«On souhaite que les immigrants ne fassent pas que passer»

Publié le 25/05/2013 à 00:00, mis à jour le 04/06/2013 à 14:36

«On souhaite que les immigrants ne fassent pas que passer»

Publié le 25/05/2013 à 00:00, mis à jour le 04/06/2013 à 14:36

Le Québec commence à manquer de travailleurs spécialisés. De là son intérêt croissant pour le renfort venu d'ailleurs. Traditionnellement, les arrivants se sont très majoritairement installés dans l'agglomération de Montréal. Or, les régions sont elles-mêmes recherchées, et la décentralisation de l'immigration devient un enjeu. Nous en avons discuté avec la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Diane De Courcy.

Les Affaires - De plus en plus de voix se font entendre quant à la nécessité de recruter à l'étranger des gens dont les compétences sont recherchées au Québec. Souscrivez-vous à ce principe ?

DIANE DE COURCY - J'y souscris, avec une certaine vigilance. Il faut que ces démarches soient bien encadrées et fondées sur des besoins réels pour éviter les abus. Mais ces besoins sont grands dans toutes les 17 régions administratives du Québec. Prenez celle de Chaudière-Appalaches, avec un taux de chômage d'environ 5 %, ce qui correspond pratiquement au plein emploi : en raison des départs à la retraite et de la demande croissante des entreprises, il va falloir pourvoir 40 000 postes ! Il est donc légitime de recruter à l'international, mais on souhaiterait que les nouveaux arrivants ne fassent pas que passer, qu'ils s'installent ici de façon permanente. C'est dans l'intérêt du Québec de pouvoir compter sur ces cerveaux tout en veillant à la régionalisation de l'immigration. Par ailleurs, on ne doit pas négliger les travailleurs qui sont déjà ici et qui pourraient eux aussi arriver en renfort, dans la mesure où ils reçoivent la formation nécessaire.

L.A. - Comment devrait-on s'y prendre pour que ce recrutement international se déroule bien ? Qui devrait piloter les démarches ?

D.D.C. - Le modèle que nous sommes en train de développer avec les «Journées Québec», où employeurs et candidats se rencontrent, me paraît probant. Donc, ce pourrait être le ministère, des centres locaux de développement, des organismes qui s'occupent d'emploi, des municipalités... Si elles le font par elles-mêmes, les entreprises risquent de dépenser bien plus par rapport à ce qu'elles investiraient avec nous. Et les PME ne disposent pas toujours de moyens suffisants pour partir en tournée à l'étranger.

Nous venons de connaître du succès avec notre récente mission à Barcelone, et nous répétons l'expérience à Paris et Bruxelles en juin. Ces tournées sont très utiles, mais il faudrait aussi travailler en amont en employant les technologies de l'information : on devrait pouvoir révéler à distance les besoins du Québec, son caractère et ses charmes. Je vais bientôt annoncer à cet effet des mesures qui pourraient permettre aux candidats immigrants d'effectuer en ligne les démarches et de décrocher leur emploi avant même de partir.

L.A. - Il devient plus difficile de puiser dans le bassin des pays francophones. Conviendrait-il de regarder plus loin ?

D.D.C. - Il faut nécessairement aller plus loin. De toute façon, pour en arriver à un «bien vivre ensemble», mieux vaut diversifier l'immigration, mais on veut que les gens parlent français. Sinon, le poids devient trop important sur la société québécoise. Au besoin, on peut y travailler en aval, une fois qu'ils sont rendus ici, mais c'est préférable d'agir en amont. Il existe notamment des alliances françaises partout dans le monde. Et nous avons 13 ententes, avec autant de pays, pour aider à perfectionner la connaissance du français et faire en sorte que les personnes concernées atteignent un niveau intermédiaire, c'est-à-dire qu'elles soient capables de rédiger une note de service compréhensible en français. C'est pour elles une manière d'être mieux préparées, ce qui accélère les démarches pour qu'elles soient admises plus rapidement.

L.A. - Ne devrait-on pas consacrer aujourd'hui davantage d'efforts à bien intégrer les immigrants?

D.D.C. - Des organismes comme Carrefour immigration et d'autres groupes communautaires s'y emploient, et travaillent en collaboration avec les entreprises. Mais il faut consolider ces réseaux. J'annoncerai d'ici juillet des ententes à cet égard avec l'ensemble des conférences régionales des élus. L'objectif est de solidifier les organismes communautaires et de permettre à des employeurs de se regrouper pour faciliter cette intégration, bien au-delà de la seule région de Montréal.

Une expérience intéressante est déjà en cours auprès des travailleurs dans le milieu de l'agriculture.

Mais il faut bien comprendre le choc que vivent ces gens, souvent confrontés pour la première fois à la neige, parfois laissés à eux-mêmes une fois arrivés ici. Je note cependant que les entreprises qui font appel à la main-d'oeuvre immigrante sont attentionnées. Par exemple, elles organisent des activités communautaires et tentent de briser l'isolement des conjoints.

L.A. - Les opinions sont partagées quant aux avantages que peut retirer le Québec en ouvrant ses portes aux immigrants. Quelle est la vôtre ?

D.D.C. - Ce n'est pas la solution ultime aux problèmes qu'affronte le Québec, notamment au regard de cette pénurie de travailleurs qu'on appréhende, mais c'est certainement un élément important de l'équation. En fait, il nous faut une solution combinée : on doit miser à la fois sur l'immigration et sur l'amélioration des compétences des gens déjà en place, de manière à maintenir une belle prospérité et même à l'augmenter.

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