Donald Trump. (Photo: Getty)
Les Américains ont commis l’impensable : élire à la présidence de leur pays un électron libre qui n’a aucune expérience politique, diplomatique et militaire.
Qui plus est, Donald Trump, 70 ans, est imprévisible, narcissique, manipulateur, menteur, xénophobe, sexiste et vulgaire. Il ne fait qu’à sa tête, insulte tous ceux qui se mettent en travers de son chemin et ne respecte pas les conventions.
Le futur président du plus important pays démocratique se retrouvera en conflit d’intérêts parce qu’il possède des centaines d’immeubles, des hôtels et des entreprises commerciales valant plusieurs milliards de dollars. Ses rapports avec le fisc sont troubles et il n’a pas rendu publique se dernière déclaration d’impôt, contrairement à la pratique des candidats à la présidence depuis plusieurs décennies. Il semble entretenir des relations avec des milieux financiers étrangers et vraisemblablement d’origine russe, une information qui prend beaucoup d’importance compte tenu de l’énorme pouvoir politique et économique qu’il détiendra à compter de janvier.
Répudiation de l’establishment
Son élection à la présidence s’explique par la répudiation de l’establishment politique et financier de leur pays par des millions d’Américains qui se sentent abandonnés par les dirigeants politiques et exploités par les milieux financiers. Sans aide de l’État, plusieurs millions d’Américains vivent dans la pauvreté après avoir perdu leur emploi et leur maison à la suite de la grande récession de 2008 et 2009.
Cette récession, la pire depuis les années 1930, fut le produit de deux grands facteurs: 1. la déréglementation par Washington des activités financières des banques qui ont pu créer des produits financiers toxiques qui auraient causé leur propre perte sans l’aide de l’État et qui ont fait perdre des centaines de milliards au peuple américain; 2. l’immoralité des grands banquiers qui s’en mettent plein les poches, utilisent des stratagèmes illégaux, font du blanchiment d’argent et ne sont jamais accusés même si leurs institution finissent par payer des centaines de millions de dollars et même des milliards de dollars d’amendes et autres pénalités. «Le meilleur moyen de voler une banque est d’en posséder une», a écrit William K. Black, avocat, économiste, spécialiste de la criminalité bancaire et professeur à l’université du Missouri.
Des tactiques étudiées
Il peut paraître élitiste de dire cela, mais Trump a fait le plein de ses électeurs parmi les «hommes blancs en colère», les riches qui ont la phobie des impôts, les défenseurs d'armes à feu, les petites gens, les peu scolarisés, les habitants des régions rurales, les gens qui ont peur des immigrants, les misogynes et les chrétiens évangéliques. C’est à ces clientèles précises que Trump s’est constamment adressé, ne craignant pas de mentir, d’insinuer, d’insulter, d’inventer des complots («les élections sont truquées», a-t-il répété), de dénigrer avec une violence inouïe son adversaire, qu’il a chaque jour traité de menteuse, de corrompue et de méchante. Il a confirmé le dicton «Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose».
Il est certain que le Parti démocrate ne s’est pas aidé en choisissant Hillary Clinton et il aurait probablement mieux fait en sélectionnant Bernie Sanders, qui avait du rallier les jeunes et les partisans désireux d’un changement profond, une clientèle également sollicitée par le représentant républicain.
Même si elle était très qualifiée pour être la présidente du plus puissant pays du monde sur le plan économique et militaire, Hillary Clinton représentait malheureusement l’establishment politique, avait beaucoup d’amis à Wall Street et était associée à la fameuse fondation Clinton, dans laquelle se trouvent des donations de personnes à la réputation douteuse. Et puis, il y a eu l’affaire des courriels sur des affaires de l’État qui ont transité dans son ordinateur personnel dont les médias n’ont pas cessé de parler (à tort?) tout au long de la campagne.
L’éléphant dans un magasin de porcelaine
Donald Trump apparaît comme un éléphant entrant dans un magasin de porcelaine. N’ayant aucune expérience de la gestion d’un État, n’ayant aucun contact dans les milieux diplomatiques, ayant fait des promesses à l’emporte pièce sur des questions importantes (libre-échange, déportation d’immigrés, rejet de l’Obamacare, révision du financement de l’OTAN, construction d’un mur avec le Mexique, etc.) et ayant suscité d’énormes espoirs chez les écoeurés du système, il faudra voir comment le futur président arrivera à se sortir de ses engagements, qu’il a généralement pris de façon catégorique.
Verra-t-on Donald Trump mettre de l’eau dans son vin? Probablement, et il faut l’espérer. Par ailleurs, il aura sans doute l’appui du Congrès, ce qui n’est pas rassurant, étant donné que le Parti républicain est de plus en plus manipulé par le Tea Party, son aile radicale de droite.
Il n’est pas étonnant que l’élection de Trump ait été bien accueillie dans les pays totalitaires et par les partis politiques nationalistes et xénophobes d’autres régions du globe.
Malheureusement, pour les partisans d’un monde plus pacifique («pourquoi avoir l’arme nucléaire si on ne l’utilise pas?», a-t-il déjà dit), plus juste (il veut baisser l’impôt des riches) et plus responsable sur le plan environnemental (il ne reconnaît pas les changements climatiques et il veut rouvrir les mines de charbon), l’élection de ce personnage égocentrique et imprévisible n’a absolument rien de rassurant.