Le CRTC refuse d'approuver le mariage de BCE et Astral. Une surprenante décision, qui est la bonne, et que le gouvernement Harper ne devrait pas renverser.
Il y a quelques années, l'organisme réglementaire avait adopté des balises afin de permettre aux acteurs de l'industrie de mieux voir si d'éventuelles fiançailles recevraient une bénédiction finale.
Il y était notamment prévu qu'une transaction serait assez rapidement approuvée si une seule partie contrôlait moins de 35% de l'auditoire, et qu'un examen plus attentif surviendrait si elle contrôlait entre 35 et 45%.
Sous ce critère, on aurait pu croire que la transaction serait approuvée. La part du marché télé francophone éventuellement contrôlée par BCE-Astral se serait élevée à 33%: sous la marque de l'approbation rapide. Celle sur le marché anglophone était plus délicate, à 42,7%. Plusieurs croyaient cependant que, dans le pire des cas, le CRTC forcerait la vente de quelques stations anglaises et, au final, bénirait le mariage.
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L'organisme réglementaire a plutôt décidé de revenir à son principe de base: l'intérêt public. Et, à partir de là, de regarder plus largement: "Compte tenu de la nature et de la taille de la transaction proposée, le Conseil estime qu'il doit baser son analyse sur des indicateurs multiples relatifs à l'exercice du pouvoir dans le marché, à la concurrence et à la concentration de propriété plutôt que de tenir compte seulement des seuils de parts de marché de la télévision…", écrit-il.
L'organisme précise que la convergence, l'intégration et l'envergure pourrait mener à une situation où la taille d'une entité au niveau national devient si importante qu'elle nuit à une concurrence efficace et saine entre les acteurs canadiens. Il conclut en mentionnant que Bell n'a pas fait la preuve que les avantages amenés par la transaction étaient supérieurs aux craintes qu'elle occasionne.
Au nombre des menaces concrètes, on notera que l'organisme redoute que BCE n'abuse de sa forte position pour vendre à sa division de distribution ses signaux télés à un prix inférieur à celui auquel elle le vend aux autres. Ou encore qu'elle ne limite l'accès des distributeurs à ses contenus. Et ce, malgré les mécanismes d'arbitrage qui sont en place pour solutionner pareille situation.
La décision risque de faire beaucoup de vagues dans les prochains jours, mais elle est la bonne.
Au Québec, autoriser cette transaction avait pour effet de donner les clefs de la culture à un trop petit nombre d'acteurs.
L'organisme réglementaire fait bien d'élargir ses considérations. Particulièrement alors que des joueurs comme BCE (evenko) et Québecor deviennent de plus en plus des producteurs culturels. Déjà une erreur a été commise avec Québecor. On était en train d'en commettre une seconde en dotant BCE d'un formidable arsenal de promotion, mais aussi de destruction de la concurrence et de la diversité.
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