La crise, 10 ans plus tard

Publié le 14/09/2018 à 12:02

La crise, 10 ans plus tard

Publié le 14/09/2018 à 12:02

[Photo: Getty Images]

BLOGUE INVITÉ. Nous célébrons ces jours-ci le 10e anniversaire de la crise financière 2008-2009. Je ne sais pas pour vous, mais c’est un épisode boursier qui m’a marqué et que je ne suis pas près d’oublier. Je m’imagine dans 20 ans raconter les événements de cette crise à mes petits-enfants, un peu comme mes grands-parents m’ont raconté la Grande Dépression des années 30.

Les médias ont bien couvert cette commémoration de 10 ans et je ne vois pas ce que je pourrais bien ajouter à ce qui a été écrit. Je note toutefois que de nombreux observateurs soulignent que les marchés boursiers ont connu 10 années exceptionnelles depuis la crise financière, laissant entendre que cette situation est anormale et qu’une correction est à prévoir, voire imminente.

D’entrée de jeu, je ne fais pas de prévisions boursières. Tout ce que je sais est que les corrections boursières sont inévitables, imprévisibles et qu’elles font partie du parcours normal de la Bourse.

Cela dit, j’aimerais ajouter un constat à ce que les médias soulignent régulièrement: je suis d’avis que si les marchés ont si bien fait au cours des 10 dernières années, c’est en bonne partie parce que les 10 années précédentes avaient été particulièrement éprouvantes. Voyez par vous-même:

Je tire quelques constats de ce tableau.

D’une part, on peut voir que la décennie de 1999 à 2008 avait été particulièrement difficile pour les investisseurs. Il convient de préciser que 1999 représente à peu près le sommet des titres techno et que la décennie s’est terminée par la crise financière: d’un sommet à un creux. D’autre part, cette décennie chevauche quelques événements particulièrement traumatisants pour les investisseurs, dont, évidemment, l’éclatement de la bulle techno au début des années 2000, les attentats du 11 septembre 2001 et la crise financière de 2008-2009. Combien d’investisseurs n’ont pas su résister à cette série noire et ont tout simplement vendu leurs placements boursiers durant cette période? En somme, le marché américain a enregistré un rendement annuel composé de -1,4% au cours de la période alors que le marché canadien a obtenu 5,3% (les rendements affichés tiennent compte des dividendes).

D’autre part, il est vrai que la dernière décennie, de 2009 à aujourd’hui, a été faste avec un rendement annuel composé de 14,7% pour le S&P 500 . Mais on peut arguer que de tels rendements représentent ni plus ni moins un rattrapage des indices boursiers après une décennie de rendements médiocres.

En effet, si vous regardez les rendements boursiers sur 20 ans, vous constaterez qu’ils sont tout au plus corrects: 7,2% annuel composé pour le marché canadien et 6,3% pour le marché américain. Rien d’exceptionnel.

Aussi, de nombreux investisseurs semblent croire que le marché boursier américain est beaucoup plus payant que le marché boursier canadien. C’est effectivement le cas lorsque vous regardez les rendements des 10 dernières années. Mais ce n’est pas vrai sur 20 ans: les rendements du marché canadien des 20 dernières années sont sensiblement supérieurs à ceux du marché américain.

Si vous trouvez que des rendements d’un peu plus de 7,0% pendant 20 ans ne sont pas très alléchants, vous pouvez en jeter le blâme sur la bulle techno qui avait propulsé les évaluations boursières jusqu’à des niveaux sans précédent à la fin des années 1990. Et si vous regardez les rendements sur 30 ans, ce que, incidemment nous avons fait récemment, car COTE 100 célèbre cette année ses 30 ans d’existence, vous noterez les rendements annuels composés suivants: 10,5% pour le S&P 500 et 8,0% pour le S&P/TSX. On se rapproche ainsi des rendements historiques des marchés boursiers.

En somme, il est bien de célébrer les 10 dernières années boursières et de se remémorer la crise financière de 2008-2009 qui a laissé plusieurs cicatrices. Je crois toutefois qu’il est trompeur de dire que les 10 dernières années de hausse boursière sont totalement anormales. Lorsqu’on regarde la progression de la Bourse sur une période de 20 ou 30 ans, on se rend compte que la dernière décennie représente ni plus ni moins une décennie de rattrapage après une décennie de rendements perdus.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

 

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