L’action du télédiffuseur Corus Entertainment(Tor., CRJ.B,10,31$) a tellement baissé que Shaw Communications(Tor., SJR.B,27,50$) pourrait envisager de fermer le capital de son ex-filiale.

Une transaction en actions et au comptant s’élèverait à 2 milliards de dollars incluant la dette.

Cette spéculation a fait rebondir l’action de Corus, le propriétaire des chaînes Teletoon, YTV et Historia, de 6% depuis le creux annuel de 9,53$ qu’elle avait atteint le 24 novembre.

Les deux entreprises sont contrôlées par le même actionnaire, la famille Shaw de Calgary, qui avait choisi d’essaimer Corus en 1999, dans l'espoir que les deux entreprises soient mieux évaluées séparément.

Cette stratégie n’a pas fonctionné. l’action de Corus est au même point qu'en 1999, bien qu’elle ait fourni d’importants dividendes à ses actionnaires, dont la famille Shaw, depuis 16 ans.

Au cours actuel, le dividende de Corus procure un rendement de 11,4%.

Une offre potentielle de 18 à 20$ ?

Stephen Takacsy, de Gestion d’actifs Lester, qui a du flair pour les cibles d’acquisitions, croit qu’une offre de Shaw tombe sous le sens depuis longtemps.

«Dans le passé, on aurait espéré plus de 30$ par action, mais les temps ont changé. Maintenant, on estime que Corus vaut autour de 20$. Au cours actuel près de 10$, Corus est l’aubaine de l’année», dit le gestionnaire de Montréal, qui a acheté des actions sous 10$ le 25 novembre, afin de réduire son prix d’achat moyen.

La télé payante perd des abonnés aux diffuseurs web tels que Netflix. De plus, la télé à la carte imposée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) risque de faire perdre d’autres abonnés aux chaînes spécialisées de Corus.

M. Takacsy estime les économies d’une fusion entre Corus et Shaw Media à 50 millions de dollars, ce qui correspond aussi aux synergies estimées par Vince Valentini, de Valeurs mobilières TD, dans un rapport publié le 25 novembre, au moment où l’action de Corus s’échangeait 9,70$.

Ces synergies représentent 11% des dépenses d’exploitation de Corus. Les seules dépenses corporatives du diffuseur totalisent 22 millions de dollars, dit-il.

L’analyste place son cours-cible à 15$, une valeur mitoyenne entre une évaluation fondamentale et la possibilité d’une offre potentielle de 18$ par action.

«Des transactions récentes ont été réalisées à des multiples de 10 fois le bénéfice d’exploitation, alors que Corus s’échange à un multiple de 5 fois le sien», indique aussi M. Valentini.

Au prix de 18$ par action, la transaction ajouterait 11% aux flux de trésorerie et 14% au bénéfice par action de Shaw, calcule-t-il.

L’évaluation de Corus n’a jamais été aussi faible par rapport à celle de Shaw, dont l’action s'échange à près de huit fois son propre bénéfice d'exploitation.

Outre l’opportunisme financier d’un tel rachat pour Shaw, M. Valentini croit que les deux entreprises seraient stratégiquement gagnantes.

En ajoutant la chaîne télé généraliste Global de Shaw, Corus améliorerait son rapport de force dans ses négociations avec tous les télédistributeurs (câble et satellite) pour ses chaînes spécialisées.

En tant que câblodistributeur, Shaw est ele-même un important client pour les chaînes spécialisées de Corus.

Un troisième analyste, qui préfère taire son identité, juge aussi que l’union de Shaw et Corus serait logique, mais il doute de l’intérêt de la famille Shaw de s’engager dans cette voie.

Par contre, Tim Casey, de BMO Marchés des capitaux, estime qu’une telle transaction est improbable.

Il s’attend plutôt à ce que Corus utilise les 211 millions de dollars reçus de la vente à de BCE(Tor., BCE,57,10$) de ses chaînes de télé payante (Movie Central, Encore Avenue et HBO Canada) pour diminuer sa dette, et qu'elle réinvestisse dans l’achat de contenu pour ses chaînes télé pour les enfants, les femmes et la famille.

Le temps dira si MM. Takacsy et Valentini ont raison de miser sur le retour de Corus dans le giron de Shaw.