Faut-il miser sur Tim Hortons et Burger King ?


Édition du 22 Octobre 2016

Faut-il miser sur Tim Hortons et Burger King ?


Édition du 22 Octobre 2016

La question nous est venue récemment, après une visite chez Tim Hortons. Le café n'est pas notre tasse. Dans le passé, nos visites n'y avaient qu'une fin alimentaire et, chaque fois, l'hésitation face au menu était arbitrée par un seul critère de sélection : quel sandwich est le moins mauvais ?

Les choses ont néanmoins changé, et les délibérations sont aujourd'hui nettement plus positives : hum, lequel prendre, plus d'un est tentant...

Il y a quelques jours, une analyse détaillée de Marchés mondiaux CIBC, tombée sur le bureau, allait relancer la réflexion.

L'analyste Mark Petrie ne voit pas Restaurant Brands International (QSR, 57,55 $) - la société mère de Tim Hortons et Burger King - dans sa soupe, mais estime que le marché évalue mal son potentiel et n'a pas encore compris qu'une importante valeur sera bientôt démasquée.

Les résultats depuis l'acquisition de Tim Hortons par Burger King (il y a un peu plus de 18 mois) sont nettement supérieurs à ce que l'on envisageait au départ.

3G Capital, l'artisan de la transaction, avait la réputation d'être un «sabreur de coûts» aveugle et sans sentiment, ce qui pouvait ne pas être sans conséquence sur l'offre de produits et services. Des analystes redoutaient que des décisions expéditives ne fassent baisser la popularité de Tim Hortons et que les relations se détériorent éventuellement avec les franchisés.

Tel n'a pas été le cas. Voici les résultats des trimestres de Restaurant Brands depuis l'acquisition qui a donné lieu à sa fondation :

> T1 2015 : consensus battu par 13 % ;

> T2 2015 : consensus battu par 29 % ;

> T3 2015 : consensus battu par 17 % ;

> T4 2015 : consensus battu par 17 % ;

> T1 2016 : consensus battu par 36 % ;

> T2 2016 : consensus battu par 17 %.

En moyenne, les attentes sont dépassées de 22 %. Là ne s'arrête pas la performance : la rentabilité chez les franchisés est meilleure qu'auparavant. Cette performance peut-elle se poursuivre ?

Chaque tour de manivelle appliqué aux coûts rend le suivant plus difficile. Viendra forcément un moment où la création de valeur par réduction de coûts ralentira.

Mieux vaut s'assurer de la capacité des deux enseignes à multiplier les points de vente et à créer de la valeur grâce aux ventes. Tim Hortons compte actuellement 4 596 établissements en exploitation, tandis que Burger King en recense 15 788.

Chez Burger King, la croissance annuelle du nombre de restaurants est de 5 % depuis 2011. Il est difficile de savoir quand la limite sera atteinte, mais il ne semble pas trop audacieux de dire que cette croissance devrait se poursuivre pour encore quelques années. Peut-être à un régime légèrement plus faible, mais quand même.

Chez Tim Hortons, la croissance annuelle a été un peu plus lente, avec un rythme de 3,5 à 4 % depuis 2013. M. Petrie voit cependant celle-ci s'accentuer à compter de 2017, avec un bond prévu de 7,8 %, grâce à l'accélération du déploiement à l'international. À la fin de 2016, Tim devrait compter 870 établissements à l'extérieur du Canada. Il est intéressant de constater que Dunkin Donuts en exploite environ 3 000 et, selon les calculs de l'analyste, qu'elle prévoit une capacité internationale de 6 000 dans les prochaines années.

Résultat des courses : encore un peu de croissance à venir du côté de la diminution de coûts, une expansion qui semble porteuse pour les deux enseignes et une bonne direction qui sait ce qu'elle fait. Reste à voir l'évaluation du titre. Pour s'assurer que le marché ne paie pas trop cher actuellement et qu'on ne se retrouvera pas avec une forte correction lors d'un faux pas. Car faux pas il y aura assurément dans le processus d'expansion, à un moment ou à un autre dans l'avenir. Si l'évaluation est faible, le recul sera faible, si elle élevée, il risque d'être fort.

Ce que le marché ne perçoit pas

Avant d'y venir, voyons cependant ce que le marché ne voit pas actuellement. Cette valeur masquée à laquelle CIBC fait allusion, histoire de tout avoir en main.

Cette valeur a en fait un nom : Buffett.

Lors de l'acquisition de Tim Hortons, l'Oracle avait participé au financement de l'entreprise avec des actions privilégiées offrant un rendement de dividende de 9 %.

À compter du 12 décembre, ces actions deviennent rachetables. Or, les différentes débentures de Restaurant Brands se négocient à des taux qui varient de 2,82 % à 4,08 %. Vous voyez la récupération possible. Concernant les flux de trésorerie, dans le moins bon des scénarios, c'est une augmentation potentielle de 200 M$ ou, si on préfère, une hausse de 19 % de ce que prévoyait l'analyste pour 2017. Par rapport au bénéfice d'exploitation, c'est au minimum 10 % de plus que ce qui était attendu.

Voyons maintenant l'évaluation

En ajustant ses prévisions pour exclure les charges d'amortissement et en intégrant l'effet du rachat de Buffett, M. Petrie note que le titre se négocie actuellement à 18 fois le bénéfice qu'il anticipe pour 2018. À titre de comparaison, Dunkin, Popeyes et Dominos, trois franchiseurs importants, se négocient respectivement à 21, 22 et 34,9 fois le bénéfice prévu pour 2017 (également ajusté en retirant l'amortissement).

Il estime que les perspectives de croissance de ces sociétés sont moins bonnes que celles qui concernent Restaurant Brands et qu'en 2018, un multiple de 22 devrait en conséquence être appliqué au bénéfice qu'il prévoit. C'est une cible à 72 $ sur un an ou, si on préfère, un rendement de plus de 20 % par rapport au cours actuel.

Achat ?

Le raisonnement pourrait bien fonctionner, mais nous sommes dans un univers de multiples relativement élevés (compte tenu des ajustements d'amortissement) et donc plus à risque de correction. Peut-être pour une petite portion de portefeuille, si on a les moyens de rester sur son appétit.

Sur le radar - Restaurant Brands International (QSR, 57,55 $)

Le titre sur un an

Les recommandations des analystes qui suivent le titre de Restaurant Brands International

> 8 Conserver

>  4 Surperformance

Cours cible : 61,90 $

Source : Bloomberg

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

Blogues similaires

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.

Shopify: prochaine victime de la malédiction boursière canadienne?

BLOGUE INVITE. Shopify est-elle différente des Nortel, Research in Motion, Valeant, Barrick Gold et autres?