Square: une entrée en bourse sous très haute tension

Publié le 06/11/2015 à 16:56

Square: une entrée en bourse sous très haute tension

Publié le 06/11/2015 à 16:56

Par AFP

La société américaine de paiements mobiles Square a amputé sa valeur estimée d'environ un tiers en vue de son entrée en Bourse, un nouvel avertissement quant à la probable bulle des valorisations chez les "licornes", les plus grosses start-up non cotées.

Square, qui fournit aux commerçants de mini-lecteurs de cartes bancaires utilisables avec un smartphone ou une tablette et partage son patron-fondateur Jack Dorsey avec le réseau social Twitter, a fixé vendredi entre 11 et 13 dollars le prix auquel ses titres seront introduits à Wall Street, dans un projet actualisé.

Cela permettrait de lever jusqu'à 400 millions de dollars environ et donnerait à la société une valeur totale maximale de 4,2 milliards de dollars, loin des 6 milliards auxquels l'estimaient les investisseurs ayant participé à son dernier tour de table l'an dernier.

«Square espère descendre suffisamment bas pour avoir un pop», un net bond du cours lors du premier jour de cotation, «et si cela arrive ce sera encourageant. La valorisation de Square est inquiétante pourtant», estime Matthew Kennedy, analyste chez Renaissance Capital, un gestionnaire de fonds centrés sur les entrées en Bourse.

Square est en effet un membre en vue du club des «licornes», le surnom donné aux jeunes entreprises non cotées affichant une valorisation de plus d'un milliard de dollars.

L'explosion du nombre de ces entreprises, et les valorisations de plus en plus astronomiques affichées par leurs stars comme Uber (50 milliards) ou Airbnb (25 milliards), nourrissent toutefois les inquiétudes sur l'émergence d'une nouvelle bulle. Square est l'une des rares à tenter l'aventure en Bourse cette année, et sa performance sera donc d'autant plus surveillée.

Pertes et patron à mi-temps

Dans un marché des entrées en Bourse devenu plus difficile ces derniers mois, la décote acceptée par Square relève en partie de problèmes spécifiques à la société.

«Ils ont des pertes à plein temps et un directeur général à temps partiel», résume Sam Hamadeh, patron de la société de recherche spécialisée dans les entreprises non cotées PrivCo.

Pour lui, «c'est une entreprise qui a vraiment besoin de l'argent pour couvrir ses pertes», sans quoi il aurait probablement été mieux avisé de «prendre un patron à plein temps et entrer en Bourse au printemps» prochain.

Square tire ses revenus des commissions qu'elle encaisse sur chaque paiement, et leur croissance est élevée, mais avec des signes de ralentissement: elle est passée de 72% en 2013 à 54% l'an dernier, où Square affichait 850 millions de dollars de chiffre d'affaires, et à 49% sur les trois premiers trimestres de 2015.

Parallèlement, la perte nette se creuse, à 154 millions de dollars l'an dernier et déjà 132 millions sur neuf mois en 2015. Beaucoup d'observateurs se sont inquiétés en particulier de l'argent perdu par Square dans un partenariat avec la chaîne de cafés Starbucks.

Etre déficitaire n'était pas si rare parmi les entreprises technologiques entrées en Bourse ces dernières années, mais «les investisseurs donnent peut-être davantage de poids à la rentabilité maintenant», note Matthew Kennedy.

S'y ajoute le fait de devoir partager un patron avec Twitter, qui n'est pas particulièrement en forme et demande donc beaucoup d'attention. Jack Dorsey «doit redresser Twitter tout en gérant l'entrée en Bourse de Square, comment elle va utiliser l'argent et devenir rentable. Il a beaucoup de pain sur la planche, et il pourrait y avoir des inquiétudes» parmi les investisseurs, prévient l'analyste. 

Cage dorée

Les analystes voient toutefois aussi dans la décote acceptée par Square un signal que la flambée des valorisations a peut-être passé son pic.

De plus en plus de licornes risquent de devoir lever des capitaux «à des valorisations identiques, voire plus basses qu'aux tours de table précédents», ou les investisseurs réclameront «des clauses de protection», prédit Matthew Kennedy.

La situation pourrait devenir particulièrement inconfortable pour les plus en vue d'entre elles, qui «n'ont pas l'option d'entrer en Bourse» et sont «enfermées dans une cage dorée», prévient Sam Hamadeh.

«Il n'y a personne d'assez riche pour les acheter, ceux qui investissent dans les entrées en Bourse ne paieront pas cette valorisation, donc elles sont coincées», condamnées à continuer de se financer auprès d'investisseurs privés ou de devenir rentables au prix d'un ralentissement de leur croissance «fatal pour la valorisation», explique-t-il. «L'histoire ne finira pas bien pour un certain nombre d'entre elles.»

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