Le secret de la performance au travail enfin trouvé!

Publié le 15/04/2016 à 08:38

Le secret de la performance au travail enfin trouvé!

Publié le 15/04/2016 à 08:38

En résumé, une question avant tout de connexions... Photo: DR

Certains d'entre nous sont performants au travail, et d'autres, disons, le sont un peu moins. Pourquoi? Pour mille et une raisons qui sont essentiellement personnelles, me direz-vous. Hum... Peut-être que oui, peut-être que non. Comment savoir?

Une donnée peut permettre d'y voir un peu plus clair : dans le secteur manufacturier américain, les usines qui figurent dans le 90e percentile en matière de productivité se montrent deux fois plus productives que celles qui figurent dans le 10e percentile, selon plusieurs études. Qu'est-ce à dire? Que les usines les plus productives le sont deux fois plus que celles qui le sont le moins. Oui, deux fois plus, ce qui est considérable.

Cela signifie que certaines entreprises ont un secret que d'autres n'ont pas. Un secret qui les métamorphose en véritables championnes de la performance. Un secret - je le souligne - qui dépasse la performance individuelle des employés, qui fait en sorte que l'union de leurs forces se traduit par l'équation magique, mais bel et bien réelle, 1+1=3.

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Comment ces entreprises-là parviennent-elles à cette équation? Eh bien, je pense avoir trouvé la réponse dans une étude exceptionnelle, intitulée Management practices, workforce selection and productivity. Celle-ci est le fruit du travail de : Stefan Bender, directeur du Centre d'études et de données de la Deutsche Bundesbank à Francfort (Allemagne); Nicholas Bloom, professeur d'économie à Stanford (États-Unis); David Card, professeur d'économie à Berkeley (États-Unis); John Van Reenen, professeur d'économie à la London School of Economics (Grande-Bretagne); et Stefanie Wolter, chercheuse de l'Institut de recherche sur l'emploi à Nuremberg (Allemagne). Et elle a mis au jour quelque chose de grandiose, comme vous allez le voir...

Les cinq chercheurs se sont posé une drôle de question, en ce sens qu'il nous semble avoir tous la réponse tant elle paraît évidente : «Quelle est le lien exact entre les pratiques managériales en vigueur dans une entreprise et la productivité de celle-ci?»

Spontanément, nous dirions tous que le lien est direct : plus les pratiques managériales sont bonnes (bons salaires, projets motivants, bonne ambiance de travail, etc.), plus la productivité est élevée; et inversement. Mais ce qui intriguait les cinq chercheurs - des sommités de Stanford et autres Berkeley, je me permets de le souligner -, c'était que ce qu'on désigne sous le terme de «pratiques managériales» recouvre une grande variété de choses.

Oui, c'est là un grand sac fourre-tout où l'on trouve, entre autres, des mesures globales (ex.: une grille salariale qui se veut juste et motivante) et des mesures individuelles (ex.: un programme de rabais pour quiconque prend un abonnement annuel à un gym). Autrement dit, il y a des mesures dont l'efficacité dépend des seuls managers (les globales) et d'autres dont l'efficacité dépend de chaque employé (les individuelles). Si bien qu'on peut légitimement s'interroger quant à l'efficacité réelle des unes et des autres. Pas vrai?

Pour y voir plus clair à ce sujet, les cinq chercheurs ont croisé deux bases de données : d'une part, celle de la World Management Survey, qui compile des informations sur le management des entreprises à l'échelle de la planète; d'autre part, celle de l'Institute for Employment Research, qui regroupe des informations détaillés sur les employés allemands. Leur idée : connaître le détail des pratiques managériales de 361 usines manufacturières allemandes ainsi que de la performance de chacun des 251.872 employés de celles-ci, entre 2004 et 2009.

Pour quoi faire, au juste? Pour regarder s'il y avait «le moindre lien entre productivité, management, compétences individuelles et rémunération». Rien de moins!

Vous voyez le chantier... Il fallait vraiment des chercheurs de cette pointure-là pour s'attaquer à un tel morceau. Et pour s'atteler à ce véritable travail de moine.

Histoire de se simplifier un peu la tâche, ils sont partis à la chasse aux entreprises ayant les meilleures pratiques managériales. Qu'ils ont considéré - toujours pour simplifier - être celles qui oeuvraient le mieux dans trois domaines :

> Suivi. À savoir le suivi par la haute-direction des projets pris en main par les équipes de travail.

> Objectifs. À savoir la détermination d'objectifs clairs, réalistes et pertinents, tant au niveau de la haute-direction que celui des managers.

> Incitatifs. À savoir le recours à des incitatifs financiers, et autres, visant à booster la motivation des employés.

