Devrait-on s'inquiéter du recul des rachats d'actions?

Publié le 28/09/2016 à 15:56

Devrait-on s'inquiéter du recul des rachats d'actions?

Publié le 28/09/2016 à 15:56

Les entreprises du S&P 500 ont été les moins nombreuses depuis 2010 à racheter leurs actions au deuxième trimestre et la valeur des rachats d’actions a aussi été la plus faible depuis 2013.

Quelque 275 sociétés ont racheté 127,5 milliards de dollars américains (G$US) d’actions, soit 21% de moins qu’au trimestre précédent et 3% de moins qu’un an plus tôt, rapporte S&P Dow Jones Indices.

Devrait-on s’inquiéter de voir le moins grand appétit des entreprises à racheter leurs actions? Après tout, la manne souvent critiquée des rachats a été un important carburant pour la relance de la Bourse depuis 2009.

Ce déclin survient aussi alors que les bénéfices des entreprises reculent depuis bientôt six trimestres.

Pour l’instant, les analystes de S&P Dow Jones Indices et FactSet Research restent confiants que les entreprises continueront de redistribuer du capital à leurs actionnaires, mais ils surveillent tout de même la tendance de plus près.

«Il n’est pas rare de voir les entreprises prendre une pause après une période de rachats record. Au premier trimestre, les sociétés avaient été particulièrement actives pendant la chute de 11% du S&P 500 en février», rappelle Howard Silverblatt, analyste principal des indices, chez S&P Dow Jones Indices.

Ce vétéran de l’analyse indicielle estime que les sociétés répartissent tout simplement leur budget de rachat tout au long de l’année pour rencontrer leurs objectifs annuels.

Les membres du S&P 500 devraient donc réactiver leurs rachats au cours des deux prochains trimestres si ce n’est que pour neutraliser l’effet de dilution des options d’achat d’actions qu’ils émettent annuellement à leurs cadres.

«Elles devront dépenser davantage pour éliminer le nombre voulu d’actions parce que les cours se sont appréciés de 6,7% depuis un an», prédit-il.

Les entreprises de l’indice phare américain en ont les moyens puisqu’elles ont des liquidités record de 1374 milliards de dollars américains (G$US) à leur disposition, soit l’équivalent de 86 semaines de bénéfices avant impôts, précise l’analyste de New York.

La hausse des dividendes se modère aussi depuis quelque temps. C’est signe que les entreprises ont compris qu’elles n’ont pas besoin de les majorer autant pour attirer des investisseurs parce que le prolongement de la détente des taux suffit à soutenir l’attrait relatif du rendement de leur dividende actuel, avance M. Silverblatt.

Les investisseurs activistes semblent aussi un peu moins vocaux qu’avant à réclamer des dividendes et des rachats. 2015 avait été une année record à cet égard.

Apple et GE ont dépensé le plus

Ces compilations peuvent donner un portait faussé de la réalité.

Dans les faits, vingt sociétés seulement représentent la moitié des rachats de 127,5G$US, au deuxième trimestre.

En tête, Apple(AAPL,114,04$US) a racheté 10,2G$US de ses actions, réduisant de 5,5% le nombre de ses actions. Elle est suivie par le rachat de 8G$US General Electric(GE,29,83$US) qui a effectué le tiers de programme de 50G$US prévu après la vente de GE Capital, éliminant jusqu’à maintenant 11% de ses actions.

La biopharmaceutique mondiale née en 2013 d'une scission d'Abbott, AbbVie(ABBV,64,24$US) suit au troisième rang avec un rachat de 3,8G$US. Microsoft(MSFT,58$US) et McDonald(MCD,115,05$US) ferment le peloton de tête avec des rachats respectifs, de 3,7$US et de 3,4G$US.

En dollars, le secteur de la technologie compte encore pour la part de lion (24%) des rachats, bien que la cadence ait décliné depuis l’an dernier,

Les multinationales de produits de consommation ont pour leur part accru leurs rachats de 49% au deuxième trimestre grâce à Wal-Mart(WMT, 71,83$US, 2G$US), Monster Beverage(MNST,146,67$US, 2G$US) et CVS Health(CVS, 90,10$US, 1,9G$US).

La baisse des taux à la rescousse des bénéfices en berne

Chez FactSet, l’analyste Andrew Birstingl surveille particulièrement la valeur des rachats par rapport aux bénéfices. Il signale que la valeur des rachats représentait 71,5% des bénéfices, au deuxième trimestre, 11% de plus que la proportion moyenne des deux dernières années.

Sur une base annuelle, ce ratio est le plus élevé depuis la crise de 2009, mais rappelons que les bénéfices étaient déprimés à l’époque.

Ensemble, les dividendes versés et les rachats d’actions dépassent les bénéfices du S&P 500, depuis le deuxième trimestre de 2015.

En proportion des flux de trésorerie, la vraie capacité financière des entreprises, les rachats sont plus raisonnables. En moyenne, elles distribuent 53,7% de leurs flux.

Il n’est donc pas étonnant dans ces circonstances que les entreprises profitent des faibles taux actuels pour emprunter afin de financer leur retour de capital.

Il faudra néanmoins que les profits prennent du mieux bientôt pour que les rachats trouvent un deuxième souffle.

La dette totale des entreprises du S&P 500 est à un sommet en 10 ans, observe l’analyste de FactSet.

«Cette pratique pourrait devenir plus coûteuse à l’avenir si la Réserve fédérale augmente son taux directeur comme prévu», dit M. Birstingl.

Pour tout le tapage entourant les rachats, en tant que source de rendement financier, il est surprenant de constater que les deux principaux fonds négociés en Bourse qui investissent dans les «racheteurs» d’actions n’aient pas surpassé le S&P 500 ni le Nasdaq, ces dernières années.

Créé en février 2015, le SPDR S&P 500 Buyback ETF(SPYB,48,03$US) s’est apprécié de 1,9% depuis un an par rapport à 7,2% pour le S&P 500, tandis que le PowerShares Buyback Achievers Portfolio(PKW,47,09$US) a avancé de 87,5% depuis 5 ans par rapport à la hausse de 100% de l’indice Nasdaq, en date du 16 septembre.

Voici les dix entreprises du S&P500 qui ont été les plus habiles ou chanceuses à racheter leurs actions au rabais, depuis 12 mois:

Société,symbole/ Rabais par rapport au cours moyen de l’année

 

  • AmerisourceBergen, ABC/18%
  • Chipotle, CMG/11%
  • Pfizer, PFE/9%
  • Alliance Data Systems, ADS/8,8%
  • Express Scripts, ESRX/8,4%
  • E*Trader, EFTC/8,5%
  • Best Buy, BBY/8,0%
  • Mallinckrodt, MNK/7,6%
  • Baker Hughes, BHI/6,8%
  • Hologic, HOLX/6,8%

 

Source : FactSet Research Systems

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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