Un beau projet pour Montréal qui suscite beaucoup de questions


Édition du 30 Avril 2016

Un beau projet pour Montréal qui suscite beaucoup de questions


Édition du 30 Avril 2016

Il faut reconnaître que c'est là un projet emballant... pour la région de Montréal, empêtrée dans des bouchons de circulation à n'en plus finir. Et ce, à un moment où l'on cherche à réduire la pollution et rêve à rendre les transports plus fluides en réduisant l'omniprésence des voitures.

La Caisse de dépôt et placement du Québec a lancé, le 22 avril, le plus important chantier d'infrastructures de transport du Québec depuis la création du métro de Montréal. Elle propose un nouveau réseau de train léger sur rail, électrique, qui parcourra 67 kilomètres au fil de 24 stations aux allures futuristes, de la Rive-Sud de Montréal (Brossard) à la couronne nord (Deux-Montagnes), en passant par l'aéroport Montréal-Trudeau.

Mais cette initiative exceptionnelle de la Caisse de dépôt soulève des tonnes de questions, tant pour la métropole que pour le reste du Québec, de même qu'en ce qui concerne l'organisation elle-même.

Pour la métropole : c'est vrai qu'il faut enfin des liens plus rapides du sud au nord, et vers l'ouest. L'engorgement de la circulation est devenu néfaste. Le réseau routier n'a pas été conçu pour répondre, par exemple, à l'accroissement constant du nombre de camions.

Si les citoyens peuvent se laisser convaincre de choisir le transport en commun, plus efficace et abordable, tout le monde y gagnera.

Cependant, des quartiers entiers de Montréal restent mal desservis et ce projet ne leur offre rien. On peut même se demander si le prolongement de la ligne bleue du métro, vers le nord-est, ne risque pas d'en pâtir.

Oui, la Caisse prendra à son compte près des deux tiers de la facture prévue de 5,5 milliards de dollars, mais les autres ordres de gouvernement devront eux aussi puiser dans leurs poches. Leur restera-t-il quelques milliards pour financer les autres projets ? Se retrouvera-t-on, à Montréal, avec des «have» et des «have not» ?

En passant, merci à la commission Charbonneau ! Si vous habitez la région de Montréal, ou s'il vous arrive d'y circuler, vous savez que des mégachantiers sont déjà en cours. Pont Champlain, échangeur Turcot, gigantesques projets immobiliers... Et cet énorme chantier devrait se réaliser en trois ans, de 2017 à 2020 ?

Imaginez la pression, mais aussi l'aubaine, pour les firmes de génie et les grands entrepreneurs !

Tout ce beau monde sera démesurément sollicité. En principe, plus la demande est forte, plus la pression s'exerce sur les prix. Et il arrive, ici comme ailleurs, que les prévisions originales concernant les grands chantiers soient largement dépassées. Au moins, les travaux de la commission ont permis de mettre en place des garde-fous qui limitent ce gavage et l'explosion des factures aux dépens du trésor public, alimenté par les impôts et les taxes des contribuables.

Maintenant, que va-t-on en penser ailleurs au Québec ? Je devine un mélange de fierté et d'amertume.

Fierté, parce qu'on ne peut qu'être impressionné par ce projet qui positionnera Montréal comme un haut lieu nord-américain du transport urbain. On sait faire, au Québec, pourra-t-on dire, si tout fonctionne.

Amertume, parce que bien des régions de la province doivent composer avec une offre de transport collectif qui diminue sans cesse. Via Rail et Keolis ont sabré leurs dessertes. Dans l'Est du Québec ou en Haute-Mauricie, par exemple, on ne rêve pas d'un train électrique futuriste, on voudrait simplement pouvoir monter dans un autocar qui se fait malheureusement de plus en plus rare...

Ce n'est pas du ressort de la Caisse de dépôt. Mais la responsabilité des gouvernements, elle, demeure, alors qu'ils clament sur les grandes tribunes internationales leur engagement à réduire notre empreinte carbone. S'ils sont sincères, il leur faudra intervenir pour rétablir l'offre en région, qui pourrait également servir d'argument pour freiner la terrible tendance à la dévitalisation.

Qui construira les trains ?

On peut deviner que, à Québec, Régis Labeaume prend bonne note des intentions de la Caisse, lui qui doit améliorer au plus vite son offre de transport en commun dans une ville de plus en plus paralysée par les bouchons. Il détient un bon rapport de force. Mais encore une fois, les gouvernements devront assurer les prochaines interventions. Pas la Caisse.

Pourquoi ? Parce que celle-ci vient de s'engager dans un pari costaud. Son premier rôle n'est pas de travailler au bien public. Selon son mandat bicéphale, elle est tenue de chercher un rendement pour ses déposants tout en favorisant le développement économique du Québec.

Si tout va bien, ce mégachantier de transport urbain répondra à ces deux exigences. Mais il reste tellement de questions dans l'air. Par exemple, qui construira ces trains ? Bombardier, ou d'autres qui proposeront des soumissions plus avantageuses ? La Caisse comptera ses sous, et c'est sa responsabilité. Son président, Michael Sabia, l'a clairement indiqué.

En passant, vous rappelez-vous les commentaires désobligeants lors de sa nomination en 2009 ? Il parlait mal français, il connaissait peu la réalité québécoise, il incarnait la grande finance, il venait d'une grande entreprise (Bell)... En vérité, tant pour les rendements de la Caisse que pour son engagement dans l'économie, jusqu'à présent, lui et son équipe se sont plutôt bien débrouillés.

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