L'aluminium canadien peine à trouver d'autres marchés

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Octobre 2018

L'aluminium canadien peine à trouver d'autres marchés

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Édition du 20 Octobre 2018

Par Pierre Théroux

Pour le secteur de l’aluminium, le développement de produits de niche à très haute valeur ajoutée est une autre piste de solution. [Photo : Getty Images]

À l'instar de nombreuses industries québécoises, les entreprises du secteur de l'aluminium ont fait des États-Unis leur principal marché d'exportation. Les tarifs de 10 % imposés par le gouvernement américain, en juin dernier, pourraient toutefois les inciter à explorer davantage de nouveaux marchés.

Jean Simard a passé beaucoup de temps à Washington au cours des derniers mois. Le président et chef de la direction de l'Association de l'aluminium du Canada, qui représente les trois producteurs Alcoa, Alouette et Rio Tinto, y était encore au lendemain de l'annonce du nouvel Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC). Et pour cause : le marché américain accapare 84 % des exportations d'aluminium primaire produit au Canada, principalement au Québec.

«Nos relations d'affaires avec les États-Unis remontent à la Seconde Guerre mondiale. On fait partie de l'approvisionnement stratégique pour la défense américaine et notre aluminium profite aujourd'hui grandement aux industries américaines de l'automobile, de l'aéronautique et de la construction», souligne M. Simard.

Cependant, contrairement aux différentes crises sur le bois d'oeuvre, par exemple, c'est la première fois que l'industrie de l'aluminium fait face à de telles mesures.

Si elle garde espoir que le conflit se règle, l'occasion est belle de diversifier ses marchés, reconnaît M. Simard. Toutefois, «ce n'est pas aussi simple. Le marché américain est très robuste et nous sommes dans des chaînes d'approvisionnement totalement intégrées. On ne développe pas de nouveaux marchés du jour au lendemain», explique-t-il.

L'Europe : oui, mais...

Malgré l'Accord économique et commercial global avec l'Union européenne, le Canada arrive difficilement à saisir les occasions offertes par ce vaste marché qui imposait auparavant des taxes allant jusqu'à 10 % sur les produits d'aluminium canadiens. «C'est un marché intéressant et cette entente nous ouvre certainement des portes. Mais compte tenu de la situation actuelle avec les États-Unis, on ne peut pas en profiter», constate M. Simard.

L'Europe est en effet elle-même forcée de mettre en place des mesures de protection pour éviter que la production qui était normalement destinée aux marchés américains ne déferle sur son continent, explique M. Simard.

Le secteur québécois de la transformation, dont les trois quarts des exportations prennent le chemin des États-Unis, lorgne aussi le marché européen. Avant l'accord entre le Canada et l'Europe, «les taxes et les coûts de transport étaient un frein au développement de ce marché», dit Marie Lapointe, PDG d'AluQuébec, l'organisme qui soutient l'industrie québécoise de la transformation d'aluminium.

Début octobre, certaines d'entre elles se sont rendues en Allemagne afin de participer à une mission commerciale au salon Aluminium Düsseldorf 2018. Organisé tous les deux ans, il s'agit du plus important événement au monde pour cette industrie. Il regroupe des transformateurs de produits finis et semi-finis, mais aussi des fabricants d'équipements pour la production, le traitement et l'affinage de produits faits d'aluminium.

L'Allemagne, où le concept de l'usine 4.0 est bien implanté, est justement la démonstration que les «entreprises d'ici qui veulent développer le marché européen devront améliorer leur productivité et s'automatiser davantage», note Mme Lapointe. Car, ajoute-t-elle, le marché européen présente assurément un potentiel de développement. «L'Allemagne est un grand fournisseur de produits d'aluminium, mais elle ne suffit pas à la demande», précise-t-elle.

Par ailleurs, la future entrée en vigueur de l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, qui doit améliorer l'accès à certains marchés asiatiques, comme le Japon, la Malaisie, Singapour et le Vietnam, n'est pas non plus la solution aux maux de l'industrie. «L'Asie est déjà grandement servie par la Chine», fait valoir M. Simard.

Produits écologiques et à valeur ajoutée

Pour le secteur de l'aluminium, le développement de produits de niche à très haute valeur ajoutée est une autre piste de solution. «Le Québec développe déjà des alliages de spécialité pour l'industrie aérospatiale. Ce sont de moins gros volumes que ceux des produits pour l'industrie automobile, mais les revenus à la tonne sont plus importants», indique M. Simard.

Ce dernier rappelle aussi que les géants Alcoa, Rio Tinto et Apple se sont associés en mai dernier pour créer Elysis, une coentreprise qui vise à développer et à commercialiser un procédé d'électrolyse de l'aluminium qui élimine les émissions directes de gaz à effet de serre dégagé par le procédé d'électrolyse classique de fusion.

L'aluminium est un matériau fondamental qui entre dans la composition d'une multitude de produits parmi les plus populaires d'Apple. Encore là, «ce sont de petits volumes, mais qui se vendent à des prix très intéressants», souligne M. Simard.

L'industrie mise d'ailleurs sur la production d'un «aluminium vert» pour continuer à se démarquer et à développer de nouveaux marchés. En avril dernier, Rio Tinto devenait la première entreprise au monde à recevoir la certification Aluminium Stewardship Initiative (ASI), en reconnaissance de ses pratiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) tout au long du cycle de production, d'utilisation et de recyclage.

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