Chine: les autorités ne peuvent empêcher les krachs boursiers

Publié le 12/01/2016 à 06:40

Chine: les autorités ne peuvent empêcher les krachs boursiers

Publié le 12/01/2016 à 06:40

Photo: Shutterstock

Les Bourses du monde affichent une volatilité accrue depuis plusieurs mois. Nous entendons de plus en plus parler de la Chine, dont le ralentissement inquiète toute la planète. Suite à une pénible chute de leur Bourse cet été, les autorités ont tenté diverses mesures afin de freiner ce phénomène.

Au début de 2016, un mécanisme de protection contre les sévères baisses a été instauré. Si l'indice CSI 300 cède ou prend 5%, les transactions sont suspendues pendant au moins quinze minutes, le temps de laisser les investisseurs se calmer. Si la variation atteint 7%, la suspension se poursuit pour le reste de la journée. Soulignons que le CSI 300 réfère aux Bourses de Shanghai et de Shenzhen, et il est constitué de 300 titres, tel que compilé par la China Securities Index Company.

Dès la première journée où le mécanisme a été mis en place, soit le 4 janvier 2016, la Bourse a dégringolé suffisamment pour suspendre toutes les transactions au bout de seulement 29 minutes. Un scénario semblable s’est répété trois jours plus tard. Finalement, le lendemain de cette deuxième chute, les autorités n’appliquèrent plus ce mécanisme, et préférèrent mettre à nouveau en place des mesures restrictives à l’endroit des gros actionnaires.

Tout actionnaire détenant 5% des actions d’une société ne peut vendre plus de 1% de ses titres sur une période de trois mois, à condition d’avertir les autorités 15 jours ouvrables d’avance. Notons que l’été dernier, on avait empêché les gros actionnaires de vendre leurs actions pour une période de six mois. L’expiration du délai constituait l’occasion pour ceux qui le désiraient de négocier.

Des conséquences néfastes à long terme pour l'économie chinoise

Pourquoi avait-on instauré une telle protection contre les baisses brutales? Sur son site, la Bourse de Shanghai stipulait que ce mécanisme visait à «stabiliser» la Bourse et ainsi éviter des krachs comme celui-ci qui a eu lieu l’été dernier.

Or, le gouvernement a obtenu l’effet contraire: quand les investisseurs savent qu’ils seront restreints, ils se dépêchent d’agir!

Nous pensons que l’idée qu’un gouvernement tente de contrôler les variations boursières est dénuée de sens. La Bourse constitue un marché d’échange permettant justement à quiconque d’acheter ou de vendre comme bon lui semble.

Lorsqu’on instaure des restrictions importantes comme celles annoncées en début de janvier, un message négatif est envoyé à tous les acteurs importants de l’industrie: le marché chinois ne doit pas être liquide.

Pour l’économie, de lourdes conséquences sont à prévoir. Il suffit de se mettre à la place des gros actionnaires. Si vous savez d’avance que vous serez sérieusement restreints par ces mesures, serez-vous tenté de prendre des positions significatives dans une société? Si le gouvernement force l’acceptation de tant de contrôles maintenant, comment ne pas conclure qu’il le fera tout le temps?

Il existe toutes sortes de raisons pour vendre, et la panique ne figure que parmi bien d’autres. On peut souhaiter investir ailleurs tout simplement, parce que l’on juge que son investissement a atteint les cibles que l’on s’était fixées.

Les plus petits investisseurs peuvent également être affectés. Ceux ayant fondé une société détiendront souvent au moins 5% des parts s’il la lance à la Bourse. Avec une telle règle, ils auraient plutôt intérêt à trouver des investisseurs privés, s’ils désirent détenir le contrôle sur ce qu’ils vendent.

Par conséquent, nous pensons que ces restrictions font plus de mal que de bien.

À moyen et long terme, elles minent l’économie en empêchant la libre circulation des flux monétaires entre sociétés et individus.

Soulignons que le CSI 300 s’était apprécié de 150% en un an avant d’amorcer sa chute en juin 2015. Malgré toutes les baisses depuis ce temps, l’indice se situe encore près de 50% plus haut qu’au départ. Est-ce que les investisseurs en Amérique devraient cesser de paniquer? Poser la question c’est y répondre.

 

À propos de ce blogue

Patrick Thénière et Rémy Morel sont associés et gestionnaires de portefeuille chez Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

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