Prix de l'or : le nouveau complot


Édition du 15 Février 2014

Prix de l'or : le nouveau complot


Édition du 15 Février 2014

Le prix de l'or est actuellement manipulé par les banques centrales qui font face à une importante pénurie du précieux métal. L'opération ne pourra toutefois résister encore bien longtemps, et le cours de l'or devrait rebondir en 2014.

Telle est la théorie d'Eric Sprott, fondateur bien connu de Sprott Asset Management, une maison canadienne qui investit abondamment dans les métaux précieux. C'est notre collègue Dominique Beauchamp qui a attiré notre attention sur sa sortie curieusement peu médiatisée, il y a quelques jours.

Le dernier signe de cette manipulation, dit le gestionnaire, est survenu au milieu d'août 2013, avec la décision de la Banque centrale de l'Inde de bannir toute importation de pièces d'or ou de médaillons et de forcer les acheteurs locaux à payer comptant. Dans les mois précédents, le gouvernement indien avait progressivement instauré des droits d'importation sur l'or qui a atteint 8 % au moment du bannissement.

Officiellement, le gouvernement indien dit avoir agi ainsi parce que la ferveur des Indiens pour le métal augmentait le déficit commercial du pays et mettait de la pression sur la roupie.

Douteux, rétorque M. Sprott. La balance commerciale n'est pas le véritable motif. Le gouvernement aurait pu agir bien autrement pour régler son problème. La Suisse, par exemple, un autre important importateur d'or, ne considère pas le métal comme un «bien», mais comme un outil d'investissement, et elle dévoile sa balance commerciale sans y inclure les métaux précieux.

La raison du bannissement, plaide-t-il, est plutôt qu'il y a présentement un manque flagrant d'or physique sur le marché, et qu'en raison de la chute des prix, les Indiens achetaient trop massivement. En mai, tandis que l'once d'or décrochait, l'Inde avait importé 162 tonnes à elle seule, et ce, au moment où la production mondiale mensuelle n'était que de 182 tonnes.

Le gestionnaire avance quelques exemples qui donnent à penser que le marché a un problème d'approvisionnement physique.

- En janvier 2013, la banque centrale d'Allemagne annonce qu'elle va rapatrier son or des voûtes de la Fed à New York. Un total de 300 tonnes sur les 6 200 que dit détenir l'institution. Une opération qui devrait normalement se faire relativement aisément. Mais la Bundesbank annonce du même souffle que le retrait s'effectuera sur sept ans. Si l'or est vraiment dans les voûtes, ne devrait-on pas être en mesure de le transférer plus rapidement ? Il ne s'agit en fait que de 4,8 % du tout.

- En mars 2013, ABN Amro annonce à ses clients aurifères que le retrait d'or physique de leur compte sera désormais impossible.

- En avril 2013, des échos de presse font état de retraits massifs d'or physique chez UBS et Scotia.

- Quelques jours plus tard, l'expert aurifère Jim Sinclair indique qu'un de ses amis s'est vu refuser un retrait d'or physique d'une banque suisse (et a été dédommagé en numéraire), conformément à une directive de la banque centrale suisse.

Pour M. Sprott, il est clair que la situation actuelle est orchestrée par les autorités monétaires des différents pays. Elles cherchent à faire tomber le prix de l'or pour que les investisseurs liquident leurs positions et augmentent la liquidité du marché. Jusqu'à présent, la chose a fonctionné, alors que les Fonds négociés en Bourse (des FNB qui détiennent de l'or et émettent des unités dont la valeur est équivalente à celle de l'actif) ont vu les investisseurs liquider leurs participations. Mais la chose ne peut durer encore longtemps puisque, au rythme actuel (930 tonnes par année), ils seront vides dans moins de deux ans.

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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