Tombez-vous amoureux avec vos titres?

Publié le 29/01/2016 à 16:05

Tombez-vous amoureux avec vos titres?

Publié le 29/01/2016 à 16:05

(Photo: Shutterstock)

Je le dis bien ouvertement : au volant, je respecte les limites de vitesse, j’ai même tendance à rouler en deçà des limites permises. C’est dans ma nature. Ce n’est pas tant pour des considérations environnementales (ma voiture est une hybride) ou par désir d’admirer le paysage, mais davantage en raison des probabilités et d’une certaine aversion aux risques de la conduite. Je constate d’ailleurs que cette aversion au risque a considérablement augmenté depuis que j’ai des enfants. C’est connu, les distances de freinage d’un véhicule sont décuplées par la vitesse.

Bien se connaître est un excellent point de départ pour réussir en Bourse à long terme. Je tiens en exemple la période de grande volatilité que nous traversons qui fait ressortir certains biais cognitifs que je qualifierais de «classiques» chez plusieurs investisseurs. Ces biais cognitifs sont une cause de mauvaises décisions d’investissement qui affectent la performance à long terme d’un portefeuille.

Prenons, par exemple, un investisseur, M. Espoir, qui, dans l’espoir d’un éventuel rebond, s’accroche à un titre qui a perdu beaucoup de valeur depuis qu’il l’a acheté. Il a investi initialement 20 000$ dans une société nommée Torpille et le titre vaut maintenant 5 000$. Son raisonnement est le suivant: (1) «le titre peut difficilement baisser davantage, car tout tend à revenir à la moyenne»; ou pire (2), «à ce niveau, je n’ai plus grand-chose à perdre». J’observe ce phénomène couramment chez des investisseurs qui viennent nous voir pour des évaluations de portefeuille, surtout après l’année difficile que viennent de connaître les marchés.

On pourrait appeler ce biais cognitif «la peur du regret». Les investisseurs ont cette crainte de disposer d’un titre pour le voir s’apprécier fortement par la suite. Je ne peux m’empêcher de penser aux actionnaires de Bombardier (Tor., BBD.B) qui ont sûrement vécu ce phénomène au cours des dernières années. Qu’en est-il de ceux qui ont encore aujourd’hui plusieurs titres du secteurs des ressources naturelles?

Il est primordial de constamment prendre du recul pour assurer une prise de décision rationnelle et réfléchie et éviter de développer un attachement émotif aux sociétés ou aux secteurs dans lesquels on investit.

Prenons un autre investisseur, M. Objectif, qui dispose de 5 000$ à investir dans une société. Il est attiré par le titre de Torpille qui a fortement corrigé en Bourse et s’échange à un creux historique. Il fait ses devoirs et analyse attentivement le titre et conclut qu’il a peut-être 10% de chance de doubler sa mise, voire même davantage, et environ une chance sur deux de perdre une grande part de son investissement. Le jeu n’en vaut pas la chandelle et il passe ainsi à un autre titre.

Inutile de spéculer sur le succès à long terme de M. Espoir et de M. Objectif puisque cette histoire est fictive. Mais investir en Bourse est un exercice probabiliste. Au final, faites abstraction de la valeur initiale d’un investissement (de son coût original). Il vaut mieux se retrouver avec 5 000$ en poche que de risquer de tout perdre.

L’investisseur se doit d’observer une discipline de vente et de n’avoir aucune difficulté à disposer à perte d’un titre qui ne respecte plus son scénario d’achat initial. Avant chaque décision, il doit répondre à une question bien simple : le capital investi dans cette société serait-il mieux investi dans une autre société?

À l’approche de la Saint-Valentin, soyez circonspects dans vos déclarations d’amour boursier!

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

À propos de ce blogue : Philippe Le Blanc est président et chef des placements chez COTE 100, une boutique de gestion de portefeuilles. Il est également éditeur de la Lettre financière COTE 100, publiée depuis 1988.

 

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