[Photo : Bloomberg]
De récents reportages de La Presse sur la gestion des appareils de loterie vidéo et sur la surveillance des bars qui les exploitent ont révélé des situations troublantes.
Loto-Québec ne respecte pas sa politique qui établit une limite de deux appareils de loterie vidéo (ALV) par tranche de 1 000 habitants. Il y a des concentrations d'appareils dépassant de beaucoup cette norme dans 48 municipalités et arrondissements. On retrouve par exemple 5,3 ALV par 1 000 habitants à Pont-Viau et 4 ALV dans l'arrondissement Ville-Marie à Montréal. Toutes les régions du Québec comptent des villes où le nombre d'ALV dépasse la norme.
Naturellement, ces concentrations se trouvent dans des villes et des régions où la population est vulnérable face au jeu sur ces appareils. Ces endroits comptent des poches de citoyens défavorisés qui misent sur le jeu pour se sortir de la pauvreté. À l'opposé, 29 villes, dont la population est mieux informée des risques du jeu sur ces satanées machines, ne comptent aucun appareil.
La concentration d'ALV dans des endroits où la population est le plus à risque de tout perdre et de développer une dépendance au jeu est d'autant plus immorale qu'elle est l'oeuvre de l'État. La distribution territoriale des ALV en fonction des clientèles les plus rentables est sans doute semblable à celle qu'effectuait le crime organisé avant que l'État ne s'empare de ce commerce en 1994. Certes, en s'appropriant la gestion des ALV, Québec poursuivait deux buts louables : sortir les ALV des mains du crime organisé et protéger la population. Pourtant, on voit que ces objectifs n'ont pas été atteints. Alors que les ALV continuent de viser des clientèles vulnérables, des appareils sont toujours exploités par des personnes liées au crime organisé.
Selon l'enquête de La Presse, 17 bars qui exploitent des ALV appartiennent à des trafiquants de drogue ou d'armes, 11 sont la propriété de gens de leur entourage et 14 sont gérés par des employés qui s'adonnent à des trafics. En outre, 22 bars ont été l'objet de règlements de compte importants. N'est-il pas aberrant et immoral que l'État permette à de tels établissements d'empocher des dizaines de millions de dollars en exploitant des ALV qui lui appartiennent ?
C'est Loto-Québec qui gère les 11 665 ALV présents au Québec. Par contre, c'est la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) qui accorde les licences permettant l'exploitation des ALV (maximum de cinq appareils par licence). Il y avait 2 331 licences en vigueur au 31 mars dernier, mais 7 % d'entre elles n'étaient pas exploitées. La RACJ a aussi pour mandat de surveiller les établissements qui exploitent ces ALV. Or, l'organisme n'a réalisé que 177 enquêtes et inspections relatives à l'exploitation des ALV au cours de l'exercice terminé le 31 mars 2016, comparativement à 304 en 2014-2015, à 316 en 2013-2014 et à 339 en 2012-2013.
Malgré des revenus annuels stables d'environ 38 M$ qui lui laissent un important surplus (24 M$ l'an dernier), la Régie dispose de moins en moins de ressources : 186 employés au 31 mars 2016, au lieu de 200 un an auparavant, et 12 régisseurs, au lieu des 17 autorisés par la loi. Elle n'a que sept inspecteurs. Ne faudrait-il pas resserrer les processus d'émission des licences et de contrôle des exploitants d'ALV ? Une consultation est en cours, mais vise plutôt un allègement réglementaire.
Il se peut que la RACJ fasse le mieux qu'elle peut avec les moyens dont elle dispose, mais l'état des lieux semble indiquer que les arguments des tenanciers ont plus de poids que ceux de la police quand vient le moment d'accorder un permis de vente d'alcool ou une licence d'exploitation d'ALV. Sur les 671 décisions rendues par la Régie en 2015-2016, seulement 75 permis ont été révoqués et 376 permis ont été suspendus pour une durée moyenne de 5,9 jours uniquement. L'année précédente, sur 744 décisions, elle avait révoqué 70 permis et suspendu 425 permis pour une durée moyenne de 7,2 jours.
Face à ces révélations, le gouvernement Couillard a ordonné à Loto-Québec de ne pas installer d'ALV dans les établissements qui ont une licence mais pas d'ALV. Ce ne sont pas seulement les ALV contrôlés par le crime organisé qui posent problème. C'est aussi leur forte concentration dans des territoires habités par des personnes vulnérables face au jeu. Et que dire de la complicité de l'État dans cette exploitation odieuse de la faiblesse humaine ?
À défaut de bannir ces machines infernales, un grand ménage s'impose. Certains propriétaires de bars vont regimber, mais un État qui a des valeurs éthiques ne peut pas exploiter les plus faibles pour remplir ses coffres.
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