Le transport en commun, ça rapporte quoi aux villes ?

Publié le 31/10/2018 à 17:48

Le transport en commun, ça rapporte quoi aux villes ?

Publié le 31/10/2018 à 17:48

L’annonce de plusieurs grands projets d’infrastructures, en particulier le projet de tramway, stimule le marché de l’immobilier à Québec. Quels seront les impacts sur le secteur résidentiel de la région marqué par la stabilité depuis plusieurs années ? Jean Dubé, directeur de l’École supérieure d’aménagement du territoire et de développement régional de l’Université Laval, animera une discussion à ce sujet lors de la conférence Marché de l’habitation-Québec, présentée par les Événements Les Affaires, le 5 décembre prochain, à Québec.

Quels seront les impacts possibles du projet de tramway sur l’habitation à Québec ?

Jean Dubé : Depuis 10 ans, j’ai participé à plusieurs études sur la question : à Québec, à Laval ainsi qu’à Dijon, en France, où deux lignes de tramway ont été mises en service depuis 2011. Toutes ces analyses arrivent sensiblement aux mêmes constats. On observe un «effet de cloche» : les gens sont prêts à payer plus cher pour habiter une propriété unifamiliale à une ou deux rues derrière les stations et lignes desservies par les principaux circuits de transport en commun.

Quelles conclusions en tirez-vous ?

J.D : Étant donné que la plupart des valeurs foncières des résidences unifamiliales n’augmente pas à la suite du développement d’un réseau de transport en commun structurant à proximité, plusieurs villes ont l’impression qu’il s’agit plutôt d’une dépense que d’un investissement. L’étude que nous avons réalisée sur la Rive-Sud de Montréal démontre que la construction résidentielle dans le secteur de Saint-Hilaire parvient à couvrir les coûts opérationnels annuels du train de banlieue. Ce n’est toutefois pas le cas pour le secteur de Saint-Jérôme, sur la Rive-Nord.

Comment expliquez-vous cette différence ?

J.D. : Selon nos hypothèses, il pourrait s’agir d’une question de proximité. Le trajet en train est plus court entre Montréal et Saint-Hilaire qu’entre Montréal et Saint-Jérôme. Nous en concluons que le transport en commun doit être compétitif avec celui en automobile individuelle afin d’être considéré comme une bonne option et de stimuler le développement économique d’un secteur.

Qu’en est-il de l’impact économique sur les édifices multilogements et les immeubles à bureaux et commerciaux ?

J.D. : D’autres études, effectuées par d’autres organisations, démontrent que cet impact gagne en ampleur lorsqu’il s’agit de développement de bâtiments multilogements. Ces gains sont encore plus notables pour les baux de location des espaces commerciaux construits à proximité de ces réseaux de transport.

Y a -t-il donc lieu d’être optimiste face au développement du transport en commun ?

J.D. : Les habitudes de transport développées par les citoyens sont très difficiles à changer. Les études ont beau démontrer aux villes les avantages qu’il y a à développer des réseaux de transport en commun structurant, la tendance est encore à aménager des liens routiers. Bien que nos analyses soient rigoureuses et apportent des faits avérés, nos détracteurs, qui croient au développement routier à tout prix, considèrent nos études comme de simples opinions. Une situation frustrante qui illustre combien il y a encore beaucoup d’éducation à faire en matière de transport collectif.