$ à Familiprix, selon son président.

Plusieurs ajustements sont donc à prévoir dans l’industrie. La structure de rémunération des pharmaciens est au coeur des enjeux. « Le modèle actuel date des années 1970. Il ne reflète plus la réalité d’aujourd’hui. À l’avenir, la rémunération du pharmacien ne pourra plus être seulement liée à la distribution de médicaments. Elle devra aussi tenir compte des services professionnels, qu’il offre souvent gratuitement, et des investissements qu’il consent », note Jean Thiffault.

Malgré tout, l’augmentation régulière des volumes de médicaments vendus, le vieillissement de la population et l’arrivée de nouveaux médicaments plus coûteux issus des biotechnologies créent des occasions d’affaires. Les pharmaciens qui sauront s’adapter ont donc de beaux jours devant eux.

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