Comment surmonter votre peur de parler en public?

Publié le 17/02/2017 à 08:38

Comment surmonter votre peur de parler en public?

Publié le 17/02/2017 à 08:38

La glossophobie peut amener à dire n'importe quoi... Photo: DR

À midi, je vais animer un dîner-causerie de la Jeune Chambre de commerce de Montréal (JCCM) qui portera sur rien de moins que l'entrepreneuriat, le développement durable et l'avenir de Montréal. Et avec moi se trouveront sur scène un Dragon, Serge Beauchemin, une star de YouTube, PL Cloutier, un vice-président de l'institut de sondages Léger, Sylvain Gauthier, et une blogueuse de voyage, Lydiane St-Onge. Accrochez-vous pour trouver un panel plus éclaté que ça!

En conséquence, j'ai un trac fou... Vais-je être à la hauteur? Vais-je réussir à «donner une âme» à une telle rencontre? Vais-je vite être débordé par les idées plus géniales les unes que les autres des panélistes? Et même, vais-je me mettre à perdre le fil de mes propres idées? Et à bafouiller honteusement devant le public?

Vous l'avez compris, je me suis vite mis à la recherche d'une étude sur la peur de parler en public, histoire de trouver des trucs aussi simples que subtils pour surmonter mon appréhension. Et vous savez quoi, eh bien, j'ai été exaucé! À peine mes recherches entamées, je suis tombé sur une véritable pépite intitulée Re-thinking anxiety: Using inoculation messages to reduce and reinterpret public speaking fears. Celle-ci est signée par : Ben Jackson et James Dimmock, tous deux professeurs de psychologie sportive à l'Université d'Australie-Occidentale à Perth (Australie); Ashleigh Thornton, professeure de science de la motricité à l'Université d'Australie-Occidentale; et Josh Compton, professeur de science du discours au Dartmouth College à New Hampshire (États-Unis). Regardons ça ensemble...

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Les quatre chercheurs ont noté que l'une des peurs les plus fréquentes chez les adultes, c'est la peur de parler en public. Et ils se sont demandés si ce qu'on appelle la théorie de l'inoculation pouvait permettre de surmonter cette peur-là.

La théorie de l'inoculation? Concoctée par le psychologue américain William McGuire en 1961, elle stipule que l'on peut renforcer une personne sur le plan psychologique rien qu'en lui «inoculant» une juste dose de ce qui fait sa faiblesse.

Prenons une analogie médicale pour bien saisir le principe... Il suffit d'introduire un agent infectieux dans un organisme pour que celui renforce ses défenses par rapport à celui-ci; à condition, bien sûr, que la virulence de l'agent infectieux soit non seulement suffisante pour déclencher une réaction, mais aussi insuffisante pour dévaster les défenses en place. C'est ce que les médecins font aujourd'hui classiquement lorsqu'ils vaccinent une personne : en inoculant de manière préventive un agent infectieux, ils offrent ainsi l'occasion au corps de mieux s'en prémunir à l'avenir.

D'après M. McGuire, il en irait de même pour nos défenses psychologiques. Il suffirait de nous «inoculer» – avec doigté – ce qui nous fait peur pour que nous en soyons moins effrayé les prochaines fois où elle surgira à l'improviste. Et il conviendrait de procéder, pour ce faire, en trois étapes :

1. Prévenir du danger. Dans un premier temps, il faut prévenir la personne des dangers qu'elle encourra la prochaine fois qu'elle sera confrontée à sa faiblesse psychologique. Et ce, en allant droit au but. Exemple, pour une personne alcoolique qui exprime le souhait d'arrêter de picoler, lui dire : «Tu sais, il y aura souvent des gens autour de toi qui vont te dire qu'un petit verre n'a jamais fait de mal à personne, tout en se servant un ballon de beaujolais sous ton nez».

2. Illustrer les défis à venir. Dans un deuxième temps, il faut lui communiquer des exemples concrets des défis qu'elle aura bientôt à surmonter. Ex.: «Ton meilleur chum va se moquer de toi devant tout le monde parce que, toi et ta nouvelle lubie de la sobriété, tu es un casseux de party».

3. Dévoiler des parades concrètes. Dans un dernier temps, il faut lui donner des trucs ultrasimples pour surmonter les défis à venir, ou à tout le moins des arguments assez solides pour faire péricliter leur dangerosité. Ex.: «Tu peux rétorquer qu'il existe de nombreuses études scientifiques attestant des ravages de l'alcool sur la santé, et même en citer deux ou trois en guise d'exemples, histoire d'enfoncer le clou».

