Titres boursiers: trop d'emphase sur le dividende

Publié le 28/02/2016 à 21:38, mis à jour le 29/02/2016 à 06:17

Titres boursiers: trop d'emphase sur le dividende

Publié le 28/02/2016 à 21:38, mis à jour le 29/02/2016 à 06:17

Photo: Shutterstock

Berkshire Hathaway (NY, BRK-A) vient de publier ses résultats. Sans surprise, les profits d’exploitation ont crû, et l’empire de Warren Buffett grandit constamment. Les sources de revenus de cette société sont diverses et lui assurent une constance dans ses résultats même dans des conditions économiques moins favorables. Pourtant, la société ne verse toujours pas de dividende. Les investisseurs à revenu devraient-ils donc éviter d’acheter son titre?

Voici un article (cliquer ici) qui fait état de 7 mythes concernant les titres à dividendes. Nous avons listé ces mythes ici :

-Les actions versant des dividendes résistent bien dans un marché difficile.

-Elles performent mieux que le marché en général.

-Elles procurent une diversification adéquate.

-Elles constituent une source fiable de revenu.

-Elles sont avantageuses sur le plan fiscal.

-Elles s’avèrent une façon prudente d’investir dans les titres considérés «valeur».

-Elles remplacent les obligations.

Voyons ce qu’est en réalité un dividende. Prenons un exemple simpliste à l’aide d’un couple, Martin et Lucie. Martin gagne un revenu, et verse une allocation à Lucie. Cette dernière reçoit 10000$ par an pour ses propres dépenses, et compte sur les revenus et la solidité financière de Martin pour assurer les besoins actuels et futurs du ménage. Comme Martin gagne 100 000$ par an, il n’éprouve aucune difficulté à verser les 10000$ annuellement à Lucie.

Cependant, si Martin conservait en banque cet argent plutôt que de le donner comme allocation de dépenses personnelles, en quoi cela changerait la solidité financière du couple? De toute évidence, le ménage serait plus riche de 10000$ par an.

Qu’est-ce qui importe le plus dans le présent exemple? Les 100000$ de revenus ou les 10000$ d’allocation? Sans les revenus, l’allocation ne pourrait plus exister. Donc, l’essentiel ne repose point dans l’importance de l’allocation, mais plutôt dans la provenance de cet argent. Ainsi, un investisseur a fortement intérêt à surveiller les profits de la société dans laquelle il investit. Le dividende ne constitue qu’une distribution tributaire des profits ou des liquidités accumulées de la société.

Si Martin perdait son emploi, il pourrait décider de continuer à verser 10000$ à Lucie tous les ans. Nous assistons souvent à cette réalité en Bourse : lorsque l’entreprise connaît des difficultés, elle préfèrera probablement puiser dans ses liquidités ou recourir à l’emprunt plutôt que de couper le dividende, afin de ne pas froisser les actionnaires. Comme nous pouvons le constater, le maintien du dividende ne garantit en rien la solidité d’un titre!

Logiquement, lorsque Martin perd son emploi, il devrait conserver les 10000$ dans le compte de banque du ménage, afin de favoriser la survie du couple le plus longtemps possible. Donc, une société prudente tirerait avantage à couper son dividende dès que le vent tourne. Malheureusement, ce geste est souvent perçu négativement par les investisseurs.

Rappelons-nous le cas de Wells Fargo(NY., WFC) durant la crise. Les temps s’avéraient difficiles depuis près de deux ans, et pourtant, en janvier 2009, la direction a cherché à rassurer ses investisseurs en déclarant qu’elle ne couperait point son dividende. À peine un mois plus tard, il fut tronqué de 85%!

Si, dès l’année 2007, la société avait opté pour la suspension temporaire du dividende, elle aurait mis de côté plus de 8G$US en deux ans. En incluant les rachats d’actions, on totalise 17G$US. Ce montant représente 68% du montant reçu par la banque lors du programme de sauvetage du gouvernement.

Un titre versant des dividendes depuis longtemps ne vous indique que deux choses : la société a été rentable dans le passé et elle existe depuis un certain temps. Cependant, vous ne disposez pas d’information concernant l’évaluation du titre, ni par rapport à l’évolution de la santé financière de la société. Comme vous avez pu le constater avec l’exemple de Wells Fargo, le dividende sera plus souvent qu’autrement coupé lorsque la direction n’a plus le choix. En d’autres termes, il sera trop tard pour l’actionnaire qui comptait surtout sur le revenu.

En conclusion, un investisseur recherchant les dividendes ne devraient pas négliger les sociétés comme Berkshire Hathaway pour son portefeuille. Trop d’importance est accordée à cette fameuse distribution en argent!

 

À propos de ce blogue

Patrick Thénière et Rémy Morel sont associés et gestionnaires de portefeuille chez Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

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