Prendriez-vous le risque de jouer avec la vie des gens ?

Publié le 09/02/2018 à 13:50

Prendriez-vous le risque de jouer avec la vie des gens ?

Publié le 09/02/2018 à 13:50

Contamination bactérienne ou mécanique, présence d’allergènes, terrorisme alimentaire… Le pire cauchemar des entreprises du secteur alimentaire. Plusieurs prennent les grands moyens pour s’en prémunir.

En novembre et en décembre derniers, deux personnes sont mortes au Canada et aux États-Unis et une soixantaine d’autres ont été malades après avoir consommé de la laitue romaine contaminée par la bactérie E. coli. L’Agence de la santé publique du Canada a recommandé de cesser d’en consommer sans toutefois procéder à un rappel, faute d’avoir identifié la source de la contamination. Le Groupe Restaurants Imvescor n’a pas pris de risques : il a retiré la laitue romaine de ses établissements.

« Quand les gens viennent dans nos restaurants, ils nous accordent leur confiance, a dit Vincent Dugas, son chef de l’exploitation – Achats et ventes au détail, lors de la conférence Sécurité alimentaire, présentée par les Événements Les Affaires le 6 février dernier. Il faut tout faire pour demeurer une destination fiable. Une chaise vide, c’est ce qui coûte le plus cher pour un restaurant. »

Le franchiseur des bannières Pizza Delight, Mikes, Bâton Rouge, Scores et Ben & Florentine, achetés en décembre dernier par le Groupe MTY, a créé une culture de salubrité « Zéro risque » au sein de ses quelque 270 restaurants. Pour y arriver, il est nécessaire de communiquer constamment, d’expliquer aux franchisés pourquoi on fait les choses, d’offrir de la formation et du coaching sur les procédures de salubrité et de « faire ce qu’on dit qu’on fera », a insisté Vincent Dugas.

Deux fois par année, tous les restaurants de la chaîne sont inspectés par la firme Steritech. D’une durée de trois ou quatre heures, l’évaluation comporte 59 éléments : température des aliments et des frigos, produits nettoyants dans les appareils, propreté des surfaces de préparation, port des gants, degré d’usure des planches à découper et autres accessoires, etc. Cet exercice se déroule parfois pendant les périodes occupées « parce que c’est dans les rush, lorsque les restaurants sont bondés, que les problèmes surviennent », a souligné le conférencier.

« Nous expliquons aux franchisés les points à améliorer, mais nous les félicitons aussi pour leurs bons coups, a-t-il poursuivi. L’idée, ce n’est pas de faire la police. C’est d’être partenaire avec les franchisés dans la mise en place des bonnes pratiques. C’est comme ça qu’on développe une culture de la salubrité. »

D’ailleurs, lors de sa soirée de reconnaissance annuelle, Imvescor décerne un trophée au restaurant de chacune de ses bannières ayant obtenu le meilleur résultat à l’évaluation de salubrité. Un honneur presque aussi convoité que celui du restaurant le plus profitable !  

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Comprendre le pourquoi

Vergers Leahy est une autre de ces organisations qui s’emploient à intégrer la sécurité alimentaire à la culture d’entreprise. « La recette gagnante, c’est de donner un sens à tout ce qui concerne le système de qualité, a affirmé Mélanie Lalonde, vice-présidente Assurance-Qualité de la PME de 300 employés. J’aime bien illustrer cela avec l’allégorie des trois tailleurs de pierre. Alors que le premier dit qu’il taille une pierre et le second qu’il construit un mur, le troisième homme met plus d’ardeur à la tâche, car il est en train de bâtir une cathédrale. Il y a un sens à ce qu’il fait. Pour que les employés fassent bien les choses, ils doivent comprendre pourquoi ils le font. »

Ce sont d’ailleurs les employés de production qui ont le plus grand impact sur la qualité des compotes fabriquées par l’entreprise, a-t-elle ajouté. « Ils font partie de la première ligne de défense et, à ce titre, ils sont donc autorisés à prendre des décisions. »

En tant que responsable de la qualité, Mélanie Lalonde se considère comme une sorte de missionnaire qui partage encore et encore sa vision de la qualité. Et pour aider l’équipe de direction tout comme les employés à comprendre leur responsabilité en matière de sécurité alimentaire, elle n’hésite pas à les secouer un peu. Par exemple, elle a fait venir à l’usine un ancien policier américain pour parler de terrorisme alimentaire. Ses histoires de boulangerie industrielle dont les produits ont été contaminés avec du poison à rat ou encore d’individus qui se sont infiltrés dans une usine alimentaire en se faisant passer pour des exterminateurs ont frappé les esprits.

Le prochain projet de Mélanie Lalonde, c’est d’inclure la sécurité alimentaire dans le design même des équipements de fabrication. Pour cela, les ingénieurs de l’usine des Vergers Leahy seront bientôt formés au « design hygiénique ». « Il faut penser au nettoyage dès la conception des équipements. Quand une machine est difficile à nettoyer, c’est un casse-tête pour les opérateurs », a-t-elle conclu.