Intéressant, n'est-ce pas? Les quatre chercheurs ont ainsi invité 230 personnes – des étudiants australiens qui avaient reconnu qu'ils stressaient toujours à l'idée de parler en public – à se prêter à une petite expérience : il leur faudrait présenter oralement des travaux de recherche devant non pas une poignée de professeurs, mais devant l'ensemble des étudiants, tout seuls, durant 30 minutes. La présentation aurait lieu dans plusieurs mois, à la fin du semestre.

À leur insu, les participants ont été mis dans des conditions différentes : une moitié d'entre eux ont simplement été avertis que cette présentation était importante pour la suite de leur cursus universitaire; l'autre moitié a reçu le même avertissement, et de surcroît des conseils inspirés de la théorie de l'inoculation. Soit :

1. La présentation des principaux dangers auxquels sont confrontés les personnes qui doivent prendre la parole en public alors même que cela les stresse.

2. L'illustration par des cas concrets de ces mêmes dangers.

3. Le dévoilement de trois parades réputées pour leur efficacité dans un tel cas de figure :

– Faire preuve de transparence. C'est-à-dire ne surtout pas chercher à interpréter un rôle, mais plutôt à être soi-même, avec ses qualités et ses défauts. Car les gens aiment l'humilité.

– Jouer du regard des autres. C'est-à-dire ne pas s'arrêter, lorsqu'on parle, sur la personne qui fait autre chose ou qui semble soupirer d'ennui, mais plutôt sur celle qui semble fascinée par nos propos. Car le négatif nous décourage tandis que le positif nous encourage toujours.

– S'amuser à capter d'un coup toute l'attention. C'est-à-dire ne pas hésiter à balancer une blague hilarante (comprendre, drôle et pertinente) pour réveiller l'intérêt de tout le monde, en particulier ceux qui commençaient à décrocher. Car le cerveau – c'est physique – ne peut pas rester concentré sur une même chose (vous!) pendant plus de 18 minutes, et a besoin d'une pause de quelques instants avant de repartir pour un autre 18 minutes.

Résultats? Tenez-vous bien :

> Avant. Juste avant leur prise de parole en public, ceux qui ont été inoculés ont ressenti «nettement moins d'anxiété» que les autres : pas de pensées négatives à même de saper leur moral et autres images terrorisantes (ex.: le moment où tout le monde les fixe alors qu'il leur faut prononcer la toute première phrase de leur discours).

> Après. À la suite de leur prise de parole en public, ceux qui ont été inoculés ont ressenti «nettement moins de stress physique» que les autres : pas de maux d'estomac et autres tremblements de mains rétroactifs.

> Instantanéité. À l'instant-même où ils ont été inoculés, c'est-à-dire où on leur a communiqué les trois temps du message inoculant, les participants concernés se sont moins souciés de leur habituelle anxiété à l'idée de devoir prochainement prendre la parole en public. Le simple fait de savoir qu'il y avait une parade relativement simple a suffi à les réconforter, et par suite, à prendre davantage confiance en eux-mêmes.

Autrement dit, la théorie de l'inoculation fonctionne bel et bien sur le plan psychologique, à tout le moins en ce qui concerne la glossophobie. Et c'est là une excellente nouvelle, me concernant! D'ailleurs, je suis prêt à parier que je ne vais pas pouvoir m'empêcher de balancer une vanne tout à l'heure, histoire de détendre l'atmosphère (et, surtout, de me détendre!). Je croise d'avance les doigts pour qu'elle ne se révèle pas plate...

Que retenir, par conséquent, de tout ça? Ceci, à mon avis :

> Qui entend surmonter sa peur de parler en public se doit de s'appuyer sur la théorie de l'inoculation. Il lui faut procéder en trois temps, seul ou, mieux encore, avec des proches ou des collègues : Déceler les dangers encourus | Imaginer les périls à venir | Répertorier les meilleures parades. Et ce faisant, s'auto-vacciner contre les frayeurs qui l'assaillent d'habitude à la seule idée de devoir prononcer un discours ou défendre un dossier devant tout le monde.

En passant, l'écrivaine française Pascale Roze a dit dans Ferraille : «Seuls les cailloux ignorent la peur».

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À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

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