La Russie peut-elle stabiliser la Syrie?

Publié le 10/10/2015 à 09:03

La Russie peut-elle stabiliser la Syrie?

Publié le 10/10/2015 à 09:03

ANALYSE DU RISQUE - L'intervention militaire de la Russie en Syrie pour soutenir le régime de Bachar Al-Assad a pris de court les États-Unis et leurs alliés. Moscou affirme intervenir pour stabiliser la Syrie et le Moyen-Orient. Les Russes peuvent-ils vraiment y arriver?

Chose certaine, l'entrée en jeu de la Russie dans la guerre civile syrienne vient de complexifier un conflit dans lequel plusieurs pays de la région s'y affrontent déjà indirectement par alliés interposés.

Au premier chef, l'Iran chiite, qui soutient le régime alaouite d'Al-Assad (une branche du chiisme) et l'Arabie saoudite sunnite, qui veut sa chute pour le remplacer par un régime sunnite.

Et c'est sans parler de l'État islamique (EI), une organisation sunnite qui contrôle l'est de la Syrie, ennemi juré de l'Iran et de l'Arabie saoudite, que veut aussi abattre la coalition dirigée par les États-Unis - dont fait partie le Canada.

Aussi, la stabilisation de la Syrie est encore bien loin d'être à portée de main à court terme, affirment des analystes.

Une situation qui représente un risque géopolitique majeur pour les investisseurs exposés aux marchés du Moyen-Orient.

Comment sera affectée l'économie régionale? Comment se comporteront les marchés financiers? Les millions de réfugiés syriens répartis dans les pays voisins déstabiliseront-ils des États déjà instables comme le Liban?

Autre question fondamentale: mais que cherche donc à faire Vladimir Poutine en Syrie?

À vrai dire, Moscou a plusieurs objectifs.

- la Russie veut éviter la chute de son indéfectible allié Bachar Al-Assad, ce qui lui permet d'avoir une présence et une influence au Moyen-Orient.

- la Russie veut empêcher une déstabilisation accrue de la région que provoquerait le renversement du régime Al-Assad. Selon Moscou, le renversement de Saddam Hussein en Irak (en 2003) et de Mouammar Kadhafi en Libye (en 2011) montrent que les changements de régime aggravent la situation.

- la Russie affirme vouloir combattre «les terroristes» qui pourraient un jour perpéter des attaques en territoire russe, ce qui inclut l'État islamique et l'opposition au régime Al-Assad.

- la Russie veut montrer qu'elle est une puissance régionale - même si elle n'a plus la force de l'ex-URSS - avec laquelle l'Occident doit composer.

- la Russie veut avancer ses pions au Moyen-Orient au détriment des États-Unis, en montrant aux pays de la région qu'elle est un allié fiable, contrairement à Washington, dont l'ambivalence et le manque de leadership inquiètent.

Il va sans dire que l'intervention russe crée des tensions avec les États-Unis, le Canada, les pays européens, la Turquie (un pays membre de l'OTAN, qui souhaite aussi la chute du régime syrien), sans parler des pays arabes sunnites.

Voici pourquoi.

La Russie met de l'huile sur le feu

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand