6 obstacles au libre-échange avec l'Europe

Offert par Les Affaires


Édition du 23 Septembre 2017

6 obstacles au libre-échange avec l'Europe

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Édition du 23 Septembre 2017

Par François Normand

[Photo : 123RF]

Vous exportez ou vous comptez exporter dans l'Union européenne (UE)? Malgré le libre-échange, les entreprises canadiennes feront encore face à plusieurs obstacles pour vendre leurs biens et leurs services en Europe.

L'Accord économique et commercial global(AECG) entre le Canada et l'UE est entré en vigueur le 21 septembre. De nombreuses entraves au commerce seront supprimées, dont la quasi- totalité des tarifs douaniers sur les produits non agricoles, souligne Exportation et développement Canada(EDC) dans une analyse récente.

Par contre, plusieurs obstacles resteront en place. En entretien avec Les Affaires, Christian Sivière, fondateur et président de Solimpex, un spécialiste en logistique et en commerce international, explique quels sont les principaux éléments à surveiller pour les exportateurs.

1 Les tarifs

Dès le 21 septembre, 98,4 % des tarifs sur les marchandises exportées dans l'UE seront abolis. Et d'ici 2024, cette proportion augmentera légèrement, à 98,8 %. Cela dit, certains produits continueront d'être soumis à des tarifs. Sont-ce les vôtres ?

Pour le savoir, il faut d'abord repérer le code SH du bien ou de la marchandise, selon Christian Sivière. Vous pouvez le trouver en consultant le site de Postes Canada. Une fois le code en main, vous pourrez vérifier si vous devez payer ou non un tarif douanier, et ce, à l'aide du site Info-Tarif Canada.

2 La réglementation

Les différentes réglementations dans un marché peuvent représenter des barrières non tarifaires. Dans l'Union européenne, la plus importante est le fameux marquage CE. Il doit être apposé sur tous les produits vendus sur le marché européen. Ce marquage certifie qu'un produit - fabriqué en Europe ou ailleurs - est conforme aux règles de l'UE.

Les exigences concernant le CE varient toutefois d'un produit à un autre, précise Christian Sivière. «Ces exigences sont par exemple plus grandes dans le domaine médical et dans le secteur des jouets», dit-il.

L'AECG ne soustrait pas les entreprises canadiennes à cette réglementation. Par contre, il permet désormais d'obtenir le marquage CE au Canada. Nul besoin d'aller en Europe comme c'était le cas auparavant, ce qui représentait du temps et de l'argent, surtout pour les PME.

Des organisations canadiennes seront bientôt accréditées pour founir ce marquage dans les principales villes du pays, selon M. Sivière.

3 Les seuils des contrats gouvernementaux

Le marché des contrats gouvernementaux (ou de l'approvisionnement public) de l'UE est le plus vaste du monde. Il est évalué à 3 300 milliards de dollars par année (incluant le Royaume-Uni), soit deux fois la taille du PIB canadien, selon le ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation du Québec.

Ce marché inclut les principales institutions de l'UE, les gouvernements des 28 États membres (et du Royaume-Uni) et des milliers de gouvernements régionaux et locaux. Aussi vastes soient-ils, les marchés publics européens ne sont pas totalement ouverts aux entreprises canadiennes. Il y a des seuils sous lesquels elles ne peuvent pas soumissionner, précise Christian Sivière.

Par exemple, dans les services publics (eau, électricité, aéroports, ports, transport urbain), les exportateurs peuvent uniquement soumissionner sur des appels d'offres quand la valeur des achats est supérieure à 418 000 euros pour les biens et les services, et à 5,2 millions d'euros dans la construction.

4 Les quotas

Malgré le libre-échange, les quotas sur certains produits resteront en place pour les exportateurs canadiens en Europe. L'industrie porcine en est un bel exemple, souligne Christian Sivière. Le quota canadien dans l'UE passera de 6 000 à 75 000 tonnes de porc par année. Ainsi, quand les producteurs auront atteint cette limite, ils ne pourront plus vendre leur viande de porc en Europe, même s'il y a toujours une demande pour celle-ci. L'enjeu est de taille pour le Québec, car l'industrie porcine du pays est concentrée dans cette province.

Le quota canadien de boeuf sur le marché européen augmentera aussi, passant de 15 000 à 65 000 tonnes par année. Au Canada, l'industrie bovine est concentrée dans l'Ouest.

5 La taxe sur la valeur ajoutée

Si l'AECG supprime la plupart des tarifs douaniers, il n'élimine pas la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans l'UE, dont le niveau varie d'un pays à un autre. Plusieurs organisations européennes donnent de l'information à ce sujet, dont la Commission européenne. Dans la plupart des cas, les exportateurs canadiens doivent payer la TVA. Par exemple, si votre contrat d'exportation avec votre client européen a un incoterm DDP (Delivered Duty Paid), vous devrez payer cette taxe, selon Christian Sivière.

Cet incoterm précise que l'exportateur doit assumer tous les coûts de livraison (logistique, taxes, etc.) d'une marchandise. «Cette approche coûte plus cher, mais c'est un avantage concurrentiel», dit M. Sivière.

6 Les règles d'origine

Les règles d'origine sont au coeur de l'AECG, comme de tous les accords de libre-échange. Pour les entreprises canadiennes, elles déterminent si le produit que vous exportez ou que vous voulez exporter en Europe a été fabriqué au Canada. Ce processus est compliqué, car des entreprises importent souvent des matières premières ou des composants.

L'accord avec l'UE exige un seuil moyen de 50 %. Cela signifie qu'au moins 50 % de la valeur des produits canadiens exportés dans l'UE doit avoir été fabriquée ici afin de profiter de l'abolition des tarifs.

«Les exportateurs doivent donc toujours bien documenter leur approvisionnement et leur processus de production», dit Christian Sivière.

Les règles d'origine avec l'UE sont moins exigentes que celles de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), qui imposent actuellement un seuil minimal de 60 %. Par exemple, pour les pièces automobiles, le pourcentage d'origine canadienne à respecter dans l'AECG est de 50 %, comparativement à 62,5 % dans l'ALÉNA.

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