Osisko crie au secours

Publié le 17/03/2014 à 09:19

Osisko crie au secours

Publié le 17/03/2014 à 09:19

Le 11 mars 2014, la société Osisko tentait une ultime démarche pour mobiliser les acteurs québécois contre la tentative de prise de contrôle de leur société par Goldcorp.

C’est justement ce type d’offre d’achat « hostile » que cherchent à encadrer les recommandations du Groupe de travail sur la protection des entreprises québécoises ainsi que les nouvelles mesures proposées par l’Autorité des marchés financiers. Toutefois, ces bouées de sauvetage arriveront trop tard pour empêcher la prise de contrôle d’Osisko.

Le Gouvernement et le Parti québécois se sont engagés à changer la loi québécoise sur les sociétés par actions pour barrer la route aux offres d’achat non souhaités. Une telle mesure serait sans effet dans ce cas-ci puisqu’Osisko est une société de juridiction fédérale.

Manifestement, Goldcorp, profitant d’une faiblesse relative du prix de l’or, tente de s’approprier à bon prix une entreprise aux perspectives très positives à plus long terme.

En fait, les propositions de l’AMF donneraient au conseil d’administration l’autorité et la responsabilité de refuser une offre d’achat qui n’est pas dans l’intérêt à long terme de l’entreprise.

En raison de l’opposition de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (OSC), la proposition de l’AMF stagne, ne progresse pas, risque de passer aux oubliettes. Il pourra sembler à un observateur un tantinet cynique que l’OSC ne veut pas que la coopération et la coordination entre les commissions des valeurs provinciales fonctionne trop bien puisque cela risquerait de rendre caduques les arguments en faveur d’une commission nationale avec siège social à Toronto, bien sûr.

Quelles mesures ou démarches pourraient encore empêcher une prise de contrôle d’Osisko?

1. Les grands fonds institutionnels d’investissement pourraient se persuader ou être persuadés que le prix offert par Goldcorp est insuffisant, que le titre d’Osisko recèle un important potentiel d’appréciation future et qu’il convient donc d’accumuler une position importante dans ce titre. Si plusieurs fonds agissaient ainsi, leur position cumulative pourrait servir de rempart contre une prise de contrôle hostile. Toutefois, les marchés boursiers sont soumis au jeu des fonds d’arbitrage et de couverture et au calcul individuel de chaque fonds de placement : prendre le profit résultant de l’augmentation du prix en raison de l’offre d’achat, laisser aux autres le soin de bloquer la transaction et s’ils réussissent, racheter l’action au prix déprécié par l’échec de la transaction; évidemment, si beaucoup de fonds agissent ainsi…)

2. Les ressources naturelles étant de juridiction provinciale, le gouvernement du Québec ne devrait-il pas revendiquer un droit de regard sur toute transaction de fusion/acquisition de sociétés québécoises dans ce secteur? Les permis, autorisation environnementale, le niveau des redevances exigées constituent des domaines de responsabilité exclusive des provinces. Celles-ci accordent aux sociétés minières une licence d’exploitation assortie de conditions précises. Dans une situation de tentative de prise de contrôle qui n’est pas souhaitée par le conseil d’administration ni par le gouvernement du Québec, celui-ci devrait-il informer l’acquéreur potentiel de ses objections et de son intention de revoir certains des termes et conditions de l’exploitation minière.

De toute urgence, après l’élection québécoise, le Ministre des finances du Québec se doit de convaincre ses collègues des autres provinces du bien-fondé des propositions de l’AMF. Les prises de contrôle non souhaitées constituent un enjeu canadien.

Le Groupe d’étude sur les politiques en matière de concurrence créé par le gouvernement Harper recommandait déjà en juin 2008 que les commissions des valeurs mobilières modifient leurs règlements en matière de prise de contrôle pour les rapprocher des règles dans l’état du Delaware. C’est justement ce que les propositions de l’AMF cherchent à accomplir.

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Les opinions exprimées dans ce texte n’engagent que l’auteur.

 

À propos de ce blogue

Yvan Allaire, Ph. D. (MIT), MSRC, est président exécutif du conseil d'administration de l'Institut sur la gouvernance(IGOPP) et professeur émérite de stratégie à l’UQÀM. M. Allaire est le co-fondateur du Groupe SECOR, une grande société canadienne de conseils en stratégie (devenue en 2012 KPMG-Sécor) et de 1996 à 2001, il occupa le poste de vice-président exécutif de Bombardier. Il fut, de 2010 à 2014, membre et président du Global Agenda Council on the Role of Business – Forum économique mondial (World Economic Forum). Profeseur Allaire est auteur de plusieurs ouvrages et articles sur la stratégie d’entreprises et la gouvernance des sociétés publiques et privées.

Yvan Allaire

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