Entrepreneuriat : quand la démographie s’en mêle

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Octobre 2018

Entrepreneuriat : quand la démographie s’en mêle

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Octobre 2018

[Photo : 123RF]

En plein mois de l'entrepreneuriat, permettez-moi de vous parler de... main-d'oeuvre. Oui, encore, la fameuse, la profonde pénurie de main-d'oeuvre. C'est que ses effets pourraient bien se manifester jusque dans le registre de la création d'entreprise.

«À cause de la rareté de la main-d'oeuvre, les hausses de rémunération et des avantages consentis aux salariés pourraient éventuellement nuire à l'activité entrepreneuriale au Québec et réduire le potentiel de développement économique des régions à moyen et à long terme», écrit Marc Duhamel, en marge des résultats québécois du Global Entrepreneurship Monitor 2017 (GEM) publiés la semaine dernière. Il cosigne avec Étienne St-Jean, comme lui professeur à l'UQTR et chercheur à l'Institut de recherche sur les PME, le volet québécois de cette étude annuelle internationale.

Ainsi, constatent-ils, le Québec compte une plus grande proportion d'entrepreneurs hybrides, autrement dit qui dirigent leur entreprise tout en conservant un emploi salarié. À l'étape du démarrage, seulement 19,6 % se consacrent entièrement à la création de leur entreprise, comparativement à 35,6 % dans le reste du Canada (parmi les entrepreneurs établis, ils sont 35 % comparativement à 57,9 %). On les comprend, quand on sait que plus du tiers des entreprises ne passent pas le cap des cinq ans d'existence. Cependant, c'est le creux démographique, qui est en grande partie responsable de la rareté de la main-d'oeuvre et donc de l'attrait du salariat, qui pourrait encore mieux expliquer cet écart.

La démographie est aussi en cause en ce qui a trait aux sorties entrepreneuriales. Bien que le Québec soit un des endroits du monde où les entreprises survivent le plus au départ de leur fondateur, c'est aussi le «territoire où la proportion de sorties entrepreneuriales avec cessation des activités est la plus grande de tous les pays tirés par l'innovation», et ce taux «a considérablement augmenté cette année». L'étude ne permet pas de conclure dans quelle mesure le départ à la retraite pèse sur cette statistique, mais elle «observe une proportion plus élevée de fermetures causées par les départs à la retraite et par la bureaucratie et l'intervention de l'État au Québec qu'ailleurs au Canada».

Malgré la pression démographique, qu'on ne s'y trompe pas. Cette 5e édition du GEM québécois dresse un bilan plutôt positif de l'entrepreneuriat, soulignant par exemple que l'entrepreneuriat émergent est en forte progression chez les 35 à 44 ans et que même si les femmes sont toujours moins nombreuses que les hommes à se lancer en affaires, elles le font maintenant avec un degré d'ambition semblable à celui des hommes.

Julie Cailliau
Éditrice adjointe et rédactrice en chef, Groupe Les Affaires
julie.cailliau@tc.tc
@julie140c

À propos de ce blogue

Julie Cailliau est éditrice adjointe et rédactrice en chef du Groupe Les Affaires, dont l’équipe de journalistes chevronnés publie le journal Les Affaires, le site lesaffaires.com et le magazine Les Affaires Plus. Elle est également présidente du conseil d’administration de la Fondation des prix pour les médias canadiens. Diplômée de l’École supérieure de journalisme de Lille, en France, Julie a pratiqué le métier de journaliste au sein de plusieurs publications françaises et québécoises. Dans une vie précédente, elle a œuvré à titre d’ingénieure en biotechnologies. Son « why », c’est d’apprendre et d’informer afin de nous permettre de faire les bons choix. La prise de conscience de l’urgence environnementale et l’émergence de l’entrepreneuriat social comptent pour elle parmi les tendances les plus réjouissantes actuellement.