Passer d'entrepreneur à gestionnaire, c'est possible?

Publié le 17/09/2018 à 06:32

Passer d'entrepreneur à gestionnaire, c'est possible?

Publié le 17/09/2018 à 06:32

(Photo: 123rf.com)

Voici le premier blogue d'Élise Boutin Michaud, chasseuse de têtes chez Fauve et Associés. Sa mission est de présenter la perspective d’un chasseur de têtes de cadres et d’exécutifs sur la transition, le développement et la gestion proactive de carrière en fonction de la réalité du marché, du monde des affaires et des statistiques.


BLOGUE INVITÉ. C’est sur toutes les tribunes, les entrepreneurs sont valorisés et recherchés. En tant que chasseur de têtes, nous voyons très souvent l’«esprit entrepreneurial» dans le profil idéal pour un poste à combler. Quand nous rencontrons les candidats, nous cherchons les initiatives, la proactivité, le leadership, la capacité à prendre des risques. Plusieurs attributs de cet esprit entrepreneurial.

Pour autant, est-ce qu’un entrepreneur souhaitant intégrer le marché du travail comme employé trouverait facilement sa place? A-t-il ce profil tant recherché? Pas nécessairement. Plusieurs éléments contribueront ou non à son intégration dans un poste de gestion au sein d’une organisation. 

Tout d’abord, les motivations qui incitent cet entrepreneur à se chercher un emploi doivent être clarifiées d’emblée, et ce n’est pas chose facile. S’il a connu beaucoup de succès, il sera vu comme indépendant de fortune et ayant peu d’attache à son nouveau rôle dès le moindre désagrément. S’il a fait faillite ou si le destin de son entreprise n’est pas couronné de succès, il pourra susciter la méfiance avant même de s’être présenté.

C’est un contexte où il y a tout de même plusieurs éléments et nuances à apporter pour se démarquer auprès d’un chasseur de têtes.

Pour débuter: humilité, humilité, humilité. L’entrepreneur a certainement touché à plusieurs aspects de la business; la stratégie, les finances, la production, l’expérience client, pour ne nommer que ceux-là. Toutefois, les rôles d’exécutifs en entreprise sont beaucoup plus circonscrits. Le chasseur de têtes cherchera donc des compétences très solides dans un de ces aspects afin de trouver une adéquation avec un rôle particulier. Il voudra aussi déceler une capacité à collaborer, à gérer et à se faire diriger.

En ce sens, il peut être payant de se positionner dans un créneau, en commençant par le titre que l’on s’attribue, dans son CV et dans ses profils en ligne, pour toutes les années passées dans son entreprise. Il faut faire un choix. Par exemple, un actionnaire fondateur dans une firme de technologie gagnera à remplacer son titre d’associé par celui de chef des technologies ou chef des opérations. Certaines fonctions de pointe sont très recherchées, il faut savoir s’y positionner. En abordant ses démarches sous un angle clair, ses cibles d’emploi seront définies et les recruteurs sauront rapidement quelles sont les opportunités pertinentes. 

Les attentes salariales des ex-entrepreneurs sont souvent surestimées par les chasseurs de têtes. «Je suis indépendant de fortune» ou «j’ai déjà gagné l’argent dont j’ai besoin pour vivre» ont souvent été entendues dans nos bureaux et viennent renforcer cette perception. Cela vient nuire à la candidature, voire mettre fin au processus d’un candidat. Tant mieux si la santé financière de ce candidat est assurée, mais comment réagit-il lorsqu’il est contrarié? Sera-t-il capable de se rallier à une décision qui lui déplait? Quittera-t-il l’entreprise dès qu’un projet de voyage lui semblera plus inspirant? Ici encore, l’humilité est de mise. Il n’y a aucun avantage à mettre l’accent sur la cagnotte gagnée dans le passé, malgré tous les efforts qui ont été requis. Il faut donc être concis sur ce détail et se concentrer sur les compétences et les motivations autres que financières. 

Évidemment, il est important, tant pour le poste convoité que le salaire attendu, de rester dans un niveau similaire à son expertise et sa séniorité. Un chef des finances qui serait ouvert à des postes d’analystes pour un salaire correspondant à la moitié de ce qu’il a déjà gagné ne sera pas pris au sérieux. Il faut donc chercher un poste de niveau similaire à ce qui était fait précédemment ou concéder un échelon hiérarchique, mais pas plus.

Finalement, il est crucial de se connaître. Le concept est simple, mais par exemple, le caractère de l’entrepreneur en dira long sur son aisance en tant qu’employé. Certaines cultures corporatives favorisent les initiatives et d’autres favorisent la collégialité. Quelques rôles offrent beaucoup de marge de manœuvre et d’autres sont limités à des mandats très définis. Pour se connaître et en apprendre plus sur les environnements corporatifs, il faut se connecter à son réseau. S’exposer à des événements d’associations, de chambres de commerce… eh oui, ces événements que l’entrepreneur fuyait peut-être depuis longtemps sont utiles. Il est possible d’y renouer avec des contacts, de faire de nouvelles connaissances, de faire connaître votre intérêt pour des postes. 

Les implications sincères et à long terme auprès des causes qui vous tiennent à cœur sont aussi une source importante de relations. Ne les négligez pas, on vous y connaît fort probablement sous votre meilleur jour.

Vos commentaires sont les bienvenus, n’hésitez pas à partager votre expérience ou vos questions. On se donne rendez-vous le mois prochain!