(Photo: Bombardier)
Bombardier a-t-elle réellement besoin d’obtenir 1 G$ supplémentaire?
Le gouvernement du Québec est venu jeter beaucoup d’interrogations, mercredi, lorsque la CAQ a demandé au ministre Jacques Daoust s’il avait un plan B dans l'éventualité où Ottawa décidait de passer son tour et n’aidait pas Bombardier. Monsieur Daoust y est allé de cette réponse : «On est dans des discussions avec Bombardier et on regarde de très près ce qui se passe avec le gouvernement fédéral. Et si, au 31 mars, il n’était pas présent, le gouvernement du Québec aura une décision à prendre. Mais on a toujours appuyé Bombardier, c’est un fleuron de notre économie et on va continuer à le faire.»
L’affirmation a immédiatement été interprétée comme quoi Québec allait assumer la contribution demandée à Ottawa si le fédéral disait non. Le personnel politique de monsieur Daoust a cependant plus tard indiqué qu’il n’était pas question que Québec remette d’argent dans le CSeries.
Qu'en comprendre? Besoin ou pas besoin de 1 G$ supplémentaire?
La confusion est importante.
En octobre, lors de la prise de participation de 1G$ US (1,3 G$ CAN) de Québec dans la société en commandites du CSeries, Bombardier avait indiqué qu'elle avait désormais suffisamment d'argent pour mener à terme tous ses programmes actuellement en développement. Le PDG Alain Bellemare avait même indiqué que l'essaimage de Bombardier Transport, qui était planifié pour plus tard (et a depuis été réalisé avec la Caisse de dépôt), allait être "le coussin de liquidités qui permettrait de supporter le ralentissement économique, si jamais il y en a un".
Il semble cependant qu'avec le passage du temps, Bombardier soit devenue un peu plus nuancée sur ses besoins en liquidités.
Un analyste de Canaccord rapporte qu’à la journée des investisseurs, fin novembre, la direction a indiqué qu’elle poursuivait ses discussions avec le gouvernement du Canada et qu’une injection supplémentaire pourrait aider parce que cela rendrait les clients plus confiants que l’avionneur sera encore en affaires dans l’avenir pour livrer les CSeries et assurer le service.
En tenant compte des financements de débentures, Bombardier compte actuellement sur des liquidités de 6,5 G$ US. Celles-ci devraient être à 3,5 G$ US en 2018, date où les plus importants investissements auront été effectués. Le niveau jugé adéquat est apparemment autour de 3 G$ US lorsqu’il n’y a pas d’importants programmes de développement, selon des analystes.
En apparence, il n'y a pas de difficultés.
La projection table cependant sur des commandes de jets régionaux qui ne baisseraient pas, ce qui est devenu plus douteux dans les dernières semaines. Et 3 G$ US de renouvellements de prêts viennent à échéance entre 2018 et 2020. Il semble y avoir assez d’espace, mais pour une société aérienne qui se commet sur un nouveau type d’appareils, ça peut en effet être jugé serré. Le transporteur ne veut surtout pas courir le risque de manquer éventuellement de pièces parce qu'un important imprévu se serait présenté et que le projet n'aurait pas fonctionné.
Morale de l'histoire?
Le 1 G$ n'est peut-être pas nécessaire pour terminer le développement, mais il pourrait bien faire une importante différence dans la réussite ou non du programme. Si à la fin de 2017 le milliard de Québec a été brûlé et qu'il n'y a pas eu de commandes significatives supplémentaires, rien ne garantit que Bombardier ne décidera pas de tirer la plogue plutôt que d'amener le milliard qu'elle doit fournir en relais.
Sans le milliard d'Ottawa, le programme semble toujours à risque.
Ce pourrait bien être le constat auquel en est venu monsieur Daoust mercredi, se disant plus ou moins intérieurement qu'il faudrait peut-être éventuellement en remettre bientôt un deuxième pour sauver le premier.
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