L'embellie du dollar canadien est-elle déjà terminée?

Publié le 20/01/2017 à 13:31

L'embellie du dollar canadien est-elle déjà terminée?

Publié le 20/01/2017 à 13:31

Par Jean Gagnon

Ce n’est pas ce que les économistes prévoyaient. Ni ce qu’espérait Stephen Poloz, le gouverneur de la Banque du Canada (BdC). Contre toute attente, le dollar canadien s’est soudainement apprécié en début d’année.

Depuis l’été, le dollar canadien suivait une tendance nettement baissière qui l’a mené jusqu’à 0,7375 $US cet automne. De là, une reprise en début d’année l’a poussé jusqu’à près de 0,77 $US cette semaine. C’est alors que Stephen Poloz est venu refroidir les ardeurs des cambistes mercredi, se disant déçu de la force du huard. Celui-ci n’aura-t-il connu qu’une embellie temporaire?

Deux facteurs expliquent la hausse du dollar canadien au cours des dernières semaines, explique Hendrix Vachon, économiste au Mouvement Desjardins et expert du marché des devises.

D’abord, le prix du pétrole. Le dollar canadien a commencé à bien se tenir lorsqu’il est devenu de plus en plus évident que les pays de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) allaient réussir à gérer les niveaux de production afin de faire augmenter le prix de l’or noir.

Mais surtout, le huard a été porté par de bonnes nouvelles économiques depuis le début de l’année. «De bons chiffres quant à la balance commerciale et l’emploi ont laissé croire qu’un resserrement monétaire au Canada pourrait se produire plus rapidement que prévu», dit Hendrix Vachon.

Mais cela ne semble pas vouloir s’avérer. Malgré de meilleures données économiques, la Banque du Canada continue d’exprimer une grande prudence envers les perspectives de l’économie canadienne. Même que le gouverneur Poloz a laissé entendre que la BdC n’écarte pas la possibilité d’adopter de nouvelles mesures de stimulation monétaires, souligne Krishen Rangasamy, économiste à la Financière Banque Nationale.

La corrélation s’estompera

Ce qui a également permis au dollar canadien de bien faire récemment, c’est la corrélation élevée entre les taux obligataires canadiens et américains. Les taux des obligations canadiennes ont suivi la tendance à la hausse des taux des obligations américaines au cours des derniers mois.

Cela n’est pas anormal compte tenu des liens étroits entre les deux économies. «Néanmoins, cela peut sembler étrange dans le contexte actuel où l’on ne retrouve pas, au Canada, les mêmes ingrédients soutenant les taux d’intérêt qu'aux États-Unis», dit Hendrix Vachon. L’économie et l’inflation devraient progresser plus rapidement aux États-Unis qu’au Canada. Le resserrement monétaire sera alors plus prononcé chez nos voisins du sud.

À moins d’un revirement de situation aux États-Unis, il apparait difficile de croire que les taux obligataires canadiens, particulièrement les taux de plus court terme comme celui de deux ans, resteront aussi corrélés aux taux américains, selon M. Vachon. «Une corrélation plus faible impliquerait un élargissement des écarts des taux avec les États-Unis, ce qui ferait déprécier le dollar canadien. Nous croyons qu’il pourrait retourner à près de 0,70$US d’ici la fin de l’année», dit-il.

Quant à la hausse du prix du pétrole, elle tire à sa fin, selon Hendrix Vachon. «Il pourra difficilement aller plus haut que 55 $», dit-il.

À la Financière Banque Nationale, on croit même que le prix du pétrole pourrait baisser au cours des prochains mois. Déjà on perçoit une tendance à hausser la production aux États-Unis maintenant que le prix s’est réinstallé au-dessus de 50 $. «Ainsi, malgré la politique de l’OPEP, l’excédent de l’offre de pétrole va persister, ce qui fera baisser les prix», dit Krishen Rangasamy.

Le facteur Trump

L’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche risque également de ne pas beaucoup aider le dollar canadien. Des mesures protectionnistes annoncées durant la campagne électorale ne peuvent que nuire à l’économie canadienne. La BdC admet ne pas avoir encore inclus d’hypothèses dans son scénario concernant des mesures protectionnistes à venir au sud de la frontière.

Une révision de l’Accord de libre-échange nord-américain et l’imposition de taxes à l’importation affecteront négativement le dollar canadien, selon M. Rangasamy. «À la Financière, on prévoit que le huard retraitera jusqu’à 0,73$US. Mais ce pourrait être pire si ces mesures protectionnistes s’avéraient», dit-il.

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