Amazon: toujours de plus en plus fort

Publié le 01/07/2017 à 12:12

Amazon: toujours de plus en plus fort

Publié le 01/07/2017 à 12:12

Cette semaine, la société Nike (N.Y., NKE) a annoncé qu’elle distribuerait ses produits sur la plateforme d'Amazon (NASDAQ, AMZN). Il ne s’agit pas d’un fait banal, puisque Nike avait auparavant toujours refusé de le faire, pour plusieurs raisons, telles que le contrôle de la présentation de la marque et ses meilleures marges de profit avec la vente directe.

Or, son compétiteur Adidas AG (OTCQX, ADDDF), avait pris la décision en 2014 de permettre la vente de ses produits sur Amazon. Sa part de marché aux États-Unis passa alors de 7% à 11%. Pendant ce temps, Nike avait souffert de la popularité de ses produits chez... Amazon (selon cet article). Il s’agirait de la marque de vêtement la plus vendue sur le site, malgré le fait qu’aucun distributeur n’était approuvé par Nike.

La plateforme du géant vendeur en ligne est disponible pour tout revendeur souhaitant distribuer des produits quelconques. L’exemple de Sam Cohen, un revendeur demeurant au New Jersey, s’avère fort révélateur. Il rafla une petite fortune en ciblant des escomptes importants sur les produits Nike. Il déboursa environ 200 000$US pour divers produits de cette marque qui se vendaient à très fort escompte chez un détaillant, pour finalement empocher 1 million de dollars à travers Amazon. Il avait embauché des gens pour effectuer ses achats de façon efficace!

La société Nike devait donc se battre contre ce genre de phénomène, peu importe qu’il se produise légalement ou non. La plateforme Amazon représente un superbe incitatif pour quiconque de tenter d’acquérir des produits de marque à rabais, pour ensuite les revendre à un prix un peu plus élevé. Le comble, c’est que Amazon empoche un profit pour chacune des ventes, ce qui la renforce financièrement au détriment des manufacturiers qui tentent de protéger l’image et le prix de leurs marques coûte que coûte (si trop de gens achètent un produit à rabais, la valeur perçue en sera affectée et plus personne ne sera prêt à payer le prix original). 

Vous pourriez comparer la puissance des incitatifs ainsi: imaginez un champ parsemés de clous, dans lequel un gros aimant se promène aléatoirement. L’attraction de l’aimant fonctionne, 24 heures sur 24, 7 jours par semaine, sans relâche. Cette attraction ne coûte rien et ne requiert aucun effort. Par conséquent, vous pouvez envisager que tôt ou tard, votre aimant sera couvert de clous. Vous pouvez toujours espérer qu’un incitatif ne produira pas l’effet désiré. Cependant, ce serait un peu comme parier contre les forces de la nature.

Environ un item sur deux provient des ventes effectuées par des tierces parties chez Amazon, et ces ventes comportent des marges brutes très élevées étant donné que notre détaillant en ligne n’a pas à «acheter» le produit, servant uniquement d’entremetteur. Ajoutons à cela les bénéfices engrangés par les divers services connexes offerts: manutention, livraison, entreposage, etc.

Cette tendance ne risque pas de s’estomper de sitôt. Le consommateur en bénéficie fortement, puisqu’il paie souvent moins cher. Certains pourraient visualiser Amazon comme étant un géant de la vente en ligne, constituant un compétiteur parmi d’autres pour les détaillants. Quant à nous, nous le voyons davantage comme le créateur d’une multitude de nouveaux compétiteurs en ligne, affectant non seulement les détaillants, mais aussi les manufacturiers jouissant de marges brutes élevées.

Le fondateur, Jeff Bezos, a créé une formidable entreprise, et sa compréhension de la puissance des incitatifs l’a aidé dans le passé, et l’aidera certainement dans le futur pour développer d’autres secteurs dans lesquels la société investit, comme son service de nuage sécurisé (AWS) ou son service de vidéos en ligne (Amazon Prime Video). La création de l’abonnement à Amazon Prime, qui en échange d’un certain frais, permet d’accéder à une foule d’avantages, constitue un autre exemple d’incitatif que M. Bezos peut exploiter efficacement.

En tant qu’investisseur, étudier la société Amazon est devenu un incontournable, puisque cette entreprise touche maintenant plusieurs secteurs. On doit donc bien comprendre de quelle façon un compétiteur s’y prend pour contrer les menaces potentielles ou actuelles, afin d’éviter d’investir dans des titres qui, malgré leur apparence de forte aubaine, comportent trop de risques. 

 

Au sujet des auteurs du blogue: Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

À propos de ce blogue

Patrick Thénière et Rémy Morel sont associés et gestionnaires de portefeuille chez Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

Les investigateurs financiers

Blogues similaires

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.

Bourse: la Banque Royale fait trembler le marché des actions privilégiées

19/04/2024 | Denis Lalonde

BALADO. La Banque Royale envoie un signal clair qu'elle pourrait racheter toutes ses actions privilégiées.