Régimes de retraite: la protection offerte se doit d'être stabilisée


Édition du 06 Septembre 2014

Régimes de retraite: la protection offerte se doit d'être stabilisée


Édition du 06 Septembre 2014

Il est facile de comprendre la colère des syndicats face au projet de loi 3 sur la réforme des régimes de retraite municipaux, qui affaiblit leur rapport de force dans la négociation de leurs conditions de travail.

Les municipalités ont maintes fois demandé, dans le passé, certains outils pour accroître leur pouvoir de négociation - notamment la possibilité de recourir au lock-out -, mais le gouvernement leur a toujours refusé cette aide.

Il a fallu une conjoncture particulière pour que le gouvernement s'attaque enfin aux régimes de retraite, l'élément le plus crucial de la rémunération globale des employés municipaux.

Les grands éléments de cette conjoncture sont les suivants :

> les importants déficits des régimes de retraite des employés municipaux, qui sont estimés à 3,9 G $ par le gouvernement. Il est probable que les prochaines évaluations actuarielles montreront un déficit global inférieur, mais cette donnée ne change rien à l'enjeu véritable de cette réforme, qui est de stabiliser financièrement ces régimes de retraite afin qu'ils jouent leur véritable rôle : assurer un revenu décent aux retraités ;

> le leadership et la ténacité du maire de Québec, Régis Labeaume. Fort d'un important appui populaire, ce dernier n'a pas craint d'exiger une réforme en profondeur du système des régimes de retraite municipaux. Ce combat a ensuite été repris par l'Union des municipalités et le nouveau maire de Montréal, Denis Coderre, qui y a mis également tout son poids politique ;

> l'excellent rapport du groupe de travail présidé par Alban D'Amours. Ses recommandations n'ont pas toutes été acceptées, mais le gouvernement y a trouvé des propositions assez réalistes pour entreprendre la réforme ;

> la perte d'appui populaire des syndicats. On en avait eu une démonstration éloquente à l'occasion de la commission parlementaire d'octobre 2011 sur la réforme du placement syndical dans la construction, alors que l'ex-président de la FTQ, Michel Arsenault, n'a pu faire mieux qu'un baroud d'honneur. Pour montrer leur colère, les syndicats avaient orchestré un débrayage dit «spontané», qui, bien entendu, avait été planifié. Le projet de loi fut adopté facilement.

Bien entendu, le projet de loi 3 ratisse plus large que l'abolition de placement syndical, et il ne faut pas tenir pour acquis qu'il va passer comme une lettre à la poste. Sans toucher aux principes et aux objectifs poursuivis, le gouvernement devrait accepter certains assouplissements pour prévoir des situations particulières.

Comme d'habitude, ce projet fait l'objet d'une campagne de désinformation par les syndicats, mais si le gouvernement et les municipalités l'expliquent bien, la population l'appuiera. On veut faire croire que le projet de loi abolit la négociation. C'est faux. Les parties ont jusqu'au 1er février 2015 pour lancer les négociations afin de modifier leur régime de retraite. Elles ont ensuite 12 mois pour s'entendre, période qui peut être prolongée de 3 mois. Autre raccourci, on compare le gouvernement à un vendeur, qui accroîtrait le prix d'une voiture après la signature du contrat de vente. C'est un sophisme, comme si les régimes de retraite des municipalités et leurs enjeux sociétaux pouvaient être comparés à la vente d'un bien matériel.

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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