Retour sur le potentiel du Plan Nord


Édition du 29 Mars 2014

Retour sur le potentiel du Plan Nord


Édition du 29 Mars 2014

Le Plan Nord peut-il être relancé, et les investisseurs en tirer d'importants bénéfices ?

Avec la campagne qui bat son plein, et le Parti libéral du Québec qui fait du projet un élément phare de son programme, l'idée nous est venue de reconsidérer son potentiel.

Beaucoup de choses ont été dites sur les difficultés des minières et la chute des investissements dans le nord. Essentiellement cependant, une situation d'exubérance a tout simplement implosé. L'indice des prix des métaux produits au Québec (IPMPQ) est passé d'un sommet de 283 points, en août 2011, à 200 points en janvier 2014. La baisse est de 30 %, d'où le refroidissement d'enthousiasme.

Jetons néanmoins un coup d'oeil sur le potentiel des plus importants secteurs.

Le fer

Ce secteur est l'épine dorsale de l'industrie minière au Québec, avec IOC (Rio Tinto), ArcelorMittal et Cliffs Natural Resources, qui ont d'importantes mines dans la fosse du Labrador. Et des sociétés plus petites comme Adriana ou New Millennium, qui ont des projets plus au nord.

Les derniers jours ont été volatils pour ce qui est du prix du fer, alors que des données en provenance de la Chine montrent un recul des exportations de 18,1 % en février. De quoi remettre en doute la croissance de 7,5 % du PIB initialement anticipée par les analystes pour 2014. Le prix du fer étant fortement corrélé à la croissance du PIB, celui-ci a chuté le jour-même de cette annonce de plus de 8 %.

L'avenir est incertain pour le secteur. Marchés mondiaux CIBC note que plusieurs projets sont dans les plans au Brésil et en Australie sur l'horizon 2014-2020. À eux seuls, ils devraient ajouter l'équivalent de près de 50 % de la demande mondiale actuelle. En raison des concentrations de fer, ces projets seront plus rentables que ceux du Canada, et nettement plus rentables que les mines chinoises. Des installations chinoises devraient fermer, mais la situation n'envoie pas un très bon signal à l'égard d'importants nouveaux investissements au Québec.

Qui plus est, on a toujours en mémoire une étude de 2011 de la Deutsche Bank, qui plaçait vers 2017 le sommet de la consommation de fer de la Chine. Avec environ 12 % du PIB et 20 % de la population mondiale, le pays compte pour 50 % de la demande mondiale en acier. Cette demande est insoutenable à long terme. La maison voyait à l'époque le prix tomber à 80 $ US la tonne vers 2017 (il est à 110 $ US actuellement).

La firme Wood Mackenzie croit plutôt que le sommet de consommation ne sera pas avant 10 ans. Même dans ce cas, avec tous les projets annoncés, il est difficile de voir un bon signal pour le prix du fer dans les prochaines années.

Le prix de l'or

Le secteur aurifère est un autre important contributeur à l'économie québécoise, avec des mines comme Malartic (Osisko), LaRonde, Lapa (Agnico), WestWood (IamGold) et le projet Éléonore (Goldcorp). Il y a plusieurs autres mines de plus petite envergure et de nombreux projets de junior.

Comme c'est le cas pour le fer, tout dépendra ici du prix du métal précieux. Il est très difficile de prédire quelle sera la valeur fondamentale de l'or au cours des prochaines années. D'ordinaire, une appréciation du dollar américain n'est pas très favorable. Et les indications de hausse de taux d'intérêt aux États-Unis laissent entrevoir une appréciation du billet vert.

Les fondamentaux ne semblent pas aussi mauvais que dans le secteur du fer. Des projets devraient voir le jour.

On n'irait cependant pas jusqu'à dire qu'il est temps pour l'investisseur de se positionner.

Prometteur, le nickel

Quelques projets intéressants pourraient venir s'ajouter à la mine Raglan (XStrata), dans l'extrême nord du Québec. On peut penser aux projets Dumont (Royal Nickel) et Nunavik Nickel (privé).

D'autant que le secteur est pour l'instant celui qui donne le signal le plus intéressant.

Le prix moyen du nickel s'est établi à 15 023 $ US la tonne l'an dernier, une chute de 14 % par rapport à 2012. Le prix a encore reculé en début d'année à 14 100 $ US. Cela fait en sorte que 30 % des producteurs ont des coûts supérieurs au prix de la matière.

Il vient cependant de rebondir à plus de 16 000 $ US la tonne en raison des risques de sanctions contre la Russie (17 % de la production mondiale), et, surtout, en raison de la décision de l'Indonésie de ne plus exporter de nickel. L'Indonésie pèse pour environ 20 % de la production mondiale du métal. Elle fait deux paris : que les prix monteront et compenseront en partie la perte de volumes ; que les transformateurs viendront s'installer chez elle pour obtenir du minerai à meilleur prix.

Les stocks sont cependant très élevés (262 millions de tonnes comparativement à 86 M en 2012). Il reste à voir si les prix grimperont suffisamment pour que le pari soit rentable.

C'est possible. Curieusement, la meilleure alliée du Plan Nord pourrait être l'Indonésie.

françois.pouliot@tc.tc

Chroniqueur

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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