Les vraies victimes du salaire minimum à 15$

Publié le 22/08/2017 à 14:40

Les vraies victimes du salaire minimum à 15$

Publié le 22/08/2017 à 14:40

Dans un récent statut Facebook, Alexandre Taillefer, ardent défenseur du salaire minimum à 15$, essayait de nous convaincre que cette hausse n’aurait, au final, que très peu d’impact sur les entreprises.

Il a pris l’exemple de l’épicier Métro afin de l’aider dans son argumentaire. Selon ses calculs, le fait d’augmenter le salaire minimum à 15$ de l’heure, n’aura qu’une incidence minime sur leurs résultats financiers, soit à peine 1,25% de leur marge nette.

Métro a annoncé dernièrement que seulement pour l’Ontario, cette augmentation représentera pas loin de 50 millions de dollars de dépenses supplémentaires annuelles. Du côté de Loblaw, les augmentations du salaire minimum augmenteraient leurs dépenses de main-d'œuvre d'environ 190 millions l'an prochain.

C’est exactement en prenant ces exemples que nous nous mettons tous le doigt dans l’œil. En 2016, la compagnie Métro a eu un chiffre d’affaires de 12 milliards et un bénéfice net de 586 millions. Quant à Loblaw, leur chiffre d’affaires a été de 46 milliards et leur bénéfice a largement dépassé les 600 millions.

Pour dire autrement, je n’ai aucune crainte qu’ils puissent survivre à une hausse aussi drastique qu’elle soit du salaire minimum. Ma crainte n’est pas envers ces superbes compagnies qui ont littéralement bâti des empires, ma crainte est pour le 99% restant.

J’aimerais plutôt que l’on prenne en exemple le propriétaire d’un magasin de chaussures de Havre-Saint-Pierre, d’un propriétaire de salle de cinéma de Rouyn-Noranda ou d’un garagiste de Gaspé. Sortons de notre réalité montréalaise et pensons aux impacts qu’une telle mesure aura sur les dizaines de milliers d’entrepreneurs de régions et surtout, de leurs millions d’employés.

Selon l’institut de la statistique, le Québec compte environ 235 000 petites entreprises représentant près de 1,9 million d’emplois. Loin de connaître la réalité financière des géants de monde des affaires, l’immense majorité de ces entreprises, soit près de 90% d’entre-elles, vont voir leur croissance être sous la barre des 10% entre 2016 et 2017. (Petit rappel: la hausse du salaire minimum à 15$ représente une hausse de plus de 33% par rapport au salaire minimum actuel de 11.25$).

Attention, comme je l’écrivais dans une chronique précédente, loin de moi le souhait de ne pas améliorer le sort de milliers de travailleurs, cependant, en ayant été aux premières loges de l’entrepreneuriat, en ayant vécu moi-même à la «cenne près» pendant des années, je tiens absolument à donner une voie à ces milliers d’entrepreneurs que je rencontre lors de mes très nombreux déplacements dans notre belle province.

Je pourrais rester spectateur de ce débat. Chacun de mes employés gagne plus de 15$ dollars de l’heure. Certains mêmes, gagnaient plus que moi, dans ma propre entreprise, à mes débuts. Quoi que ce soit très payant politiquement d’être pour une telle augmentation, je crois sincèrement qu’il faille avoir un vrai débat. 

Malheureusement, comme bien des sujets, le simple fait de lever la main afin de poser une question est pris comme un geste hostile. 

Ne faisons pas l’autruche. Cette majoration du salaire à 15$ de l’heure provoquera automatiquement une restructuration de centaines de milliers d’entreprises. Croyez-vous vraiment que Loblaw va accepter sans broncher une perte de 190 millions? Croyez-vous vraiment que le propriétaire d’un dépanneur ne va pas couper dans les heures de ses employés pour continuer, littéralement, à survivre de semaine en semaine?

Si oui, c’est bien mal connaître le monde des affaires. Les contrecoups commencent d’ailleurs déjà à se faire ressentir. Au final, nous serons tous collectivement perdants. Soit les prix augmenteront, annulant tout effet d’une hausse de salaire, soit le nombre d’employé diminuera, entraînant malheureusement un tout autre problème.

 

 

À propos de ce blogue

Je me suis lancé en affaires quelques jours après avoir gradué de l’Université de Montréal en science politique. Un peu par hasard, beaucoup par folie, je suis devenu entrepreneur sans trop savoir ce qui m’attendait. Bien que ma première expérience en affaires fut catastrophique, je suis tombé en amour avec l’entrepreneuriat. Aujourd’hui, je suis à la tête d’un des plus grand producteurs de spiritueux et prêt-à-boire en Amérique du Nord et ce ne sont pas les projets qui manquent! Depuis novembre 2015, je partage chaque semaine ici mes idées, mes opinions et ma vision sur le monde des affaires et les sujets de société qui m’interpellent. Bienvenu dans mon monde!

Nicolas Duvernois

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