François Pouliot: budget Flaherty; continuez de prier, contribuables

Publié le 13/10/2010 à 10:00, mis à jour le 13/10/2010 à 10:58

François Pouliot: budget Flaherty; continuez de prier, contribuables

Publié le 13/10/2010 à 10:00, mis à jour le 13/10/2010 à 10:58

Le ministre des Finances du Canada, Jim Flaherty. Photo : LesAffaires.com

Blogue. Tiens, tiens, voici M. Flaherty qui devient plus…conservateur.

Au lendemain du budget, le printemps dernier, nous avions titré une chronique "Fonctionnaires, grognez; contribuables, priez".

PLUS: Mise à jour du budget fédéral : un déficit plus important que prévu

La mise à jour budgétaire présentée mardi par Jim Flaherty nous conforte dans notre position de l'époque.

L'an dernier, le gouvernement a fait un déficit de 3,4% plus élevé que ce qu'il anticipait (55,6G$ c. 53,8 G$). Cette année le déficit sera de 8,4% moindre que prévu (-45,4 G$ c. -49,2 G$), mais pour l'an prochain et les suivantes, les anticipations sont de loin moins bonnes que ce qui était attendu. En 2011-12, le déficit sera 8% supérieur à la prévision (29,8G $ c. 27,6 G$), en 2012-13 il sera de 21% supérieur à l'attente (21,2 G$ c. 17,5 G$) et en 2013-14 il sera de 35% supérieur à l'attente (11,5 G$ c. 8,5 G$).

Notre réserve de l'époque ne touchait pas l'exercice fiscal actuel, mais les suivants.

Pour établir ses cibles de déficit budgétaire, M. Flaherty s'était appuyé sur la moyenne des prévisions du secteur privé. Ce n'était pas déraisonnable, mais ce n'était pas non plus conservateur, en raison de la fin des programmes de stimulation et de l'optimisme de beaucoup d'économistes.

Le voilà maintenant qui introduit plus de conservatisme quant à la progression à venir du PIB. C'est ce qui explique en grande partie l'accroissement des déficits sur la période.

Suffisamment conservateur monsieur Flaherty?

Malheureusement non. Il tablait pour 2012 sur un PIB en croissance nominale de 5,7%, il ne ramène l'hypothèse qu'à 5,2%; pour l'exercice suivant la croissance est ramenée de 5,5 à 5,1%, et pour l'autre de 5% à 4,7%.

Toujours donc, le gouvernement du Canada table sur une reprise économique en "V" assez prononcée pour le pays.

C'est encore un peu trop optimiste.

Il y a plus…

D'autant que la mise à jour suit de quelques mois le dépôt de pronostics beaucoup moins optimistes de la part du directeur parlementaire du budget, Kevin Page. Le directeur parlementaire est un indépendant chargé de donner son avis sur les finances fédérales.

Sur la base des mêmes prévisions de croissance économique, M. Page prévoyait en mars des trous nettement plus profonds que ceux annoncés par le gouvernement. Ainsi, pour 2013-14, plutôt qu'un déficit de 8,5G$, il anticipe 16,5 G$. Pour l'année suivante, plutôt que -1,8 G$, il voit -12,3 G$.

Avec les nouvelles prévisions de PIB d'Ottawa, les chiffres du directeur parlementaire vont probablement prendre encore plus de rouge. Son modèle ne voit en effet pas rentrer autant de revenus que celui du gouvernement, malgré les mêmes hypothèses économiques.

Comme si ça ne suffisait pas, il voit aussi pendant ce temps les dépenses des programmes sociaux connaitre une croissance supérieure aux attentes. Même choses pour le coût de la dette.

Restons en prières

La difficulté avec le budget Flaherty, c'est que malgré la mise à jour, il apparaît toujours optimiste au plan des revenus et des dépenses.

Pour atteindre les cibles, il faudra en outre vraisemblablement retrancher l'équivalent de 15% de la masse salariale de l'État dans les prochaines années. Tout simplement parce que le gouvernement a promis de ne pas couper à peu près partout ailleurs.

Ce n'est pas une petite commande.

Comme le gouvernement aura beaucoup demandé à ses fonctionnaires, et ne voudra probablement pas couper les vivres aux provinces et aux bénéficiaires de ses programmes, on voit rapidement que le risque est toujours assez important de voir le contribuable être appelé à contribuer dans les prochaines années.

Restons en prières…

 

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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