Le prix unique, une mesure tournée vers le passé
Clément Laberge, vice-président de De Marque, qui agit comme distributeur de livres numériques, participera à la commission parlementaire qui se penchera sur la question du prix unique. Joint au téléphone, il m’a expliqué qu’une éventuelle loi, par exemple, pourrait contourner les détaillants n’ayant pas de présence au Québec en récompensant les éditeurs qui s’assurent que leurs livres ne font pas l’objet de remises dépassant le seuil établi par la loi. Si vous vous intéressez à la question, je vous invite à suivre son blogue. Il y a d’ailleurs publié mercredi un billet sur cet enjeu, qui constitue le premier d’une série.
Même si on parvenait à appliquer la loi uniformément sur les livres québécois, aucune loi provinciale ne pourra empêcher les Québécois d’acheter des livres américains sur Amazon.com. L’adoption d’une telle loi permettrait peut-être à certaines librairies de subsister plus longtemps qu’elles auraient pu le faire autrement, mais pourrait du même coup faire mal aux éditeurs québécois. Selon l’Institut économique de Montréal, une telle mesure pourrait faire reculer les ventes de livres québécois de 17 %.
Dans les faits, le prix unique est essentiellement une mesure défensive conçue dans le contexte de l’émergence des grandes surfaces généralistes dans les années 1970 et 1980. Que l’industrie du livre y consacre de l’attention en 2013, alors que les rôles de tous les acteurs de l’industrie du livre sont à repenser, c’est plutôt triste. Ce retournement sur soi-même ressemble à s’y méprendre à la réaction de l’industrie du vêtement qui, dans les années 2000, réclamait des quotas d’importation.
Or, les manufactures de textiles ne m’ont jamais manqué, mais je sais que les librairies me manqueront. De plus, je m’inquiète du sort des maisons d’édition indépendantes. L’industrie du livre est à la croisée des chemins. Il me semble qu’elle devrait avoir assez confiance en elle pour aller de l’avant, même si cela implique de cheminer à tâtons, dans l’inconnu. Après tout, si je ne sais pas à quoi ressemblera l’industrie du livre dans 20 ans, je sais que les grandes surfaces n’y auront pas un grand rôle à jouer.