La nouvelle concurrence chinoise fera très mal

Publié le 24/06/2017 à 08:00

La nouvelle concurrence chinoise fera très mal

Publié le 24/06/2017 à 08:00

(Photo: 123rf.com)

ANALYSE GÉOPOLITIQUE – La première vague de la concurrence chinoise amorcée dans les années 1990 a fait très mal aux entreprises manufacturières occidentales. Mais nous n’avons peut-être rien vu, car la prochaine vague dans les produits à haute valeur ajoutée risque de faire davantage de ravages.

Made in China 2025. Retenez bien cette expression; vous en entendrez parler de plus en plus dans les prochaines années.

Lancée en 2015 par le gouvernement chinois, cette politique vise notamment à faire de la Chine LA puissance manufacturière mondiale en 2049 en termes de qualité, année où le pays célébrera le centenaire de la fondation de la Chine communiste.

Pékin a entrepris cette réforme ambitieuse parce que l’industrie chinoise perd de sa compétitivité internationale. Et la raison en est fort simple: les salaires en Chine augmentent plus rapidement que les gains de productivité.

En Asie, les investissements directs étrangers (IDE) se déplacement d’ailleurs graduellement vers des pays à plus faibles coûts de production tels que le Vietnam ou le Cambodge.

La Chine est toujours «l’usine» du monde, mais elle risquait de devenir une puissance manufacturière à moyenne valeur ajoutée.

Aussi, ce que souhaitent les autorités chinoises avec le Made in China 2025, c’est que la Chine soit aussi l’endroit au monde où l’on fabrique les meilleurs produits manufacturiers.

Dix secteurs sont prioritaires aux yeux du parti communiste chinois:

1. Les nouvelles technologies de l’information avancées

2. Les machines automatisées et la robotique

3. Le matériel aérospatial et aéronautique

4. Le matériel maritime et le transport de haute technologie

5. Les équipements de transport ferroviaire moderne

6. Les véhicules et les équipements électriques

7. Les équipements de production d’énergie

8. Le matériel agricole

9. Les nouveaux matériaux

10. La biopharmaceutique et les produits médicaux avancés

On constate rapidement que ces secteurs sont stratégiques dans la plupart des pays développés.

Par exemple, au Canada, la grappe de l’aérospatial -concentrée au Québec- sentira de plus en plus la concurrence chinoise, en Chine, et aussi sur les marchés étrangers.

Les Américains, les Européens, les Japonais et les Sud-Coréens sentiront aussi cette nouvelle concurrence parmi ces dix secteurs.

L’objectif de la Chine est simple: détrôner les Allemands et faire du label Made in China un label aussi fort et synonyme de qualité que le fameux Made in Germany.

La politique du Made in China 2025 s’inspire d’ailleurs de la politique de l’Industry 4.0 (ou la quatrième révolution industrielle) lancée en Allemagne en 2012.

Le plan de match de la Chine

Comment les Chinois comptent-ils devenir les «Allemands» du 21e siècle?

Ils le feront par étapes, en déployant une stratégie à très long terme, un concept souvent étranger à la façon de penser des Occidentaux.

Trois années charnières sont à retenir: 2025, 2035 et 2049.

En 2025, la Chine veut que son industrie manufacturière soit très innovante et très efficace, ce qu’elle n’est pas actuellement.

En 2035, la Chine veut être capable de compétitionner en termes de qualité avec les principales puissances manufacturières des pays développés.

En 2049, la Chine veut être LA puissance manufacturière dominante.

Bien entendu, le Canada et les autres pays développés pourront garder leur industrie manufacturière.

Après tout, nos entreprises ont pu relativement bien résister à la montée en puissance du Japon et de la Corée du Sud dans les niches des hautes technologies dans la deuxième moitié du 20e siècle.

Par contre, elles ont dû s’ajuster, comme elles devront le faire avec la Chine.

Mais la tâche risque d’être beaucoup plus difficile.

Et douloureuse.

 

 

 

 

 

 

À propos de ce blogue

Dans son analyse Zoom sur le monde, François Normand traite des enjeux géopolitiques qui sont trop souvent sous-estimés par les investisseurs et les exportateurs. Journaliste au journal Les Affaires depuis 2000 (il était au Devoir auparavant), François est spécialisé en commerce international, en entrepreneuriat, en énergie & ressources naturelles, de même qu'en analyse géopolitique. François est historien de formation, en plus de détenir un certificat en journalisme de l’Université Laval. Il a réussi le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) de l’Institut canadien des valeurs mobilières et il a fait des études de 2e cycle en gestion des risques financiers à l’Université de Sherbrooke durant 15 mois. Il détient aussi un MBA de l'Université de Sherbrooke. François a réalisé plusieurs stages de formation à l’étranger: à l’École supérieure de journalisme de Lille, en France (1996); auprès des institutions de l'Union européenne, à Bruxelles (2002); auprès des institutions de Hong Kong (2008); participation à l'International Visitor Leadership Program du State Department, aux États-Unis (2009). En 2007, il a remporté le 2e prix d'excellence Caisse de dépôt et placement du Québec - Merrill Lynch en journalisme économique et financier pour sa série « Exporter aux États-Unis ». En 2020, il a été finaliste au prix Judith-Jasmin (catégorie opinion) pour son analyse « Voulons-nous vraiment vivre dans ce monde? ».

François Normand