« La correction rend Kraft Heinz attrayant »


Édition du 28 Juillet 2018

« La correction rend Kraft Heinz attrayant »


Édition du 28 Juillet 2018

Par Stéphane Rolland

Daniel ­Chartier est gestionnaire de portefeuille de l’Équipe ­Chartier, de ­Valeurs mobilières ­Desjardins, à ­Montréal, qui gère un actif d’environ 300 M$. Comptable de formation, il œuvre dans le secteur depuis 1987.

Stéphane Rolland - Les inquiétudes qui circulent sur la pérennité du marché haussier vous ont-elles incité à ajuster vos placements ?

Daniel Chartier - Nous ne voulons pas que nos clients ne réagissent qu'aux manchettes des journaux. Ce n'est pas le moment de prendre de grandes décisions radicales, du genre : « Je vends toutes mes actions ». Par contre, nous sommes sensibles au désir de certains clients. Si le client est inquiet, nous allons l'accompagner et lui faire prendre quelque profit. Réduire de 10 % sa pondération en actions est raisonnable. On ne le fera jamais dans un grand basculement. Pour nos clients qui sont à l'aise avec le contexte boursier actuel, nous n'avons pas bougé significativement.

S.R. - Vous êtes donc optimiste, mais vous vous ajustez à vos clients.

D.C. - Je dirais plutôt que je suis neutre. Il y a des risques importants, mais il faut également souligner les points positifs avant de réagir. Le marché est presque au plein emploi en Amérique du Nord et il s'améliore en Europe. La croissance économique est régulière et l'inflation demeure contenue. Ça contraste avec les épisodes de fortes croissances et de reculs des dernières décennies. Les résultats des sociétés sont bons et les bilans sont généralement sains, bien que certaines entreprises aient profité des faibles taux pour s'endetter davantage. Les multiples ne sont pas en territoire d'aubaine, mais ce n'est pas la grande spéculation non plus.

S.R. - Quels sont les risques que vous cernez ?

D.C. - La longue durée du marché haussier est en elle-même un risque. En soi, ce n'est pas nécessairement un présage de la fin du cycle, mais ça incite à une certaine prudence. Le protectionnisme ambiant est également une source d'inquiétudes. Les taux d'intérêt, pour leur part, sont à surveiller. Pour l'instant, les banques centrales normalisent lentement leurs taux, mais une hausse plus rapide des taux ou de l'inflation représenterait un risque. Il faut rester prudent devant les embellies en Bourse. Je pense au secteur technologique et au créneau du cannabis.

S.R. - Vous avez une approche défensive et aimez les titres à dividendes. Comment vous adaptez-vous au contexte de hausse des taux d'intérêt ?

D.C. - Nous essayons de trouver des titres à dividendes axés sur l'activité économique afin de ne pas avoir trop de titres sensibles aux taux d'intérêt. Par exemple, WSP Global (WSP) ou TFI International (TFII) font partie de nos choix récents.

S.R. - Quelle société est sur votre écran radar ?

D.C. - Le titre de Kraft Heinz (KHC) est sous pression en raison de la stagnation de ses ventes. Les goûts des consommateurs changent et les nouvelles mères sont moins enthousiastes à l'idée d'acheter leurs produits que nos mères l'étaient. Le marché n'aime pas ça. Pour l'instant, la rentabilité vient de la gestion des coûts et des synergies, et non pas d'un engouement pour les produits. Il serait surprenant que la société reste les bras croisés devant les changements de goûts des consommateurs. Après la correction du titre, le prix de l'action et le dividende de 3,9 % rendent le risque plus faible. Sinon, la direction est crédible et la société a un bon bilan financier.

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