La future Autorité des marchés publics déjà critiquée

Publié le 16/10/2017 à 11:45

La future Autorité des marchés publics déjà critiquée

Publié le 16/10/2017 à 11:45

Comment bien faire les choses après la Commission Charbonneau? Comment parvenir à instaurer une saine concurrence, de l’innovation et de la qualité dans l’octroi des contrats publics?

Parmi les solutions apportées par le gouvernement québécois, on retrouve le projet de loi 108 qui favorisera la surveillance des contrats des organismes publics en plus d’instituer l’Autorité des marchés publics (AMP). Cet organisme aura pour mandat de surveiller l’octroi des contrats publics, incluant les processus d’adjudication et d’attribution de ceux-ci. L’AMP répondra-t-elle pour autant aux problèmes de corruption et de collusion pointés sévèrement du doigt lors de la Commission Charbonneau?

Le folklore du n’importe quoi!

Louis-Yves LeBeau, président de Macogep, en doute fortement. « On assiste actuellement à un folklore incroyable au Québec en matière d’octroi de contrats publics. C’est du n’importe quoi. Et ni la loi 108 concernant la création de l’AMP, ni la loi 122 qui accorde plus d’autonomie aux municipalités ne vont venir régler la situation. Ça prend l’instauration de meilleurs codes afin de mieux standardiser l’octroi de contrats pour chaque type d’infrastructure publique », a insisté M. LeBeau lors du panel de discussion, tenu lors de la 3e conférence Contrats publics, présentée par les Événements Les Affaires, à Montréal, le 11 octobre dernier.

Cet expert en gestion de projet souhaiterait voir le Québec adopter une loi qui s’inspirerait de la loi française sur les infrastructures. Une loi, a-t-il dit, où tout est clair, standardisé pour les infrastructures publiques. Une loi où la séparation des tâches entre ceux qui surveillent et ceux qui réalisent les travaux est nette et précise.

Des plus…et des moins pour l’AMP

À l’opposé, l’Association des constructeurs du Québec (ACQ) voit d’un très bon œil la création de l’AMP. « Cet organisme sera essentiel pour notre industrie », a soulevé Pierre Hamel, directeur des affaires publiques et gouvernementales à l’ACQ lors du même panel de discussion.

Usine 4.0

Il reconnaît toutefois que les pouvoirs de ce nouvel organisme ne sont pas assez étendus. « Chez-nous à l’ACQ, on souhaite que l’AMP puisse surveiller tous les types d’appels d’offres de contrats publics, les grands comme les petits qui manquent la plupart du temps de soutien », a indiqué M. Hamel.

Lyne Parent, directrice générale de l’Association des architectes en pratique privée du Québec, partage, elle aussi, les propos de Pierre Hamel. « Le rôle de l’AMP n’est pas encore assez large. L’AMP doit apporter davantage de soutien aux municipalités au lieu de se limiter à un rôle de surveillance. Elle devrait, à mon avis, constituer un pôle d’expertise en matière d’octroi de contrats publics », a déclaré Mme Parent lors de la discussion.

Des appels d’offres questionnables

Mme Parent a tenu à rappeler que la saine concurrence, ça commence par une compréhension et une bonne connaissance de l’industrie. « Récemment, nous avons vu des appels d’offres provenant de municipalités qui exigeaient parmi leurs critères la norme ISO auprès de nos firmes d’architectes. Seulement 4% des cabinets d’architectures en pratique privée du Québec détiennent cette norme. Ce qui vient d’emblée d’éliminer du processus de sélection plus de 95% des firmes », a rapporté Lyne Parent.

Autre exemple qui ne tient pas la route : des appels d’offres provenant des commissions scolaires qui demandent aux firmes soumissionnaires d’avoir construit au moins six écoles en trois ans. « Le nombre de firmes qui répondent à ce critère se compte sur les dix doigts de nos mains. Autrement dit, ce critère, plus ou moins nécessaire, vient une fois de plus écarter un grand nombre de firmes. Des firmes qui peuvent avoir conçu des plans de cégeps, d’hôpitaux et autres grands projets d’envergure », a poursuivi Lyne Parent.

Même BIG se questionne

Même le bureau de l’inspecteur général (BIG) de la ville de Montréal se questionne sur le futur rôle de l’AMP. Cette organisation municipale, dirigée par l’inspecteur général (et ex-procureur lors de la commission Charbonneau) Denis Gallant effectue déjà la surveillance du processus de passation de contrats publics et l’exécution de ces derniers sur le territoire montréalais. « Le gouvernement nous a assuré que nous conserverions notre autorité. Pour le moment, ma seule critique envers cette nouvelle institution, ce sont ses délais que nous jugeons trop courts pour l’annulation, la résiliation ou la suspension de contrats. Au BIG nous avons fixé ces délais à 45 jours », a mentionné Denis Gallant, inspecteur général de la ville de Montréal.

M. Gallant a indiqué à l’auditoire de la conférence que son organisation a reçu plus de 1000 dénonciations (1060 pour être exact) depuis sa création en 2014. Plus de 500 dossiers d’enquête sont actuellement ouverts.

Pour en apprendre davantage, participez à la conférence Usine 4.0 qui aura lieu le 14 mars 2018.

 

À propos de ce blogue

En coulisses est le blogue des Événements Les Affaires. Nous vous proposons un accès privilégié aux meilleures pratiques de la communauté d’affaires québécoises qui sont partagées lors de nos conférences. Chaque semaine, nous discutons avec certains des gestionnaires qui ont accepté d’être conférenciers à nos événements, afin de vous présenter des idées concrètes pour vous aider dans votre réflexion et répondre à vos préoccupations d'affaires.