Leitão changerait d'idée : lueur d'espoir pour les futurs retraités


Édition du 03 Juin 2017

Leitão changerait d'idée : lueur d'espoir pour les futurs retraités


Édition du 03 Juin 2017

Selon des informations obtenues par le Journal de Québec, le gouvernement du Québec aurait changé d'avis sur la réforme du Régime de rentes du Québec (RRQ). On se rappellera que son ministre des Finances, Carlos Leitão, avait refusé en juin dernier de se rallier à la proposition de réforme du Régime de pensions du Canada (RPC) à laquelle les autres provinces et le gouvernement fédéral avaient adhéré après des années de discussions.

Le RPC est l'équivalent du RRQ dans le reste du pays. Pendant longtemps, ces deux régimes ont été identiques. Il y a quelques années, toutefois, le Québec a dû revoir à la hausse le taux de cotisation du RRQ, en raison surtout du vieillissement plus rapide de sa population. Le taux de cotisation du RRQ est aujourd'hui de 10,8 % du maximum des gains admissibles (55 300 $, moins une exemption annuelle de 3 500 $), alors que celui du RPC est de 9,9 %. Ces taux sont payés à 50-50 par l'employeur et le salarié. Les cotisations de chacun sont ainsi de 2 797,20 $ pour le RRQ et de 2 564,10 $ pour le RPC.

Les deux régimes offrent une rente de 25 % du maximum des gains admissibles (MGA), soit un maximum de 1 114,17 $ par mois à 65 ans.

Pour une personne qui n'a pas bénéficié d'un régime de retraite d'employeur (ce qui est le cas d'environ 50 % des travailleurs) et qui n'a pas cotisé à un régime enregistré d'épargne-retraite (REER) ou qui l'a fait minimalement, la rente du RRQ et la pension de la Sécurité de la vieillesse (578,53 $ par mois) sont nettement insuffisantes pour l'assurer d'une retraite adéquate. Les plus démunis peuvent toutefois recevoir le Supplément de revenu garanti du fédéral (864,09 $ par mois pour une personne seule).

La conversion de Leitão

Alors que les autres provinces et le fédéral s'entendaient pour porter de 25 % à 33 % la rente du MGA, Carlos Leitão s'était présenté à la rencontre de juin 2016 avec une proposition hybride : une rente combinée de 29 % du MGA, soit la moyenne de 33 % pour ceux qui gagnent plus de 50 % du MGA et de 25 % pour ceux qui gagnent moins de 50 % du MGA. L'intention du ministre était de permettre à ces derniers de continuer à recevoir le SRG, donc de faire payer par le fédéral, plutôt que par le RRQ, une partie des coûts de retraite de cette catégorie de personnes.

Puisqu'aucun autre gouvernement n'a adhéré à sa proposition et qu'il s'est retrouvé de nouveau isolé à la commission parlementaire de janvier dernier, le ministre Leitão aurait finalement opté lui aussi pour l'Option RPC. D'ailleurs, c'est ce que les syndicats, les associations de retraités et quatre experts (Alban D'Amours, président d'un comité d'étude sur la question, le fiscaliste Luc Godbout et les actuaires René Beaudry et Bernard Morency) lui avaient alors suggéré de faire, à défaut d'améliorations plus importantes.

L'Option RPC est un excellent compromis. Elle est peu coûteuse, n'ajoutant que 240 $ de cotisation au salarié et à l'employeur par rapport à la proposition du ministre Leitão. Or, elle augmente la rente annuelle de 2 176 $. C'est un ratio de 9 pour 1 au lieu de 5 pour 1 avec 1e régime actuel. Pour un employé au salaire minimum, la cotisation de l'employeur s'accroîtra de moins de 0,02 $ l'heure après impôt.

Les salariés gagnant moins de 20 000 $ seront protégés financièrement, car ils bénéficieront de la prestation fiscale pour le revenu du travail du fédéral. Autre avantage : puisqu'elle sera capitalisée à 100 %, la nouvelle rente respecte le principe de l'équité intergénérationnelle.

Espérance de vie de 104 ans

La réforme envisagée n'est pas un luxe. Selon l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), les États doivent viser à fournir à leurs retraités l'équivalent de 70 % de la rémunération gagnée au travail, ce qui n'est pas le cas pour la grande majorité des salariés. En se basant sur cet objectif, un récent rapport (We'll Live to 100 - How Can We Afford It ?) du Forum économique mondial sur les besoins de revenu des futurs retraités dans huit pays, dont le Canada, estime à 2,7 trillions de dollars américains (3 500 milliards de dollars canadiens) l'insuffisance actuelle des besoins financiers des Canadiens à la retraite. Cet écart atteindrait 17 400 milliards de dollars canadiens en 2050. Ces données tiennent compte du vieillissement rapide de la population et de l'accroissement de l'espérance de vie. On estime en effet que 50 % des enfants nés en 2007 vivront jusqu'à 104 ans et plus. C'est dire la pression qui s'exercera sur les économies pour assurer les retraités d'une sécurité financière.

La réforme du RRQ et du RPC et nécessaire. Certes, elle obligera les employeurs à en faire un peu plus pour aider leurs salariés à préparer leur retraite et elle forcera ces derniers à épargner davantage. Nos retraités seront ainsi moins dépendants de l'État et ils auront un meilleur pouvoir d'achat pour contribuer à l'économie.

Il faut voir un régime de retraite comme un investissement, non comme une dépense ou une taxe.

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À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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