Pétrole: l'Arabie saoudite veut contrôler le marché, coûte que coûte

Publié le 27/01/2016 à 06:32

Pétrole: l'Arabie saoudite veut contrôler le marché, coûte que coûte

Publié le 27/01/2016 à 06:32

Par AFP

Photo: Shutterstock

Abandonnant son rôle traditionnel de régulation, l'Arabie saoudite, premier exportateur mondial de brut, est engagée avec détermination dans une rude bataille pour le contrôle d'un marché pétrolier particulièrement volatil.

La décision en novembre 2014 de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) --sous la pression de Ryad-- de ne pas réduire l'offre pour soutenir le marché en baisse a provoqué un effondrement des cours, tombés de 110 à 30 dollars le baril.

Le royaume saoudien a perdu ces deux dernières années 250 milliards de dollars et enregistré en 2015 un déficit budgétaire record de 98 milliards de dollars. D'autres pays pétroliers souffrent énormément.

La décision de l'OPEP visait à sortir du marché les producteurs à coût élevé, principalement les acteurs du schiste américain, et à faire pression sur le géant russe (non-OPEP), premier producteur mondial de brut, et sur l'Iran, membre du cartel, pour qu'ils réduisent leur production.

Quatorze mois plus tard, cette stratégie donne l'impression de vaciller: les prix sont trop bas, le marché est inondé et une guerre des prix fait rage.

«Les Saoudiens sont bien conscients que s'ils réduisent la production, l'impact ne sera pas fort sur les prix car ils seront remplacés par d'autres producteurs comme l'Iran, l'Irak ou la Russie», explique Jean-François Seznec, spécialiste qui enseigne à la Georgetown University.

«Les Saoudiens veulent que les producteurs souffrent suffisamment pour convenir d'une baisse concertée» de l'offre, dit-il à l'AFP.  

Au cours des dernières décennies, le royaume, deuxième producteur mondial de brut devant les États-Unis, a investi des dizaines de milliards de dollars pour porter sa capacité de production à 12,5 millions de barils par jour.

Il est le seul producteur à disposer d'une capacité de réserve, ce qui lui permet de relever ou de réduire la production et d'influencer le marché et les prix.

Le pays –dont le sous-sol recèle 268 milliards de barils de brut et 8500 milliards de m3 de gaz, respectivement les 2e et 5e réserves mondiales– produit son pétrole à moins de 10$US le baril, selon le cabinet de consultants privé Rystad Energy.

Défense de la part de marché

«L'objectif principal de l'Arabie saoudite est la stabilité du marché pétrolier et la défense de sa part de marché», souligne l'expert koweïtien Kamel al-Harami. «Le royaume ne pouvait pas laisser des producteurs à coût élevé le concurrencer sur ses propres marchés ».

Outre les bas coûts de production, l'Arabie saoudite et ses voisins du Golfe, membres de l'OPEP, conservent une grande marge de manoeuvre budgétaire pour résister à la chute des prix.

Selon le patron de Total Patrick Pouyanné, les Saoudiens ne veulent pas réduire leur production rapidement. «Ce n'est pas évident de vouloir couper sa production lorsque vous avez un coût plus bas que les autres et que, finalement, vous pouvez résister plus longtemps que les autres», a-t-il dit en marge du Forum de Davos.

Cependant, a-t-il ajouté, il y a aussi un «élément majeur» de «géopolitique» en 2015, l'accord international avec l'Iran qui modifie la donne au Moyen-Orient.

Ryad a d'autres leviers pour survivre pendant des années à des prix bas, selon le président d'Aramco Khaled Faleh. «Nous disposons de technologies qui nous permettent de maintenir notre faible coût», a-t-il déclaré lundi lors d'un symposium économique à Ryad. En outre, «l'investissement dans nos capacités de production de pétrole et de gaz n'a pas ralenti».

Dans une étude publiée cette semaine, la firme Jadwa Investment de Ryad souligne que le royaume est «bien outillé pour empêcher toute tentative d'empiéter sur sa part de marché».

Mais la décision saoudienne de garder les robinets ouverts suscite des critiques. Pour M. Harami, Ryad et l'OPEP ont fait un mauvais calcul car « le pétrole de schiste a prouvé qu'il résistait mieux que prévu ». 

La chute des prix du brut a certes conduit à une réduction de la production de schiste et d'autres produits à coûts élevés, mais ne les a pas sortis de la course.

Un diplomate occidental basé à Ryad note que l'Arabie suit, dans le domaine pétrolier, la même politique, plus offensive, lancée depuis un an par le nouveau roi Salmane. Il « défendra ses intérêts sur les plans interne et externe », que cela plaise ou non à l'étranger.

Selon M. Seznec, cette politique devrait commencer à porter à ses fruits: « il y aura bientôt un arrangement avec les producteurs non-Opep qui ne peuvent plus continuer à saigner ». 

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