Bien. Vous savez quoi, maintenant? Eh bien, tout cela leur a permis de faire trois trouvailles :

1. Le rôle clé des managers. Les entreprises qui ont les meilleures pratiques managériales ont aussi les employés les plus talentueux. C'est vrai à l'échelle de toute l'entreprise, mais ça se vérifie surtout pour le 1er quartile des employés les plus talentueux, à savoir les 25% qui se démarquent le plus au travail - «ces employés-là sont, à nos yeux, les managers», indiquent les chercheurs dans leur étude, en expliquant qu'il s'agissait, la plupart du temps, de personnes ayant un CV étoffé, une carrière jalonnée de succès et un potentiel de progression encore conséquent.

Du coup, l'impact des managers est considérable sur la performance de l'entreprise. Beaucoup plus que ce qu'on imagine, en général. C'est que 13% de la productivité de l'usine dépend directement d'eux, d'après l'évaluation des chercheurs. (Un pourcentage qui peut paraître faible à première vue, mais qui, en vérité, représente la plus grosse part des blocs de pourcentage composant le 100% de la productivité des usines considérées.)

2. L'importance des rémunérations. Les entreprises qui ont les meilleures pratiques managériales sont aussi celles qui rémunèrent le mieux leurs employés, et qui, par voie de conséquence, s'assurent d'avoir ainsi les meilleurs talents en leur sein. Ces rémunérations-là (salaire, avantages sociaux, etc.) pèsent fortement dans la performance de l'entreprise : leur part dans la productivité de l'usine est, elle aussi, de 13% très exactement.

3. L'influence non négligeable des équipes. Les entreprises qui ont les meilleures pratiques managériales sont aussi celles qui disposent des équipes les plus efficaces. Car elles sont les plus à même d'embaucher et de retenir des personnes talentueuses ainsi que de les faire oeuvrer ensemble de façon adéquate. À noter, toutefois, que ce point-là ne représente qu'une part de 3% dans la productivité de l'usine, ce qui est nettement moins que les deux points précédents.

Ces trois trouvailles, on peut les résumer simplement, en une équation fondamentale :

> L'excellence, en trois points. Les entreprises les plus performantes sont celles qui disposent d'excellents managers, qui offrent d'excellentes rémunérations et qui peuvent compter sur d'excellentes équipes. C'est-à-dire que l'excellence est à la portée de toute entreprise, à condition d'avoir les managers, les rémunérations et les équipes qu'il lui faut pour briller projet après projet.

Bref, Excellence = Managers + Rémunérations + Équipes.

Cela étant, il y a un bémol. Il saute aux yeux : l'addition de ces trois éléments ne représente, au mieux, qu'un bloc de près de 30% de tout ce qui fait la productivité d'une entreprise. Pas plus, puisque 13% (managers) + 13% (rémunérations) + 3% (équipes) = 29%.

Autrement dit, il manque dans cette équation un gigantesque 71%.

De quoi est-il donc composé? Les cinq chercheurs notent qu'il regroupe, en vérité, une myriade d'éléments infimes qu'il est impossible de répertorier avec précision. Toutefois, ils estiment qu'on peut présenter ce bloc-là d'un terme générique : «la culture d'entreprise».

Oui, vous avez bien lu. Tout le reste, c'est la culture d'entreprise. Rien d'autre.

«Si l'on imagine une entreprise comme une molécule, on peut considérer que chaque employé est un simple atome. Mais voilà, on ne peut pas se contenter d'estimer que la performance de cette molécule-là tient à ses seules structure et dynamique, car il manquerait un élément fondamental.

«Lequel? Ce qui fait qu'une molécule est plus que la simple somme de ses parties. Ce qui fait que la vie est en elle. Ce que l'on peut présenter, à l'échelle de l'entreprise, par sa culture», disent en choeur Mme Wolter et MM. Bender, Bloom, Card et Van Reenen.

Tel est par conséquent le secret de la performance, tant au niveau de l'entreprise que de l'équipe de travail! Un secret qu'on peut résumer comme suit :

> Qui entend rendre son équipe plus performante que jamais se doit, dans un premier temps, de lui donner une culture tripante, et dans un second temps, d'user de l'équation de l'excellence. Il lui faut insuffler auprès de chacun des valeurs emballantes et rassembleuses, propices à inciter les uns et les autres à donner leur 110%, jour après jour. Et ce, en percevant cette fameuse culture comme le lien magique qui unit chacun des atomes aux autres, oui, le lien qui permet de communiquer, de vibrer, pour ne pas dire de vivre et croître. (N'oublions jamais que nous sommes avant tout des "animaux sociaux", comme le disait Aristote, qui meurent dès lors qu'ils sont coupés du reste de la société...) Enfin, une fois la culture tripante mis en place, il suffira de recourir à l'équation de l'excellence pour la faire briller de tous ses feux. C'est aussi simple que ça.

En passant, le mémorialiste français Blaise de Montluc disait : «On connaît par les fleurs l'excellence du fruit».

À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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