En clôturant la commission parlementaire qui a entendu 59 intervenants et reçu 88 mémoires relativement à son projet de loi 10 sur la réforme du système de santé, le ministre Gaétan Barrette a eu ces phrases suaves :
«Je n'ai pas entendu un seul administrateur, un seul employé [du réseau] ni un seul citoyen qui m'a dit d'arrêter... Je ne donnerais jamais les pouvoirs de ce projet de loi dans sa version actuelle à mon prédécesseur.»
De toute évidence, le ministre n'est pas allé sur le terrain, ou bien les administrateurs et les directeurs généraux n'ont pas osé lui dire ce qu'ils pensent de son projet, probablement parce qu'ils seront tous remerciés ou mis en disponibilité d'ici le 31 décembre. Ils ont intérêt à se montrer discrets, puisque c'est surtout parmi eux que le ministre nommera les administrateurs, les directeurs généraux et les directeurs généraux adjoints qui géreront, à compter du 1er avril 2015, les 16 centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS), nés de la fusion des agences, des hôpitaux et des centres de services dans les différentes régions administratives.
De plus, en disant ne pas vouloir donner à son prédécesseur les pouvoirs qu'il s'attribue dans son projet de loi, le ministre indique que ceux-ci pourraient être dangereux s'ils tombaient en d'autres mains. Il prouve ainsi par l'absurde que son projet de loi octroie trop de pouvoir à une seule personne, même si elle est ministre.
Cela dit, M. Barrette a promis qu'il amenderait son projet de loi pour tenir compte de critiques et préciser que certains pouvoirs qu'il s'est attribués seront «transitoires». Il reste à voir jusqu'à quel point il corrigera les énormes défauts de son projet, tels qu'énoncés dans cette chronique la semaine dernière et relevés par plusieurs autres observateurs.