SST: à qui revient la responsabilité ?

Publié le 01/10/2018 à 11:46

SST: à qui revient la responsabilité ?

Publié le 01/10/2018 à 11:46

« Les gens ne modifient pas leur comportement tant et aussi longtemps que leurs émotions ne sont pas interpelées. » - Jean-Pierre Cantin, responsable SST au Groupe Acier Camnor

À qui revient le rôle de responsabiliser les employés lorsqu’on parle de santé et sécurité au travail en entreprise ? À la haute direction, aux ressources humaines, au comité SST ?

« En fait, c’est l’ensemble de toutes ces réponses, incluant les employés eux-mêmes », a souligné Jean-Pierre Cantin, responsable SST au Groupe Acier Camnor, une entreprise qui compte plus de 250 employés. M. Cantin était l’un des panellistes invités lors de la conférence SST, présentée par les Événements Les Affaires, le 26 septembre dernier, à Montréal.

Jean-Pierre Cantin s’intéresse à l’univers de la SST depuis au moins quinze ans. Pendant toutes ces années, il a analysé et tenté de comprendre ce qui précède un accident en entreprise. Pour l’exercice, il a étudié plus d’une centaine d’accidents. « Pour chacun d’eux, la même réponse est ressortie de la bouche des principaux concernés : je savais que je ne devais pas faire ce mouvement, mais je l’ai fait quand même. »

Pourquoi les gens agissent-ils ainsi, s’est demandé Jean-Pierre Cantin, en tentant d’aller chercher des réponses à plusieurs niveaux, notamment en psychologie du changement, dans le fonctionnement du cerveau. Sa conclusion : les gens ne changent pas de comportement tant et aussi longtemps que leurs émotions ne sont pas interpelées.

Ce constat l’a incité à changer son approche. « Pour tout nouvel employé, nous prenons le temps de présenter la formation d’accueil, les analyses de risques, les outils qui sont à leur disposition et les membres de l’équipe de supervision à qui poser des questions. On a simplifié les documents pour chacun des postes. Une fois que les employés ont tout en main, on leur dit : tu as tout le matériel nécessaire pour prévenir les accidents. Désormais, si tu te fais mal, c’est de ta faute! »

Visez le « zéro accident »

Chez IBM Bromont, la responsabilité est également devenue l’affaire de tous. Ce virage culturel a été entrepris au sein de l’entreprise de Bromont en 2011. « Il se produisait au moins une vingtaine d’incidents par année, dont plus de la moitié était reliée à des causes comportementales », a rapporté Geneviève Gravelle, conseillère en SST, ergonomie et mieux-être de l’entreprise.

Grâce à ce virage SST, il y a eu zéro accident l’an dernier chez IBM Bromont. « Une première en 45 ans d’existence. Et on se dirige vers un bilan sans faute pour 2018 », a souligné l’ergonome.

Ce tour de force repose essentiellement sur l’engagement des employés. Cet engagement s’est instauré au fil de formations, d’analyses et surtout de sondages menés auprès des employés pour connaître leurs mesures de prévention, leurs lacunes et savoir comment l’entreprise pouvait améliorer les situations à risque.

« Aujourd’hui, s’il y a un irritant sur le plancher de production, ce sont les employés eux-mêmes qui, dans plus de 75% des cas, vont régler la situation », a fait savoir Geneviève Gravelle. Selon Jacynthe Curotte, vice-présidente opérations chez Bell-Textron, qui participait à ce panel, un des plus grands enjeux d’une entreprise, c’est la tolérance envers le personnel qui prend des risques. « Cette attitude constitue notre pire ennemi », a-t-elle dit, en ajoutant que les entreprises qui performent sur le plan de la santé sécurité au travail, sont des entreprises qui réussissent en affaire.

Pensez à tous les risques

Même quand on pense avoir passé en revue tous les risques, certains demeurent présents, a soulevé Christian Lessard, directeur de l’entretien à la mine Goldex d’Agnico Eagle. Il a présenté l’implantation de la technologie Rail-Veyor, un système de wagons avec galeries dédiées utilisé à une profondeur de 850 mètres à 1200 mètres dans la mine près de Val-d’Or. « Ce système, qui a coûté près de 50 millions de dollars, a permis de réduire les risques de collisions entre camions et travailleurs, les émanations de gaz et le bruit des moteurs diésel », a résumé l’ingénieur mécanique.

« Bien que l’on ait pris toutes les précautions, les problèmes qui avaient une chance sur 1000 de se produire sont arrivés. On a réalisé que les pneus des wagons laissaient filer une substance visqueuse sur les rails, ce qui engendrait un risque de déraillement. On a également constaté après quelques semaines que les trains bougeaient d’au moins 30 cm lorsqu’ils étaient immobilisés pendant la nuit. Nous avons dû réduire la production de moitié pendant près d’un an le temps de trouver les solutions à ces ennuis. »

Aujourd’hui, on a tourné la page. L’année 2018 devrait même se solder par un record d’extraction, a signalé M. Lessard. Sa conclusion : « Avant d’adopter une nouvelle technologie, n’hésitez pas à investir dans la simulation et les prototypes pour tester le produit. Surtout, prenez le temps de faire une analyse de risques minutieuse. Notre expérience nous a démontré qu’on ne sait jamais ce qui peut survenir. »

À propos de ce blogue

En coulisses est le blogue des Événements Les Affaires. Nous vous proposons un accès privilégié aux meilleures pratiques de la communauté d’affaires québécoises qui sont partagées lors de nos conférences. Chaque semaine, nous discutons avec certains des gestionnaires qui ont accepté d’être conférenciers à nos événements, afin de vous présenter des idées concrètes pour vous aider dans votre réflexion et répondre à vos préoccupations d'affaires.